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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE

Société SAMSE contre Nicolas Mabileau

Litige No. DEU2021-0012

1. Les parties

Le Requérant est la société SAMSE, France, représentée par la SELARL Mongouachon Avocat, France.

Le Défendeur est Nicolas Mabileau, France.

2. Nom de domaine et unité d’enregistrement

Le Registre du nom de domaine litigieux est “European Registry for Internet Domains” (ci-après désigné “EURid” ou le “Registre”). Le nom de domaine litigieux <groupesamse.eu> est enregistré auprès de Tucows.com Co. (ci-après désigné “l’Unité d’enregistrement”).

3. Rappel de la procédure

Une plainte a été déposée par la société SAMSE auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 18 mars 2021.

Le 19 mars 2021, le Centre a adressé une requête au Registre aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Le 23 mars 2021, le Registre a transmis sa vérification au Centre confirmant l’ensemble des données du litige.

Le Centre a vérifié que la plainte répond bien aux Règles relatives au règlement des litiges concernant les domaines .eu (ci-après dénommées les “Règles ADR”) et aux Règles supplémentaires de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle pour l’application des Règles relatives au règlement des litiges concernant les domaines .eu (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”).

Conformément aux paragraphes B(2) des Règles ADR et 4(d) des Règles supplémentaires, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative a été adressée le 9 avril 2021 au Défendeur. Conformément au paragraphe B(3) des Règles ADR, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 21 mai 2021. Le Défendeur n’a fait parvenir aucune réponse. Le 25 mai 2021, le Centre notifiait le défaut du Défendeur.

Le 4 juin 2021, le Centre nommait Stéphane Lemarchand comme expert dans le présent litige. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Règles ADR. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance conformément au paragraphe B(2) des Règles ADR.

Bien que le contrat d’enregistrement du nom de domaine litigieux soit rédigé en langue anglaise, le Requérant avait, le 9 novembre 2020, déposé une requête auprès de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle afin de solliciter le changement de langue de la procédure, en prenant argument de la maîtrise de la langue française par le Défendeur. La commission administrative nommée pour cette question avait fait droit à cette demande par une décision en date du 6 janvier 2021, et la langue de la procédure est donc le français (voir Samse contre Nicolas Mabileau, Litige No. DEUL2020-0007)

4. Les faits

Le Requérant est une société constituée le 14 juin 1921 sous la dénomination sociale “SAMSE” qui exerce une activité de distribution de matériaux de construction et d’outillage en France, à travers un réseau de plus de 350 points de vente. L’activité du Requérant consiste à s’approvisionner en matériaux de construction auprès de fournisseurs français et européens, puis à les revendre à une clientèle de professionnels et de particuliers.

Le Requérant est titulaire de :

- La marque française verbale SAMSE déposée le 4 décembre 2006 et enregistrée le 11 mai 2007 sous le numéro 3467033, désignant en classes 35 des services de commerce de détail de divers produits, matériaux, outils ou appareils entrant dans le processus de construction et de rénovation de l’habitat;

- La marque française semi-figurative déposée le 17 février 2017 et enregistrée le 13 octobre 2017 sous le numéro 3467033, désignant les mêmes services en classe 35;

- Le nom de domaine <groupe-samse.fr> est enregistré le 13 juin 2005.

Les marques du Requérant sont exploitées sur le site marchand accessible à l’URL suivant “www.groupe-samse.fr” en relation avec les activités évoquées ci-dessus.

Le Défendeur a procédé à l’enregistrement du nom de domaine litigieux <groupesamse.eu> auprès de l’Unité d’enregistrement le 8 mai 2020, soit à une date postérieure à l’enregistrement des marques françaises n°3467033 et 4338992 et du nom de domaine <groupe-samse.fr> susvisés du Requérant.

A la date à laquelle la plainte a été déposée, le nom de domaine litigieux <groupesamse.eu> dirige vers une page de parking avec des liens pay-per-link.

5. Argumentation des parties

A. Requérant

Le Requérant estime que :

(i) le nom de domaine litigieux <groupesamse.eu> est identique ou semblable à ses droits antérieurs au point de prêter confusion avec sa dénomination sociale, ses marques et son nom de domaine;

(ii) le Défendeur n’a aucun droit sur le nom de domaine litigieux, ni aucun intérêt légitime qui s’y attache;

(iii) le nom de domaine litigieux a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi.

