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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE

Carrefour contre Manouil Rafier et Maria Del Carmen Serrano Hernandez

Litige No. D2020-1186

1. Les parties

Le Requérant est Carrefour, France, représenté par IP Twins S.A.S., France.

Les Défendeurs sont Manouil Rafier, Allemagne et Maria Del Carmen Serrano Hernandez, Espagne.

2. Noms de domaine et unité d’enregistrement

Les noms de domaine litigieux <carrefour-carte.best>, <carrefour-cartpass.best>, <carrefour-espace-client.best> et <carrefour-noscartes.com> sont enregistrés auprès de Hosting Concepts B.V. d/b/a Openprovider (ci-après désigné “l’Unité d’enregistrement”).

3. Rappel de la procédure

Une plainte a été déposée par Carrefour auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 12 mai 2020. En date du 12 mai 2020, le Centre a adressé une requête à l’Unité d’enregistrement aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant concernant les noms de domaine litigieux <carrefour-noscartes.com> et <carrefour-espace-client.best>. Le 13 mai 2020, l’Unité d’enregistrement a transmis sa vérification au Centre révélant l’identité des titulaires des noms de domaine litigieux <carrefour-noscartes.com> et <carrefour-espace-client.best> et leurs coordonnées, différentes du nom du Défendeur et des coordonnées désignés dans la plainte. Le 15 mai 2020, le Centre a envoyé un courrier électronique au Requérant avec les données relatives aux titulaires des noms de domaine litigieux telles que communiquées par l’Unité d’enregistrement et invitant le Requérant à modifier la plainte en ajoutant les titulaires divulgués par l’Unité d’enregistrement en tant que défendeurs officiels et fournir des arguments ou preuves pertinents démontrant que tous les défendeurs nommés sont, en fait, la même entité et / ou que tous les noms de domaine litigieux sont sous contrôle commun; et / ou déposer une plainte distincte pour tout nom de domaine pour lequel il n’est pas possible de démontrer que tous les défendeurs nommés sont en fait la même entité et / ou que tous les noms de domaine sont sous contrôle commun. Le Requérant a envoyé un courrier électronique au Centre le 19 mai 2020, dont le Centre a accusé réception le 21 mai 2020. Le Requérant a déposé une plainte amendée le 25 mai 2020 et a ajouté deux noms de domaine à la plainte <carrefour-carte.best> et <carrefour-cartpass.best>. Le 26 mai 2020, le Centre a adressé une requête à l’Unité d’enregistrement aux fins de vérification des éléments du litige concernant les noms de domaine litigieux <carrefour-carte.best> et <carrefour-cartpass.best>. Le 27 mai 2020, l’Unité d’enregistrement a transmis sa vérification au Centre confirmant que les Défendeurs sont les titulaires des noms de domaine mentionnés dans la plainte amendée. Le Centre a envoyé une demande de confirmation au Requérant le 5 juin 2020, à laquelle il a répondu le même jour.

Le 8 juin 2020, le Centre a informé le Requérant qu’il semble qu’il y ait prima facie des arguments suffisants pour justifier l’acceptation de la plainte aux fins de la décision définitive de la commission administrative concernant la demande de consolidation des Défendeurs.

L’Unité d’enregistrement a aussi indiqué que la langue du contrat d’enregistrement du nom de domaine litigieux était l’anglais. La plainte a été déposée en français et le Requérant a déposé une demande afin que le français soit la langue de la procédure.

Le Centre a vérifié que la plainte et la plainte amendée répondaient bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés “Principes directeurs”), aux Règles d’application des Principes directeurs (ci-après dénommées les “Règles d’application”), et aux Règles supplémentaires de l’OMPI (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”) pour l’application des Principes directeurs précités.

Conformément aux paragraphes 2 et 4 des Règles d’application, le 8 juin 2020, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée aux Défendeurs en français et en anglais. Conformément au paragraphe 5 des Règles d’application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 28 juin 2020. Les Défendeurs n’ont fait parvenir aucune réponse. En date du 29 juin 2020, le Centre notifiait le défaut des Défendeurs.

En date du 16 juillet 2020, le Centre nommait W. Scott Blackmer comme expert dans le présent litige. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d’application.

