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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE L’EXPERT

Les Laboratoires Servier, Biofarma et Monsieur Jacques Servier contre Samir Laroussi Robio

Litige n° DFR2011-0004

1. Les parties

Les Requérants sont Les Laboratoires Servier, Biofarma, et Monsieur Jacques Servier, Neuilly-sur-Seine, France, représenté par Hogan Lovells (Paris) LLP, France.

Le Défendeur est Samir Laroussi Robio, Juvisy sur Orge, France.

2. Nom de domaine et prestataire Internet

Le litige concerne les noms de domaine :

<affaire-mediator.fr> enregistré le 23 décembre 2010

<affaire-servier.fr> enregistré le 23 décembre 2010

<jacques-servier.fr> enregistré le 23 décembre 2010

<jacquesservier.fr> enregistré le 23 décembre 2010

<laboratoires-servier.fr> enregistré le 25 décembre 2010

<medicament-mediator.fr> enregistré le 23 décembre 2010

<scandale-mediator.fr> enregistré le 23 décembre 2010

Le prestataire Internet est la société OVH NET.

3. Rappel de la procédure

Une demande déposée par Les Laboratoires Servier, Biofarma et Monsieur Jacques Servier auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) a été reçue le 9 février 2011.

Le 10 février 2011, le Centre a adressé à l’Association Française pour le Nommage Internet en Coopération (ci-après l’“Afnic”) une demande aux fins de vérification des éléments du litige et de gel des opérations.

Le 10 février 2011, l’Afnic a confirmé l’ensemble des données du litige, ainsi qu’aucune procédure administrative applicable au nom de domaine objet du litige n’est pendante.

Le Centre a vérifié que la demande répond bien au Règlement sur la procédure alternative de résolution des litiges du “.fr” et du “.re” par décision technique (ci-après le “Règlement”) en vigueur depuis le 22 juillet 2008, et applicable à l’ensemble des noms de domaine du “.fr” et du “.re” conformément à la Charte de nommage de l’Afnic applicable (ci-après la “Charte”).

Conformément à l’article 14(c) du Règlement, une notification de la demande, valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur le 15 février 2011. Conformément à l’article 15 du Règlement, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 7 mars 2011. Le Défendeur a fait parvenir sa réponse le 7 mars 2011. En application de l’article 6(f) du Règlement, l’Expert ne prendra pas en considération les échanges survenus entre les Requérants et le Défendeur les 14 et 16 mars 2011, soit après la date limite du 7 mars 2011 pour faire parvenir une réponse.

Le 21 mars 2011, le Centre nommait Christophe Caron comme Expert dans le présent litige. L’Expert constate qu’il a été nommé conformément au Règlement. L’Expert a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément à l’article 4 du Règlement.

4. Les faits

Le groupe Servier est composé de plusieurs sociétés dont les deux Requérants suivants: Les Laboratoires Servier et Biofarma. Le troisième Requérant, Monsieur Jacques Servier, est fondateur du groupe Servier. Le groupe Servier est un laboratoire pharmaceutique présent dans 140 pays.

Le groupe Servier connaît depuis l’automne 2010, une médiatisation importante du fait des enquêtes sur les risques liés à la prise de l’un de ses médicaments, le Mediator.

Le groupe Servier dispose de nombreuses marques et noms de domaines comprenant les termes “Les Laboratoires Servier”, “Servier” et “Mediator”.

Le Défendeur est une personne physique dont l’activité principale est la régie publicitaire de médias selon son certificat d’inscription au Répertoire SIRENE et qui se présente comme exerçant l’activité d’une agence de communication spécialisée sur Internet dénommée “Web Reputation Consulting”.

Le 23 et 25 Décembre 2010, le Défendeur a enregistré les noms de domaines suivants :

<affaire-mediator.fr>

<affaire-servier.fr>

<jacques-servier.fr>

<jacquesservier.fr>

<laboratoires-servier.fr>

<medicament-mediator.fr>

<scandale-mediator.fr>

Le 6 janvier 2011, les Requérants ont été contactés par le Défendeur afin de conclure un accord commercial de location des noms de domaines enregistrés pour un montant total annuel de 6.000 Euros par nom de domaine. Le Défendeur proposait également de céder ces noms de domaine sans qu’un prix de cession soit proposé.

Le 17 janvier 2011, le conseil des Requérants adressait au Défendeur un courrier de mise en demeure invoquant les droits des Requérants sur les noms de domaines enregistrés et demandant le transfert des noms de domaine à leur profit.

