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Centre d'arbitrage et de médiation de l'OMPI

DÉCISION DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE

Compagnie Française des Tissus c. Patrick Navarro

Litige No. D2015-1905

1. Les parties

Le Requérant est Compagnie Française des Tissus de Carcassonne, France, représenté par Cabinet Thevenet Decap McGreevy, France.

Le Défendeur est Patrick Navarro de Saint Cricq du Gave, France.

2. Nom de domaine et unité d'enregistrement

Le litige concerne le nom de domaine <lacompagniefrancaise.com>.

L'unité d'enregistrement auprès de laquelle le nom de domaine est enregistré est Gandi SAS.

3. Rappel de la procédure

Une plainte a été déposée par Compagnie Française des Tissus auprès du Centre d'arbitrage et de médiation de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le "Centre") en date du 26 octobre 2015. En date du 26 octobre 2015, le Centre a adressé une requête à l'unité d'enregistrement du nom de domaine litigieux aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Le 26 octobre 2015, l'unité d'enregistrement a transmis sa vérification au Centre confirmant l'ensemble des données du litige.

Le Centre a vérifié que la plainte répond bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés "Principes directeurs"), aux Règles d'application des Principes directeurs (ci-après dénommées les "Règles d'application"), et aux Règles supplémentaires de l'OMPI (ci-après dénommées les "Règles supplémentaires") pour l'application des Principes directeurs précités.

Conformément aux paragraphes 2(a) et 4(a) des Règles d'application, le 6 novembre 2015, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur. Conformément au paragraphe 5(a) des Règles d'application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 26 novembre 2015. Le Défendeur n'a fait parvenir aucune réponse. En date du 27 novembre 2015, le Centre notifiait le défaut du Défendeur.

En date du 2 décembre 2015, le Centre nommait dans le présent litige comme expert-unique Stéphane Lemarchand. La Commission administrative constate qu'elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d'application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d'acceptation et une déclaration d'impartialité et d'indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d'application.

4. Les faits

Le Requérant est une société constituée le 11 octobre 1996 sous la dénomination sociale "Compagnie Française des Tissus" pour une activité de commerce de tissus en tous genre, nouveautés et autres objets se rattachant à ce genre de commerce. II exploite la dénomination "La Compagnie Française" sur son site marchand accessible à l'adresse "www.lacompapniefrancaise.com" en relation avec les activités ci‑dessus.

Le Requérant est ainsi titulaire de la marque française semi-figurative LA COMPAGNIE FRANCAISE, enregistrée le 9 décembre 2014 sous le numéro 14 4 140 333 en classes 20 et 24 couvrant notamment les produits suivants: literie (à l'exception du linge de lit), matelas, meubles, couvertures de lit et de table.

Le Défendeur a procédé à l'enregistrement du nom de domaine litigieux <lacompagniefrancaise.com>, en son nom propre, le 24 septembre 2007, alors qu'il était salarié du Requérant depuis le 1er avril 2007.

Le site marchand du Requérant est hébergé au nom de domaine litigieux depuis au moins l'année 2008, son renouvellement annuel étant facturé directement au Requérant.

5. Argumentation des parties

A. Requérant

Le Requérant estime que:

- le nom de domaine litigieux est identique ou semblable au point de créer une confusion avec la marque LA COMPAGNIE FRANCAISE exploitée pour désigner son site internet marchand.

- le Défendeur n'a aucun droit sur le nom de domaine litigieux ni aucun intérêt légitime qui s'y attache dans la mesure où il a réservé le nom de domaine litigieux alors qu'il était salarié du Requérant et qu'il n'aurait pas reçu d'instructions de le déposer à son nom mais pour le compte de la société.

Le Requérant atteste que le renouvellement annuel du nom de domaine litigieux est facturé directement au Requérant.

- le nom de domaine litigieux a été enregistré de mauvaise foi dans la mesure où le Défendeur a enregistré le nom de domaine litigieux en son nom alors qu'il était salarié du Requérant, de sorte que le Défendeur ne pouvait ignorer l'existence des droits et l'activité du Requérant sous la marque en question.

Sur la base de l'ensemble de ces éléments, le Requérant sollicite le transfert du nom de domaine litigieux à son profit.