4. Les faits

Le Requérant est une société anonyme française ayant son siège social à Massy, France. Fondée en 1959, le Groupe Carrefour est l’un des leaders mondiaux de la grande distribution et le pionnier du concept d’hypermarché dès 1968, avec un chiffre d’affaires de EUR 76 milliards en 2018. Ses actions sont listées à la bourse de Paris. Le Requérant dispose de plus de 12,000 magasins dans plus de 30 pays, exploités en propre ou en franchise. Le Requérant utilise notamment le site Internet “www.carrefour.com”, et est présent sur les réseaux sociaux. La page Facebook du Requérant est par exemple “aimée” par plus de 11 millions de personnes.

Le Requérant détient plusieurs centaines de droits de marque verbale sur la dénomination “carrefour” partout dans le monde. Le Requérant est titulaire, par exemple, des marques suivantes :

- La marque internationale CARREFOUR numéro 351147, enregistrée le 2 octobre 1968;
- La marque internationale CARREFOUR numéro 353849, enregistrée le 28 février 1969;
- La marque de l’Union européenne CARREFOUR numéro 005178371, enregistrée le 30 août 2007;
- La marque de l’Union européenne CARREFOUR numéro 008779498, enregistrée le 13 juillet 2010.

La marque CARREFOUR a été reconnue comme marque notoire dans plusieurs décisions UDRP, par exemple : Carrefour v. Contact Privacy Inc. Customer 0155401638 / Binya Rteam, Litige OMPI No. D2019-2895; Carrefour v. Perfect Privacy, LLC / Milen Radumilo, Litige OMPI No. D2019-2610; Carrefour contre Reda Akhbou, Mercato, Litige OMPI No. D2018-0668.

Selon l’Unité d’enregistrement, les noms de domaines litigieux sont enregistrés comme suit :

Nom de domaine

Titulaire

Date d’enregistrement

<carrefour-carte.best>

Manouil Rafier, Berlin, Allemagne

5 mai 2020

<carrefour-espace-client.best>

Manouil Rafier, Berlin, Allemagne

5 mai 2020

<carrefour-noscartes.com>

Maria Del Carmen Serrano Hernandez, Granada, Espagne

5 mai 2020

<carrefour-cartpass.best>

Manouil Rafier, Berlin, Allemagne

5 mai 2020

Une site Internet du Requérant, “www.carrefour-banque.fr”, met en avant les services financiers proposés par Carrefour Banque, une filiale du Requérant, y compris une carte bancaire “carte PASS”. Le site contient un onglet “Espace Client”.

Au jour de la décision, les noms de domaine litigieux ne pointent pas vers des pages actives. Toutefois, le Requérant fournit des captures d’écran montrant qu’auparavant la page associée au nom de domaine litigieux <carrefour-espace-client.best> reproduisait une partie du site Carrefour Banque du Requérant, avec un formulaire intitulé “Accès à votre Espace Client” où l’Internaute pouvait rentrer son numéro d’identification et son code secret. Le code source de cette page faisait référence aussi au nom de domaine <carrefour-services.pro>, un site supprimé à la suite d’une requête du représentant du Requérant. Le nom de domaine litigieux <carrefour-noscartes.com> redirige vers le nom de domaine litigieux <carrefour-espace-client.best>. Ce site a été retiré à la suite d’une requête du représentant du Requérant. Selon la plainte, les noms de domaine litigieux et le nom de domaine <carrefour-services.pro> ont fait l’objet d’un placement en liste noire pour “phishing”, car ils présentaient un risque de récupération frauduleuse de données personnelles.

5. Argumentation des parties

A. Requérant

Le Requérant soutient que ces noms de domaine litigieux reproduisent à l’identique les marques antérieures CARREFOUR du Requérant dans son intégralité, apposée à des termes génériques.

Le Requérant constate que les Défendeurs ne sont pas communément connus par les noms de domaine litigieux et que le Requérant n’a aucune relation commerciale de quelque sorte avec les Défendeurs. Le Requérant a effectué une recherche des marques, et cette recherche n’a fait apparaitre aucune marque CARREFOUR détenue par un titulaire autre que le Requérant. L’unique utilisation des noms de domaines litigieux jusqu’à présent est pour rediriger les Internautes vers un site actif reproduisant le site Carrefour Banque du Requérant. Le Requérant soutient qu’une telle utilisation ne saurait relever d’une offre de produits ou de services de bonne foi de la part des Défendeurs.