Le même jour, par courrier électronique, le Défendeur réitéra sa proposition commerciale et envoya un nouveau devis. Le conseil des Requérants rappela alors par courrier électronique au Défendeur que les Requérants n’ont jamais autorisé le Défendeur à procéder à l’enregistrement des noms de domaine ce qui rendrait leur utilisation abusive.

Le 18 janvier 2011, le Défendeur indiqua qu’il refuserait dorénavant toute communication avec les Requérants.

Le 4 février 2011, les Requérants reçurent pourtant un courrier électronique de l’agence Web Reputation Consulting (émanant d’une autre personne que le Défendeur) les invitant à maintenir des “relations cordiales” et leur indiquant que la proposition commerciale était toujours d’actualité.

Les Requérants ont alors décidé de s’adresser au Centre afin d’obtenir la transmission des noms de domaine litigieux à leur profit.

5. Argumentation des parties

A. Requérants

Les Requérants expliquent qu’ils ont des droits sur les termes “Laboratoire Servier”, “Servier”, “Mediator” et “Jacques Servier”.

Ces droits résulteraient :

De la dénomination sociale Les Laboratoires Servier :

Les Requérants insistent sur le fait que cette dénomination existe depuis la création de la société, soit 22 ans avant l’enregistrement des noms de domaine litigieux.

De l’enregistrement de nombreuses marques :

-Marque française LES LABORATOIRES SERVIER n° 1601029 enregistrée par Les Laboratoires Servier le 19 juillet 1965;

-Marque internationale LES LABORATOIRES SERVIER n° 304005 enregistrée par Les Laboratoires Servier le 22 octobre 1965;

-Marque française SERVIER N° 033218342 enregistrée par Les Laboratoires Servier le 1er avril 2003;

-Marque communautaire SERVIER n° 004279171 enregistrée par Les Laboratoires Servier le 7 février 2005;

-Marque internationale SERVIER n° 814214 enregistrée par Les Laboratoires Servier le 5 août 2003;

-Marque française MEDIATOR n° 1480901 enregistrée par Biofarma le 1er août 1988;

-Marque internationale MEDIATOR n° 352752 enregistrée par Biofarma le 24 janvier 1969;

Les Requérants soulignent le caractère fortement distinctif de ces marques dans le secteur pharmaceutique.

De l’enregistrement et l’exploitation des noms de domaine :

-<servier.net> (enregistré le 3 février 1997)

-<mediator.tm.fr> (enregistré le 13 février 1997)

-<servier.org> (enregistré le 27 août 1997)

-<servier.com> (enregistré le 29 décembre 1998)

-<leslaboratoiresservier.com> (enregistré le 29 juin 2001)

-<servier.info> (enregistré le 27 août 2001)

-<servier.biz> (enregistré le 19 novembre 2001)

-<servierlaboratories.com> (enregistré le 19 décembre 2003)

-<servier.fr> (enregistré le 17 décembre 2004)

-<leslaboratoiresservier.eu> (enregistré le 29 avril 2006)

-<servier.eu> (enregistré le 3 juillet 2006)

-<servier-medicament.com> (enregistré le 4 décembre 2006)

-<servier.pro> (enregistré le 10 novembre 2008)

Des droits de Monsieur Jacques Servier sur son nom patronymique :

Les Requérants expliquent que Jacques Servier, fondateur du groupe Servier est une personne ayant acquis une grande renommée dans le secteur pharmaceutique.

Dès lors, les Requérants soutiennent que les noms de domaines litigieux constituent une reproduction servile à la fois de la dénomination sociale “Les laboratoires Servier”, des marques, des noms de domaine détenus par les Requérants et du nom patronymique de Monsieur Jacques Servier. Par conséquent, ils estiment que l’enregistrement de ces noms de domaine et leur utilisation portent atteinte à chacune des catégories de droits qu’ils détiennent.

Ils ajoutent que les noms de domaine sont fortement susceptibles d’être confondus avec les termes “Les Laboratoires Servier”, “Servier” et “Mediator”, ainsi qu’avec le nom Jacques Servier, sur lesquels les Requérants ont des droits protégés en France qui sont antérieurs à l’enregistrement des noms de domaine litigieux. Cette similitude serait, selon les Requérants, de nature à créer une confusion dans l’esprit du public.

Ils précisent que la seule adjonction de termes génériques tels que “affaire”, “médicament” et “scandale” n’écarte pas le risque de confusion entre les noms de domaine litigieux et les marques et autres droits des Requérants. Au contraire, ils soutiennent que l’ajout des termes génériques “affaire”, “médicament” et “scandale” accroit ce risque de confusion.