En premier lieu, le Requérant considère que le nom de domaine litigieux <groupesamse.eu> est fortement similaire à ses marques antérieures, à son nom de domaine et à sa dénomination sociale, ce qui a pour conséquence de créer un risque de confusion entre les signes considérés. Il insiste sur le fait que le nom de domaine litigieux reproduit intégralement et dans le même ordre les termes composant sa marque française n°3467033 et le nom de domaine <groupe-samse.fr>. Le Requérant ajoute que le nom de domaine litigieux reproduit par ailleurs intégralement la marque française SAMSE n°3467033.

Selon le Requérant, ce risque de confusion est d’autant plus évident que le Défendeur est parvenu à prendre contact et à établir une communication avec des fournisseurs du Requérant qui ont cru s’adresser aux membres de la société du Requérant.

En second lieu, le Requérant soutient que le Défendeur n’a aucun droit sur le nom de domaine litigieux, ni aucun intérêt légitime qui s’y attache au sens de l’Article 21, paragraphe 2, du Règlement (CE) n°874/2004 de la Commission Européenne et du paragraphe B(1)(b)(10)(i)(B) des Règles ADR. Le Requérant fait valoir à cet égard que : (a) le Défendeur a enregistré le nom de domaine de nombreuses années après la création de la société SAMSE et après l’enregistrement des marques et du nom de domaine du Requérant; (b) le Défendeur n’est pas identifié/connu sous le nom de domaine litigieux mais apparaît sous son nom personnel Nicolas Mabileau dans la base de données relative aux noms de domaines .eu (Annexe 2 de la plainte); et (c) il n’existe aucune preuve d’un usage du nom de domaine en relation avec une offre de bonne foi de produits ou de services, ni de préparatifs sérieux à cet effet.

En dernier lieu, le Requérant estime que le nom de domaine litigieux a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi au sens de l’Article 21, paragraphe 3, du Règlement (CE) n°874/2004 de la Commission Européenne et du paragraphe B(1)(b)(10)(i)(C) des Règles ADR. Le Requérant soutient à cet égard que le Défendeur aurait usé de manœuvres frauduleuses consistant à se faire passer pour un représentant de la société SAMSE afin de passer des commandes au nom de cette dernière, et d’obtenir la livraison des produits commandés tout en les faisant facturer par les fournisseurs concernés à la société SAMSE.

A l’appui de sa démonstration, le Requérant rapporte les faits suivants :

(a) Au cours des mois de juin et juillet 2020, plusieurs fournisseurs de matériaux européens entretenant pour certains des relations commerciales avec le Requérant ont été contactés par courriel par des individus se présentant comme des représentants du Requérant par l’utilisation d’adresses électroniques composées des extensions “samse-groupe.fr” et “groupesamse.eu”. Ces courriers électroniques enjoignaient aux fournisseurs concernés d’adresser à l’expéditeur des courriels un catalogue de leurs produits, afin que ce dernier procède à des commandes aux fins de revente des produits dans le cadre de campagnes promotionnelles (Annexes 14 et 15 de la plainte).

(b) Cette manœuvre aurait permis à un prétendu représentant de la société SAMSE de convaincre une société italienne de lui fournir des produits d’une valeur de EUR 80,360 et de les livrer en Grande Bretagne. Cette dernière n’aurait pris conscience de la tentative d’escroquerie qu’au dernier moment et n’aurait finalement pas livré lesdits produits en les facturant au Requérant (Annexe 15 de la plainte).

B. Défendeur

Le Défendeur n’a pas répondu aux arguments du Requérant.

Il y a donc lieu de statuer au vu des seuls arguments du Requérant.

6. Discussion et conclusions

Conformément au paragraphe B(7)(b) des Règles ADR, la Commission administrative doit veiller à ce que les parties soient traitées de façon équitable et que chaque partie bénéficie de la même juste chance de présenter son cas.

En l’espèce, le Défendeur n’a pas répondu aux allégations du Requérant.

Toutefois, le défaut de réponse du Défendeur n’entraîne pas automatiquement une décision en faveur du Requérant, bien que la Commission administrative ait le droit d’en tirer des conclusions appropriées, conformément au paragraphe B(10)(b) des Règles ADR (voir la Synthèse des avis des commissions de l’OMPI sur certaines questions relatives aux principes UDRP, troisième édition - “Synthèse de l’OMPI, version 3.0”1, section 4.3).