Le Requérant affirme que les marques CARREFOUR jouissent d’une telle renommée qu’il est inconcevable que les Défendeurs ignorent ces droits antérieurs. Le Requérant soutient qu’il est fort probable que les Défendeurs ont choisi d’enregistrer les noms de domaine litigieux précisément du fait de leur ressemblance avec la page “Espace Client” au site Carrefour Banque du Requérant. Le Requérant souligne aussi l’ensemble des autres faits impliquant la mauvaise foi des Défendeurs : la reproduction d’une marque notoire au sein du nom de domaine contesté, l’absence de réponse des Défendeurs, l’utilisation d’un service de protection d’anonymat.

B. Défendeurs

Les Défendeurs n’ont pas répondu aux arguments du Requérant.

6. Discussion et conclusions

Conformément au paragraphe 4(a) des Principes directeurs, le Requérant a la charge d’établir cumulativement que :

(a) les noms de domaine sont identiques ou semblables au point de prêter à confusion, à une marque de produits ou de services sur laquelle le Requérant a des droits;

(b) les Défendeurs n’ont aucun droit sur le nom de domaine litigieux ni aucun intérêt légitime qui s’y attache;

(c) les noms de domaine litigieux ont été enregistrés et sont utilisés de mauvaise foi.

6.1 Question préliminaire : Langue de la procédure

Le Requérant demande que le français soit la langue de la procédure, même si les contrats d’enregistrement sont en anglais. (Lors du dépôt de la plainte, le 12 mai 2020, le Requérant a imaginé que la langue du contrat d’enregistrement était le néerlandais, mais l’Unité d’enregistrement a précisé que la langue du contrat d’enregistrement est l’anglais pour les quatre noms de domaines litigieux.) Selon le paragraphe 11(a) des Règles d’application, “sauf convention contraire entre les parties ou stipulation contraire du contrat d’enregistrement, la langue de la procédure est la langue du contrat d’enregistrement; toutefois, la commission administrative peut décider qu’il en sera autrement, compte tenu des circonstances de la procédure administrative”.

Les commissions administratives ont la possibilité d’opter pour une langue de procédure autre que celle du contrat d’enregistrement, surtout dès lors que les défendeurs comprennent apparemment la langue de la plainte, ou du moins qu’ils ont eu la possibilité de contester ce choix et ne l’ont pas fait, et que le choix de la langue du contrat d’enregistrement désavantagerait injustement le requérant, notamment en raison de contraintes de traduction (voir le paragraphe 4.5.1 de la Synthèse des avis des commissions administratives de l’OMPI sur certaines questions relatives aux Principes UDRP, troisième édition (“Synthèse, version 3.0”).

Le Requérant dans la procédure en cours est domiciliée en France. Deux des noms de domaine litigieux ont été utilisés pour diriger les internautes vers un site francophone, un site imitant un site Internet exploité par le Requérant. Les autres noms de domaine litigieux ne sont pas encore exploités, mais ils sont également constitués de la marque du Requérant suivi par des termes utilisés par le Requérant sur ses propres sites Internet. Dans ce contexte, il est probable que les Défendeurs maîtrise le français, et il serait inéquitable, selon la Commission administrative, d’obliger le Requérant à traduire la plainte et ses annexes. Les Défendeurs, qui ont reçu les communications du Centre en français et en anglais, ont de plus eu la possibilité de s’opposer au choix du français comme langue de la procédure.

La Commission administrative fait donc droit à la requête du Requérant et accepte le français comme langue de la procédure.

6.2 Question préliminaire : Consolidation

En vertu du paragraphe 3(c) des Règles d’application “[l]a plainte peut porter sur plusieurs noms de domaine, à condition que ces noms de domaine soient enregistrés par le même titulaire”.

Selon le paragraphe 10(e), “Un panel doit arbitrer la demande d’une partie de consolider plusieurs litiges portant sur des noms de domaine conformément à la politique et à ces règles”.