Les Requérants considèrent aussi que la renommée des marques “Les Laboratoires Servier”, “Servier” et “Mediator” n’est pas étrangère au choix du Défendeur d’enregistrer ces noms de domaines et qu’il n’a pu choisir ces noms de manière fortuite et sans volonté de faire référence aux marques des Requérants et au nom patronymique de Jacques Servier. Ils soulignent que le Défendeur explique lui-même avoir réalisé une étude relative aux Requérants afin d’identifier des noms de domaine qu’il qualifie de “sensibles”.

Ensuite, les Requérants soutiennent que le Défendeur n’a pas de droit, de quelque nature que ce soit, sur les termes “Les Laboratoires Servier”, “Servier” et “Mediator” ou “Jacques Servier”. Ils affirment avoir effectué dans ce sens des recherches sur des bases de données. Ils ajoutent que le Défendeur n’a jamais exploité et n’aurait aucune légitimité à exploiter une quelconque activité commerciale utilisant les noms “Les Laboratoires Servier”, “Servier”, “Mediator” ou “Jacques Servier”.

Enfin, les Requérants affirment que, compte tenu des propositions commerciales envoyées par le Défendeur, celui-ci aura des difficultés à nier avoir eu connaissance de l’existence des Requérants. D’autant plus que le prix proposé pour la location d’un nom de domaine dépasserait largement, selon les Requérants, le montant de frais d’enregistrement classiques. Les Requérants expliquent que l’utilisation de ces noms de domaine consiste à permettre la redirection vers un site comportant une mention selon laquelle le site est “protégé par l’agence de sécurité informatique Web Reputation Consulting” suivie des coordonnées du Défendeur.

Les Requérants concluent que l’envoi des propositions commerciales ajouté à l’utilisation qui est faite des noms de domaine montre à l’évidence que le Défendeur conserve ces noms de domaine à des fins spéculatives, c'est-à-dire avec pour objectif de vendre ces noms de domaine aux Requérants ou à des tiers.

Les Requérants considèrent dès lors que la pratique du Défendeur en matière d’enregistrement et d’utilisation des noms de domaine est déloyale et parasitaire.

En conclusion, les Requérants sollicitent la transmission à leur profit des noms de domaine litigieux.

B. Défendeur

Le Défendeur précise être une agence de communication spécialisée sur le web et traitant ainsi de nombreux sujets d’actualité en créant de nombreux sites web où les internautes peuvent échanger. Pour se faire, il propose à la vente des espaces de communication et de publicité tels que des sites Internet.

Suite à l’affaire concernant les risques liés à la prise du médicament Médiator qui a fait la une des journaux français, le Défendeur a décidé de créer des sites dédiés au Mediator, aux laboratoires Servier, ainsi qu’à son fondateur Jacques Servier. Il précise que ces sites sont édités par l’agence web communication consulting et qu’il ne peut, dans ce cas, y avoir de confusion dans l’esprit du public. Il ajoute que son agence ne commercialise pas de médicaments, et que par conséquent, il n’est pas à l’origine d’un acte de concurrence déloyale ou d’un acte de contrefaçon.

Le Défendeur précise être une entreprise privée, non soumise à un quelconque règlement tarifaire, et qu’il est donc libre de pratiquer les tarifs qu’il souhaite quant à la location ou à la vente des sites, tout en précisant que, plus le sujet est médiatisé, plus les noms de domaine se loueront ou se vendront chers, ce qu’il qualifie de “libéralisme économique”.

Enfin le Défendeur considère que les Requérants usent de procédures abusives qui seraient attentatoires à la liberté d’expression, de communication et d’entreprendre et qui auraient pour conséquence de le “spolier”.

6. Discussion

L’Expert rappelle que, en application de l’article 1 du Règlement, une atteinte aux droits des tiers est constituée lorsque le nom de domaine est identique ou susceptible d’être confondu avec un nom sur lequel est conféré un droit de propriété intellectuelle français ou communautaire (propriété littéraire et artistique et/ou propriété industrielle), ou est identique au nom patronymique d'une personne, sauf si le Défendeur fait valoir un droit ou un intérêt légitime sur le nom de domaine et agit de bonne foi. En application du même article, une atteinte aux règles de la concurrence désigne notamment une violation du comportement loyal en matière commerciale en droit français ou communautaire.