B. Défendeur

Le Défendeur n'a pas présenté d'arguments en réponse à la plainte déposée par le Requérant.

6. Discussion et conclusions

Le paragraphe 15(a) des Règles d'application prévoit que "la commission statue sur la plainte au vu des écritures et des pièces qui lui ont été soumises et conformément aux principes directeurs, aux présentes règles et à tout principe ou règle de droit qu'elle juge applicable".

Au demeurant, le paragraphe 4(a) des Principes directeurs impose au Requérant de prouver contre le Défendeur cumulativement que:

(i) le nom de domaine litigieux est identique ou semblable au point de prêter à confusion à une marque de produit ou de service sur laquelle le Requérant a des droits;

(ii) le Défendeur n'a aucun droit sur le nom de domaine litigieux ni aucun intérêt légitime qui s'y attache;

(iii) le nom de domaine litigieux a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi.

En conséquence, il y a lieu de s'attacher à répondre à chacune des trois conditions prévues par le paragraphe 4(a) des Principes directeurs.

A. Identité ou similitude prêtant à confusion

Le Requérant a valablement établi, par la présentation d'extraits de bases de données de marques, ses droits sur la marque semi-figurative LA COMPAGNIE FRANCAISE en France, en relation notamment avec les produits suivants: literie (à l'exception du linge de lit), matelas, meubles, couvertures de lit et de table.

Par ailleurs, le Requérant a établi exploiter le nom de domaine litigieux pour son site marchand sur lequel il offre à ses clients la possibilité de visualiser et d'acheter les produits qu'il propose à la vente.

Conformément à la jurisprudence constante du Centre, l'antériorité du nom de domaine litigieux sur l'enregistrement de la marque semi-figurative LA COMPAGNIE FRANCAISE est sans incidence dans l'examen de la condition posée par le paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs.

Le nom de domaine litigieux <lacompagniefrancaise.com> est identique à la marque LA COMPAGNIE FRANCAISE.

Cette identité est de nature à générer un risque de confusion pour I'internaute étant légitimement susceptible de penser que le nom de domaine litigieux est la propriété du Requérant, et ce d'autant plus que le nom de domaine héberge le site internet marchand du Requérant.

En conséquence, la Commission administrative considère que la première condition posée par le paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs est remplie.

B. Droits ou légitimes intérêts

Conformément aux Principes directeurs, le Requérant est tenu de démontrer prima facie que le Défendeur n'a pas de droits ou intérêts légitimes au regard du nom de domaine litigieux. II revient alors au Défendeur de faire la preuve de ses droits ou intérêts légitimes dans le nom de domaine litigieux, le cas échéant. Si le Défendeur ne présente pas de telles allégations ou les preuves appropriées, le Défendeur est généralement réputé avoir satisfait l'alinéa 4(a)(ii) des Principes directeurs.

En l'absence d'arguments en réponse présentés par le Défendeur pour justifier d'un droit ou d'un intérêt, il appartient à la Commission administrative de baser ses conclusions sur les allégations du Requérant et ses propres constatations.

II ressort des informations transmises dans le cadre de la plainte que le Défendeur ne justifie d'aucun droit de propriété intellectuelle sur la dénomination "La Compagnie Française" reproduite dans le nom de domaine litigieux.

Le fait que le Défendeur était salarié du Requérant à la date de I'enregistrement du nom de domaine litigieux ne change pas cette conclusion (Ruby's Diner, Inc. c. Joseph W Popow, Litige OMPI No. D2001-0868 "Un salarié ou ancien salarié n'est pas un licencié, et en conséquence n'est pas autorisé à utiliser la marque de la société ou toute déclinaison de cette marque sans la permission de son employeur"), et au contraire, démontre que le Défendeur avait parfaitement connaissance des droits légitimes du Requérant sur le signe en question.

Aussi, il résulte de ces éléments que le Défendeur ne peut justifier d'un droit ou d'un intérêt légitime dans le nom de domaine litigieux.

En conséquence, la Commission administrative considère que le Défendeur n'a pas de droit ni aucun intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux.