C’est donc au regard de l’ensemble de ces règles que la Commission administrative examinera ci-après la position des parties.

A. Identité ou similitude prêtant à confusion avec un nom sur lequel le Requérant a un droit reconnu ou établi en vertu du droit national d’un Etat Membre et/ou du droit de l’Union européenne

Par la présentation de certains extraits de bases de données, le Requérant a valablement établi l’existence de plusieurs droits antérieurs, et notamment de sa titularité sur des marques couvrant des services de vente au détail de produits, matériaux, outils ou appareils liés au secteur du bâtiment et aux activités de construction.

Tout d’abord, il convient de relever que le nom de domaine litigieux <groupesamse.eu> reprend l’intégralité des termes constituant les marques SAMSE et GROUPE SAMSE. Cette pratique d’incorporation a souvent été relevée dans les décisions de commissions administratives comme un fort indice de cybersquatting (Voir en ce sens Crédit Agricole S.A. contre Marconi Jessica, Litige OMPI No. D2017-0492).

En l’espèce, le nom de domaine litigieux ne diffère des marques du Requérant, et plus précisément de la marque GROUPE SAMSE, que par l’ajout de l’extension “.eu”.

Or, une telle différence est dénuée de tout caractère distinctif et est, dès lors, sans incidence sur le risque établi de confusion.

En effet, de nombreuses décisions ont déjà retenu, sur le fondement des Règles ADR, que l’incorporation d’une marque reproduite à l’identique au sein d’un nom de domaine est suffisante pour établir que le nom de domaine est identique ou semblable au point de prêter à confusion à la marque sur laquelle le requérant a des droits reconnus et établis en vertu du droit national d’un État Membre et/ou du droit de l’Union européenne, même si elle est combinée à un terme non distinctif. (voir en ce sens la section 1.8 de la Synthèse OMPI, version 3.0. .

De plus, il est de jurisprudence constante que l’ajout d’une extension inhérente aux noms de domaine (et notamment de premier niveau, telle que “.eu”) doit être ignorée s’agissant de l’appréciation de la similarité entre une marque et un nom de domaine (voir en ce sens Allianz SE v. IP Legal, Allianz Bank Limited, Litige OMPI No. D2017-0287; Boursorama S.A. contre Plumier Alain, Litige OMPI No. D2020-1265 et Disney Enterprises, Inc. and The Walt Disney Company Limited v. James West, Travel West, Litige OMPI No. DEU2020-0011.

Le risque de confusion n’est donc pas contestable dans la présente affaire. L’Internaute pourrait en effet être porté à croire, à tort, que le nom de domaine litigieux est la propriété du Requérant et qu’il désigne, via l’extension “.eu”, des produits ou des services qu’il offrirait sur le territoire européen.

En conséquence, la Commission administrative considère que le nom de domaine litigieux est bien identique ou semblable au point de prêter à confusion avec les droits de marque du Requérant : la condition posée au B(11)(d)(i) des Règles ADR est donc satisfaite.

B. Droits ou intérêts légitimes

Conformément au paragraphe B(11)(d)(1)(ii) des Règles ADR, la charge de la preuve de l’absence de droits et intérêts légitimes repose sur le Requérant.

Le paragraphe B(11)(e) des Règles ADR décrit les circonstances qui, si la Commission administrative estime qu’elles sont prouvées, doivent démontrer les droits ou les intérêts légitimes du Défendeur sur le nom de domaine litigieux.

Ces circonstances sont les suivantes :

“(1) Avant la notification du litige, le Défendeur a utilisé le nom de domaine ou la dénomination correspondant au nom de domaine en relation à une offre de biens ou de services, ou démontre avoir effectué des préparatifs à une telle démarche;
(2) Le Défendeur, qu’il s’agisse d’une personne morale, d’une organisation ou d’une personne physique est généralement connu sous ce nom de domaine même s’il n’existe pas relativement au nom de domaine concerné un droit reconnu ou établi par le droit national et/ou par le droit de l’Union Européenne;
(3) Le Défendeur utilise le nom de domaine de manière légitime et à des fins non commerciales et équitables, sans que son objectif soit d’induire le consommateur en erreur ou de porter atteinte à la réputation de la dénomination sur laquelle porte un droit reconnu ou établi par le droit national et/ou par le droit de l’Union Européenne.”