Trois des noms de domaine litigieux sont enregistrés par le même titulaire, le Défendeur Manouil Rafier. L’autre, <carrefour-noscartes.com>, est enregistré par le Défendeur Maria Del Carmen Serrano Hernandez.

Le Requérant a fourni dans la plainte amendée des arguments démontrant que tous les noms de domaines litigieux sont néanmoins sous contrôle commun. Qu’ils soient fictifs ou alliés, les titulaires partagent évidement les mêmes buts et les mêmes moyens : les quatre noms de domaine litigieux ont été enregistrés auprès de la même Unité d’enregistrement le 5 mai 2020, chacun commençant avec le nom “carrefour”. Le nom de domaine litigieux <carrefour-noscartes.com>, enregistré par le Défendeur Maria Del Carmen Serrano Hernandez, redirige vers le nom de domaine litigieux <carrefour-espace-client.best>, enregistrés par le Défendeur Manouil Rafier.

Dans de tels instances, lorsqu’il est démontré que les noms de domaine contestés sont effectivement contrôlés par une seule personne ou sont sous un contrôle commun, parfois à travers des identités fictives, les commissions administratives ont, par le passé, développé une jurisprudence tendant à accepter que la consolidation des plaintes serve un objectif d’efficacité et doit être juste et équitable pour les Parties. Voir Synthèse, version 3.0, section 4.11.2; LIDL Stiftung & Co. KG (LIDL International), SNC LIDL (LIDL France) contre nom anonymisé, nom anonymisé, nom anonymisé, Lydia Perez, Litige OMPI No. D2017-1548.

En l’espèce, la Commission administrative considère que les quatre noms de domaine litigieux sont sous contrôle commun et peuvent ainsi faire l’objet d’une même procédure.

A. Identité ou similitude prêtant à confusion

Le Requérant détient la marque verbale CARREFOUR. Tous les noms de domaine litigieux incluent la marque dans son intégralité, suivie par des termes qui ne permettent pas d’écarter un risque de confusion : “carte”, “cartpass”, “espace-client”, “noscartes”.

De nombreuses décisions ont déjà constaté, sur le fondement des Principes directeurs, que l’incorporation d’une marque reproduite à l’identique au sein d’un nom de domaine est suffisante pour établir que le nom de domaine est identique ou semblable au point de prêter à confusion à la marque sur laquelle le requérant a des droits, et que la simple adjonction d’un mot à cette marque, qu’il soit descriptif, géographique, péjoratif, sans signification ou autre, est insuffisante pour éviter un tel risque de confusion. Voir Synthèse, version 3.0, section 1.8.

Il est reconnu dans les décisions UDRP que l’adjonction des extensions génériques de premier niveau “gTLD” (generic Top-Level Domain) est généralement dépourvu d’importance. Voir Synthèse, version 3.0, section 1.11.

La Commission administrative détermine donc que les noms de domaine litigieux portent à confusion avec les marques du Requérant et que l’exigence du paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs est satisfaite. La Commission administrative retient que le premier critère des Principes directeurs est rempli.

B. Droits ou intérêts légitimes

Le paragraphe 4(c) des Principes directeurs donne des exemplaires non limitatifs de circonstances qui, si la Commission administrative constate qu’ils sont prouvés, démontrent les droits ou intérêts légitimes des Défendeurs dans les noms de domaine litigieux aux fins du paragraphe 4(a)(ii) des Principes directeurs. Selon le paragraphe 4(c) des Principes directeurs :

“L’une ou l’autre des circonstances suivantes, si elles sont considérées comme avérées par la Commission administrative sur la base de son évaluation des éléments de preuve présentes, attesteront notamment de vos droits ou intérêts légitimes dans le nom de domaine aux fins du paragraphe 4(a)(ii) :

(i) avant d’avoir eu connaissance du litige, vous avez utilisé le nom de domaine ou d’un nom correspondant au nom de domaine en relation avec une offre de bonne foi de produits ou de services, ou fait des préparatifs sérieux à cet effet;

(ii) vous (individu, entreprise ou autre organisation) êtes connu sous le nom de domaine considéré même sans avoir acquis des droits sur une marque de produits ou de services; ou

(iii) vous faites un usage non commercial légitime ou un usage loyal du nom de domaine sans intention de retourner à des fins lucratives les consommateurs en créant une confusion ni de ternir la marque de produits ou de services en cause.”