L’Expert souligne que, en application de l’article 20(c) du Règlement, il fait droit à la demande lorsque l'enregistrement ou l'utilisation du nom de domaine par le Défendeur constitue une atteinte aux droits des tiers ou aux règles de la concurrence telles que définies à l'article 1 du présent règlement et, si la mesure de réparation demandée est la transmission du nom de domaine, lorsque le Requérant a justifié de ses droits sur l'élément objet de ladite atteinte et sous réserve de sa conformité avec la Charte applicable.

(i) Droits des requérants sur les noms de domaine

Les Requérants apportent la preuve qu’ils ont des droits sur les termes “Laboratoire Servier”, “Servier”, “Mediator” et “Jacques Servier”.

En effet, comme en attestent les certificats d’enregistrement fournis, les Requérants ont acquis la propriété des marques :

-Marque française LES LABORATOIRES SERVIER n° 1601029 enregistrée par Les Laboratoires Servier le 19 juillet 1965;

-Marque internationale LES LABORATOIRES SERVIER n° 304005 enregistrée par LES Laboratoires Servier le 22 octobre 1965;

-Marque française SERVIER N° 033218342 enregistrée par Les Laboratoires Servier le 1er avril 2003;

-Marque communautaire SERVIER n° 004279171 enregistrée par Les Laboratoires Servier le 7 février 2005;

-Marque internationale SERVIER n° 814214 enregistrée par Les Laboratoires Servier le 5 août 2003;

-Marque française MEDIATOR n° 1480901 enregistrée par Biofarma le 1er août 1988;

-Marque internationale MEDIATOR n° 352752 enregistrée par Biofarma le 24 janvier 1969;

Ils sont aussi titulaires des noms de domaine :

-<servier.net> (enregistré le 3 février 1997)

-<mediator.tm.fr> (enregistré le 13 février 1997)

-<servier.org> (enregistré le 27 août 1997)

-<servier.com> (enregistré le 29 décembre 1998)

-<leslaboratoiresservier.com> (enregistré le 29 juin 2001)

-<servier.info> (enregistré le 27 août 2001)

-<servier.biz> (enregistré le 19 novembre 2001)

-<servierlaboratories.com> (enregistré le 19 décembre 2003)

-<servier.fr> (enregistré le 17 décembre 2004)

-<leslaboratoiresservier.eu> (enregistré le 29 avril 2006)

-<servier.eu> (enregistré le 3 juillet 2006)

-<servier-medicament.com> (enregistré le 4 décembre 2006)

-<servier.pro> (enregistré le 10 novembre 2008)

Par ailleurs, le Requérant Les laboratoires Servier est titulaire de droits sur les termes “laboratoires” et “Servier” puisque, lorsqu’ils sont associés, ils constituent la dénomination sociale de la société Les laboratoires Servier comme en atteste l’extrait Kbis de cette société.

Et enfin, Monsieur Jacques Servier, Requérant et fondateur du groupe Servier, dispose de droits sur son nom patronymique.

Il est donc incontestable que les Requérants justifient avoir des droits sur les termes “Laboratoire Servier”, “Servier”, “Mediator” et “Jacques Servier” qui constituent les noms de domaines litigieux.

(ii) Enregistrement ou utilisation du nom de domaine litigieux en violation des droits des tiers ou des règles de la concurrence

L’atteinte aux droits des tiers est constituée lorsque le nom de domaine est identique à un nom ou susceptible d’être confondu avec un nom sur lequel est conféré un droit de propriété intellectuelle français.

Afin de déterminer si les noms de domaines litigieux sont susceptibles d’être confondus avec les noms sur lesquels les Requérants ont des droits, il convient d’envisager les noms de domaines litigieux successivement :

Le nom de domaine <laboratoires-servier.fr>

L’expression “laboratoires Servier” correspond à la dénomination sociale de la société Les laboratoires Servier. Par ailleurs, cette société est titulaire de la marque “Les Laboratoires Servier” déposée auprès de l’INPI le 19 juillet 1965.

Il est constant que l’insertion d’un tiret entre les deux termes constitutifs d’un nom de domaine, ainsi que l’extension “.fr”, n’ont pas d’incidence pour déterminer si le terme protégé par un droit de propriété intellectuelle est susceptible d’être confondu avec un nom de domaine.

Il en résulte que le nom de domaine litigieux est identique à la marque déposée, ainsi qu’à la dénomination sociale d’un des Requérants. Cette identité engendre nécessairement un risque de confusion dans l’esprit des internautes d’attention moyenne.