Au regard de décisions antérieures rendues par des Commissions administratives sur le fondement des Règles ADR et eu égard à la difficulté d’apporter la démonstration d’un fait négatif, il est constant qu’il suffit au Requérant d’établir, prima facie, que le Défendeur ne détient pas de droit ou d’intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux. Il incombe ensuite au Défendeur de renverser cette présomption. S’il n’y parvient pas, le Requérant est présumé avoir satisfait aux exigences posées par le paragraphe B(11)(d)(1)(ii) des Règles ADR. (voir également la section 2.1 de la Synthèse de l’OMPI, version 3.0 précitée, et Gymworld Inc. and Magformers UK Limited v. Vanbelle Jo, Vanbelle Law, Litige OMPI No. DEU2017-0001.).

En l’espèce, le Défendeur n’a présenté aucune allégation ou preuve. Il appartient donc à la Commission administrative de se fonder sur les allégations du Requérant, et sur ses propres constatations, pour déterminer si cette preuve de l’absence de droit ou intérêt légitime est établie, prima facie. En l’espèce, l’absence de droits et intérêts légitimes du Défendeur s’infère des circonstances ci-après.

Tout d’abord, rien ne permet de considérer que le Défendeur serait généralement connu/identifié (en tant que personne physique, entreprise ou autre organisation) sous le nom de domaine litigieux au sens du paragraphe B(11)(e)(2) des Règles ADR.

Rien ne permet ensuite d’identifier une utilisation du nom de domaine litigieux, des actes préparatoires en vue de proposer une offre de biens ou de services de bonne foi, ou une utilisation non commerciale légitime ou loyale au sens du paragraphe B(11)(e)(2) et (3) des Règles ADR.

En effet, le Requérant fournit la preuve que le nom de domaine litigieux renvoie vers une page parking contenant des liens pay-per-link, sans contenu substantiel et sans se rattacher à une entité ou à une personne spécifique proposant une offre de biens ou de services.

En outre, les enregistrements de deux marques et d’un nom de domaine par le Requérant incluant les éléments “groupe samse” ou “samse” sont antérieurs de plusieurs années à l’enregistrement du nom de domaine litigieux.

Le Défendeur étant une personne physique qui n’est pas connue sous le nom de domaine litigieux, la légitimité des intérêts du Défendeur sur le nom de domaine litigieux n’est pas établie. (voir en ce sens Owens Corning Fiberglas Technology, Inc. contre Hammerstone, Litige OMPI No. D2003-0903).

Au vu de ce qui précède, le Requérant a établi prima facie l’absence de droit ou intérêt légitime du Défendeur.

En tout état de cause, aucune des circonstances prévues au paragraphe B(11)(e) des Règles ADR n’est remplie en l’espèce.

En conséquence et en l’absence de réponse du Défendeur à la plainte, la Commission administrative conclut que le Défendeur n’a aucun droit ni intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux. Le critère repris au paragraphe B(11)(d)(1)(ii) des Règles ADR est donc rempli.

C. Enregistrement ou usage de mauvaise foi

Aux termes du paragraphe B(11)(d)(1)(iii) des Règles ADR, le Requérant doit démontrer que le nom de domaine litigieux a été enregistré ou est utilisé de mauvaise foi par le Défendeur.

A ce titre, le paragraphe B(11)(f) des Règles ADR précise que chacune des circonstances mentionnées ci‑après de manière non exhaustive est susceptible de démontrer un enregistrement ou une utilisation de mauvaise foi d’un nom de domaine, si la Commission administrative les considère comme prouvées :

“(1) Les circonstances indiquent que le nom de domaine a été enregistré ou acquis avant tout dans le but de la vente, de la location ou d’un autre transfert du nom de domaine au titulaire d’une dénomination déterminée à l’égard de laquelle le droit national et/ou le droit de l’Union Européenne reconnaît ou établit un doit, ou à une autorité publique, ou

(2) Le nom de domaine a été enregistré dans l’objectif d’empêcher le titulaire d’une dénomination déterminée à l’égard de laquelle le droit national et/ou le droit de l’Union Européenne reconnaît ou établit un droit, ou à une autorité publique, d’utiliser le nom de domaine correspondant à cette dénomination si :

i) le Défendeur a adopté de manière récurrente un tel comportement déloyal, ou

ii) le nom de domaine n’a pas été exploité d’une manière pertinente pendant une durée de deux ans au moins après la date de l’enregistrement, ou

iii) au moment de l’ouverture de la Procédure ADR, le Défendeur a déclaré avoir l’intention d’utiliser de manière effective le nom de domaine à l’égard duquel le droit national et/ou le droit de l’Union Européenne reconnaît ou établit un droit ou qui correspond au nom d’une autorité publique, mais qu’il ne l’a pas fait dans les six mois à compter de la date de l’ouverture de la Procédure ADR;