Parce qu’il est difficile de prouver un fait négatif, il est généralement admis que le requérant doit établir prima facie que le défendeur n’a pas de droit ni d’intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux, et puis il incombe ensuite au défendeur d’établir le contraire (voir Synthèse, version 3.0, section 2.1).

Dans la procédure en cours, la Commission administrative constate que le Requérant a établi prima facie que les Défendeurs n’ont pas de droit ni d’intérêt légitime sur les noms de domaine litigieux, surtout parce qu’ils ne correspondent pas aux noms ou entreprises des Défendeurs et parce que le Requérant n’a pas autorisé les Défendeurs à utiliser leur marque bien-connue.

La Commission administrative estime qu’il appartenait aux Défendeurs d’établir qu’ils ont un droit ou un intérêt légitime sur les noms de domaine litigieux. Les Défendeurs ne l’ont pas fait, et ces droits ou intérêts ne sont pas évidents. Il n’est pas plausible que les Défendeurs planifie une utilisation pertinente des noms de domaine litigieux. Au contraire, ils ont utilisé deux noms de domaine litigieux pour un site contrefait, imitant précisément le site de Carrefour Banque. Il n’y a aucune possibilité d’intérêts légitimes reflétés dans une telle utilisation.

La Commission administrative estime que la deuxième condition du paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs est remplie.

C. Enregistrement et usage de mauvaise foi

Le paragraphe 4(b) des Principes directeurs énumère quatre circonstances non limitatives qui, si cette Commission administrative estime qu’elles sont présentes, seront la preuve de I ‘enregistrement et de l’usage de nom de domaine litigieux de mauvaise foi.

L’exemple le plus pertinent est le quatrième :

“(iv) en utilisant le nom de domaine, vous avez sciemment tente d’attirer, à des fins lucratives, les utilisateurs de l’Internet sur un site Web ou autre espace en ligne vous appartenant, en créant une probabilité de confusion avec la marque du requérant en ce qui concerne la source, le commanditaire, l’affiliation ou I’approbation de votre site ou espace Web ou d’un produit ou d’un service qui y est proposé.”

C’est une bonne description de l’utilisation par les Défendeurs des deux noms de domaine trompeurs (<carrefour-espace-client.best> et <carrefour-noscartes.com>) qui orientaient autrefois les internautes vers un site contrefait imitant le site de Carrefour Banque, où on demandait des numéros d’identification de compte et des codes secrets.

Même si les Défendeurs n’ont pas encore exploités les deux autres noms de domaines litigieux, <carrefour-carte.best> et <carrefour-cartpass.best>, ils sont également constitués de la marque notoire du Requérant suivi par les termes utilisés par le Requérant sur ses propres sites Internet, surtout le site “www.carrefour-banque.fr”, où se trouve des annonces à propos des cartes bancaires et la “carte PASS”. Donc, il est probable que ces deux noms de domaines litigieux aient été acquis dans le même esprit que les deux autres noms de domaine litigieux enregistrés en même temps, pour tromper les internautes et frauder les titulaires des comptes de Carrefour Banque. Une autre explication n’est pas crédible, et les Défendeurs ne se sont pas présentés pour en offrir une. Le fait que ces noms de domaine litigieux sont pas encore exploités pour des buts illicites n’empêche pas la conclusion qu’ils sont enregistrés et détenus de mauvaise foi. Voir Synthèse, version 3.0, section 3.3; Telstra Corporation Limited v. Nuclear Marshmallows, Litige OMPI No. D2000-0003.

La Commission administrative en conclut ainsi que les Défendeurs ont enregistré et utilisent de mauvaise foi les quatre noms de domaine litigieux. La troisième condition des Principes directeurs est ainsi remplie.

7. Décision

Pour les raisons exposées ci-dessus, et conformément aux paragraphes 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d’application, la Commission administrative ordonne que les noms de domaine litigieux <carrefour-carte.best>, <carrefour-cartpass.best>, <carrefour-espace-client.best> et <carrefour-noscartes.com> soient transférés au Requérant.

W. Scott Blackmer
Expert Unique
Le 30 juillet 2020