Les noms de domaine <jacques-servier.fr> et <jacquesservier.fr>

Le nom “Jacques Servier” correspond au nom patronymique du fondateur du groupe Servier qui est aussi un des Requérants.

Or, l’atteinte aux droits des tiers est aussi constituée lorsque le nom de domaine est identique au nom patronymique d’une personne.

Il est constant que l’insertion d’un tiret entre les deux termes constitutifs d’un nom de domaine, ainsi que l’extension “.fr” n’ont pas d’incidence pour déterminer si le terme protégé est susceptible d’être confondu avec un nom de domaine.

Il en résulte que l’atteinte aux droits de Monsieur Jacques Servier est avérée dans le cadre de l’utilisation des noms de domaine <jacques-servier.fr> et <jacquesservier.fr>.

Le nom de domaine <affaire-servier.fr>

Le terme “servier” correspond à la fois au nom patronymique de Jacques Servier, à un des termes composant la dénomination sociale de la société Les Laboratoires Servier, à la marque Servier déposée par les Requérants auprès de l’INPI le 1er avril 2003, ainsi qu’au nom de domaine <servier.fr.> enregistré par les Requérants.

Or, il est constant que l’utilisation d’un mot générique tel que “affaire” n’écarte pas le risque de confusion entre le nom de domaine litigieux et les droits dont disposent les Requérants.

Il en résulte que le nom de domaine litigieux est susceptible d’être confondu avec les termes protégés par les droits que détiennent les Requérants sur le terme “Servier”.

Les noms de domaine <affaire-mediator.fr>, <medicament-mediator.fr>, <scandale-mediator.fr>

Le terme “mediator” correspond à la marque déposée à l’INPI le 1er aout 1988 dont les Requérants sont titulaires et qu’ils utilisent depuis de nombreuses années afin de commercialiser leur médicament portant ce même nom “Mediator”.

Il est constant que l’utilisation d’un mot générique tel que “affaire”, “médicament” ou “scandale” n’écarte pas le risque de confusion entre le nom de domaine litigieux et les droits dont disposent les Requérants.

Il en résulte que les noms de domaine litigieux sont susceptibles d’être confondu avec les termes protégés par les droits que détiennent les Requérants sur le terme “mediator”.

Par ailleurs, l’atteinte aux droits des tiers n’est pas constituée lorsque le défendeur fait valoir un droit ou un intérêt légitime sur le nom de domaine ou a agit de bonne foi.

Préalablement à l’enregistrement, le Défendeur aurait dû vérifier si les expressions “Laboratoires Servier”, “Jacques Servier” et “Mediator” faisaient l’objet ou non de droits de propriété intellectuelle. Or, force est de constater qu’une telle vérification n’a pas été faite puisque le Défendeur n’a enregistré les noms de domaine litigieux qu’en vue de les commercialiser par la suite. Il ne conteste pas avoir profité de la médiatisation de l’affaire relative aux risques liés à la prise du médicament Mediator vendu par Les Laboratoires Servier pour enregistrer ces noms de domaine litigieux qu’il comptait louer ou revendre soit aux Requérants, soit à des tiers. Un tel dessein ne saurait constituer un intérêt légitime pour enregistrer des noms de domaine portant atteinte aux droits d’un tiers.

Le choix de ces noms de domaine n’a pas été le fruit du hasard car ils ne sont que la reprise de termes connus de l’actualité en vue de profiter de cette notoriété afin de revendre ces noms de domaine au meilleur prix. Le Défendeur a donc réalisé sciemment cet enregistrement en violation des droits des tiers, il ne saurait dès lors arguer de sa bonne foi.

Enfin, en proposant aux Requérants de louer ou d’acheter les noms de domaines litigieux, notamment à un prix élevé, en les privant ainsi d’enregistrer eux-mêmes les termes litigieux et en n’exploitant pas les noms de domaine litigieux, le Défendeur a non seulement porté atteinte aux droits des tiers mais également aux règles qui gouvernent la loyauté commerciale.

Au regard de ce qui précède, l’Expert considère que le Défendeur a enregistré et utilisé les noms de domaine litigieux en violation tant des droits des tiers que des règles de concurrence.

7. Décision

Conformément aux articles 20(b) et (c) du Règlement, l’Expert ordonne la transmission au profit des Requérants des noms de domaine :

<affaire-mediator.fr>, <affaire-servier.fr>, <jacques-servier.fr>, <jacquesservier.fr>, <laboratoires-servier.fr>
<medicament-mediator.fr>, <scandale-mediator.fr>.

Christophe Caron
Expert
Le 25 mars 2011