(3) le nom de domaine a été enregistré surtout dans le seul but de perturber l’activité professionnelle d’un concurrent, ou

(4) le nom de domaine a été intentionnellement utilisé pour capter la clientèle internaute sur le site internet du Défendeur ou sur un autre site et d’en tirer profit, ce en créant un risque de confusion avec la dénomination à l’égard de laquelle le droit national et/ou le droit de l’Union Européenne reconnaît ou établit un droit, ou avec la dénomination d’une autorité publique, ce risque de confusion étant établi compte tenu de la source, du financement, de l’affiliation ou du support des pages web, ou de la localisation, du produit ou du service sur les pages web concernées, ou de la localisation du Défendeur, ou

(5) le nom de domaine est le nom personnel et il n’existe aucun lien entre le Défendeur et le nom de domaine enregistré.”

Tout d’abord, la Commission administrative rappelle que cette liste de circonstances permettant d’établir la mauvaise foi du Défendeur est non exhaustive.

En l’espèce, la Commission administrative relève les circonstances ci-après.

- Concernant l’enregistrement de mauvaise foi

Tout d’abord, le Requérant dispose de marques antérieures au nom de domaine litigieux.

En ce qui concerne l’enregistrement de mauvaise foi, il est peu probable que le Défendeur n’ait pas eu connaissance du Requérant au moment où il a réservé le nom de domaine litigieux, dans la mesure où la dénomination sociale et les marques du Requérant sont distinctives et que le nom de domaine litigieux les reproduit à l’identique. La Commission administrative estime qu’il ne peut s’agir d’une simple coïncidence.

En outre, la Commission administrative considère peu plausible que le Défendeur, établi en France, pays d’établissement du Requérant, ait pu ignorer les marques du Requérant, et l’utilisation de son nom de domaine dans le cadre de l’offre de ses services.

En effet, outre le nom de domaine litigieux, le Défendeur avait par ailleurs procédé à l’enregistrement du nom de domaine <samse-groupe.fr>, le 10 mai 2020, auprès du bureau d’enregistrement KEY-SYSEMS GmbH, et dont le Défendeur a également fait usage dans le cadre du démarchage de fournisseurs ou potentiels fournisseurs du Requérant. La Commission administrative y voit un indice de la connaissance qu’avait le Défendeur de la dénomination sociale, des marques et des activités du Requérant.

Compte tenu du fait que l’ordre naturel des termes “groupe” et “samse” en langue française est “groupe samse”, et non “samse groupe”, il est en effet vraisemblable que le Défendeur ait été contraint d’enregistrer le nom de domaine <samse-groupe.fr> plutôt que <groupe-samse.fr> après avoir constaté que ce dernier n’était plus disponible pour avoir été enregistré antérieurement par le Requérant.

Dans ces conditions, la Commission administrative estime que l’enregistrement du nom de domaine litigieux, qui est identique ou quasiment identique à la dénomination sociale et aux marques du Requérant, ne peut raisonnablement être le fruit du hasard. Aussi convient-il de considérer que le signe constituant les marques du Requérant a été repris et enregistré au titre du nom de domaine litigieux en toute connaissance, c’est-à-dire, de mauvaise foi.

- Concernant l’usage de mauvaise foi

Le Défendeur n’a manifestement pas utilisé le nom de domaine litigieux en lien avec une page active.

La détention passive d’un nom de domaine n’empêche toutefois pas la Commission administrative de conclure à une utilisation de mauvaise foi, selon les circonstances du cas particulier (voir la section 3.3 de la Synthèse de l’OMPI, version 3.0 précitée).

L’utilisation d’un nom de domaine à des fins autres que l’hébergement d’un site web peut en effet constituer une utilisation de mauvaise foi. Ces fins comprennent l’envoi de courriels, l’hameçonnage, l’usurpation d’identité ou la distribution de logiciels malveillants. De nombreux cas de ce type impliquent l’utilisation par le défendeur du nom de domaine pour envoyer des courriels trompeurs, par exemple pour obtenir des informations personnelles sensibles ou confidentielles, ou pour solliciter le paiement de factures frauduleuses par les clients actuels ou potentiels du requérant (voir la section 3.4 de la Synthèse de l’OMPI, version 3.0.).

Dans le cas présent, il ressort des éléments versés au débat par le Requérant qu’entre juin et juillet 2020, il a été fait usage d’adresses emails correspondant au nom de domaine litigieux “[…]@groupesamse.eu” appartenant en apparence à des représentants du Requérant (Annexe 14 de la plainte et Annexe 15 de la plainte). Ces courriels avaient pour objet le démarchage de potentiels fournisseurs en vue d’une livraison de grandes quantités de produits qui auraient été facturés au Requérant.

Il apparaît par ailleurs qu’outre l’utilisation du nom de domaine litigieux et la signature usurpée de membres du Requérant, le ou les expéditeur(s) de ces courriels a(ont) utilisé un faux tampon de la société SAMSE, ainsi que sa marque et son logo, permettant ainsi d’accroître l’impression de légitimité des échanges.

La Commission administrative considère que la date à laquelle ces tentatives de démarchage sont intervenues, soit très peu de temps après les enregistrements du nom de domaine litigieux <groupesamse.eu> et du nom de domaine <groupe-samse.fr> respectivement les 8 et 10 mai 2020, n’est pas anodine. Elle constitue un indice important de ce que le Défendeur a enregistré et utilisé le nom de domaine litigieux dans le but de tromper des fournisseurs du Requérant en se faisant passer pour un de ses représentants afin de passer des commandes en son nom.

Les commissions administratives ont déjà qualifié ce type de comportement de hameçonnage frauduleux justifiant le transfert du nom de domaine litigieux en raison d’un enregistrement et d’une utilisation de mauvaise foi par le Défendeur (Voir en ce sens Colas, société anonyme contre Jerome Morin, Litige OMPI No. DEU2020-0014).

En conséquence, il convient de constater que les pièces présentées par le Requérant permettent de conclure que le Défendeur a fait usage du nom de domaine <groupesamse.eu> avec l’intention de tromper les fournisseurs du Requérant et avait enregistré ce nom de domaine dans le but de créer un risque de confusion dans l’esprit desdits fournisseurs.

Le critère repris au paragraphe B(11)(d)(1)(iii) des Règles ADR est donc rempli.

7. Décision

Pour les raisons exposées ci-dessus, la Commission administrative estime que les conditions du paragraphe B(11)(d) (i), (ii) et (iii) des Règles ADR sont cumulativement réunies.

En conséquence, conformément au paragraphe B(11) des Règles ADR, la Commission administrative ordonne que le nom de domaine litigieux <groupesamse.eu> soit transféré au Requérant.

Stéphane Lemarchand
Expert Unique
Le 20 juin 2021

Summary in English

In accordance with Paragraphs B(12)(i) of the ADR Rules and 14 of the WIPO Supplemental Rules for the ADR Rules, below is a brief summary in English of WIPO Case No. DEU2021-0012:

1. The Complainant is the company SAMSE of France, and the Respondent is Nicolas Mabileau of France.

2. The disputed domain name is <groupesamse.eu>. The disputed domain name was registered on May 8, 2020 with Tucows.com. Co and currently resolves to a parking page with pay-per-click website.

3. The Complaint was filed in French on March 18, 2021 and the Respondent did not file a response. The Panel, Stéphane Lemarchand, was appointed on June 4, 2021.

4. The Complainant has two French Trademarks for SAMSE (Registration Number 3467033) registered on May 11, 2007 and (Registration Number 3467033) registered on October 13, 2017.

5. Pursuant to Article 21(1) of the Commission Regulation (EU) No. 874/2004 and Paragraph B(11)(d)(1)(i)-(iii) of the ADR Rules, the Panel finds that:

The disputed domain name is identical or confusingly similar to a name in respect of which a right or rights are recognized or established by national law of a Member State and / or European Union law.

The Respondent has no rights or legitimate interests in the disputed domain name.

The Respondent has registered and is using the disputed domain name in bad faith.

6. In accordance with Paragraph B(11) of the ADR Rules the Panel decides that the disputed domain name <groupesamse.eu> be transferred to the Complainant.


1 Notant les similitudes entre les Principes directeurs régissant le règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (les "Principes UDRP") et les Règles ADR, la Commission administrative s’est référé à des décisions UDRP antérieures et à la Synthèse de l’OMPI, version 3.0.