C. Enregistrement et usage de mauvaise foi

La paragraphe 4(b) des Principes directeurs dispose qu'aux fins du paragraphe 4(a)(iii), la preuve de ce que le nom de domaine litigieux a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi peut être constituée, en particulier, pour autant que leur réalité soit constatée par la Commission administrative, par les circonstances ci-après:

(i) les faits montrent que le Défendeur a enregistré ou acquis le nom de domaine essentiellement aux fins de vendre, de louer ou de céder d'une autre manière I'enregistrement de ce nom de domaine au Requérant qui est le propriétaire de la marque de produits ou de services, ou à un concurrent de celui‑ci, à titre onéreux et pour un prix excédant le montant des frais que le Défendeur peut prouver avoir déboursé en rapport direct avec ce nom de domaine;

(ii) le Défendeur a enregistré le nom de domaine en vue d'empêcher le propriétaire de la marque de produits ou de services de reprendre sa marque sous forme de nom de domaine, et le Défendeur est coutumier d'une telle pratique;

(iii) le Défendeur a enregistré le nom de domaine essentiellement en vue de perturber les opérations commerciales d'un concurrent ou;

(iv) en utilisant ce nom de domaine, le Défendeur a sciemment tente d'attirer, à des fins lucratives, les utilisateurs de l'internet sur un site web ou autre espace en ligne vous appartenant, en créant une probabilité de confusion avec la marque du Requérant en ce qui concerne la source, le commanditaire, l'affiliation ou l'approbation du site ou espace web ou d'un produit ou service qui y est proposé.

Cette liste n'est toutefois pas limitative et d'autres circonstances peuvent établir la mauvaise foi (Playboy Enterprises International Inc. c. SAND WebNames - For Sale, Litige OMPI No. D2001-0094; General Electric Company c. Fisher Zvieli, a/Wa Zvieli Fisher, Litige OMPI No. D2000-0377).

Après examen des pièces fournies dans la plainte, il en ressort que les faits présentés n'entrent dans aucune des circonstances énumérées au paragraphe 4(b) des Principes directeurs. Le Requérant n'a, en effet, apporté aucune preuve que le Défendeur aurait demandé une compensation financière pour le transfert du nom de domaine litigieux. Aucune preuve n'établit d'ailleurs que le Défendeur aurait eu un comportement destiné à empêcher le Requérant de reprendre sa marque sous forme de nom de domaine, ni d'ailleurs que l'enregistrement du nom de domaine litigieux aurait été effectué pour détourner le trafic du site internet du Requérant. Au contraire, force est de constater que le site internet hébergé sous le nom de domaine litigieux est exploité par le Requérant.

Toutefois, la Commission administrative considère que le nom de domaine litigieux a été enregistré et utilisé de mauvaise foi, dans la mesure où:

- le Défendeur était salarié du Requérant à la date d'enregistrement du nom de domaine et ne pouvait donc pas ignorer l'existence des droits légitimes du Requérant sur le nom de domaine litigieux (et les droits de marque potentiels du Requérant) au moment de son enregistrement, s'agissant du nom de domaine sur lequel le site marchand du Requérant devait être hébergé;

- le Défendeur avait la possibilité de régulariser à tout moment la propriété du nom de domaine litigieux, et ce d'autant plus, que le Requérant le lui en a fait la demande;

- en ne procédant pas à ces démarches de manière spontanée, le Défendeur démontre une volonté manifeste de se ménager un pouvoir de négociation dans tout éventuel litige qui l'opposerait à son employeur.

Un tel comportement ne saurait donc constituer un usage de bonne foi du nom de domaine, mais au contraire, constitue un usage de mauvaise foi, visant à tenter de monnayer le nom de domaine litigieux dans la négociation d'éventuels griefs liés à son emploi. La Commission administrative note que le Défendeur a été licencié par le Requérant en juillet 2015.

En conséquence, en application du paragraphe 4(a)(iii) des Principes directeurs et au vu de ce qui précède, la Commission administrative estime que le Défendeur a enregistré et utilisé le nom de domaine litigieux de mauvaise foi.

7. Décision

Pour les raisons exposées ci-dessus, la Commission administrative estime que les conditions du paragraphe 4(a)(i),(ii) et (iii) des Principes directeurs sont cumulativement réunies.

En conséquence, conformément au paragraphe 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d'application, la Commission administrative ordonne que le nom de domaine litigieux <lacompagniefrancaise.com> soit transféré au Requérant.

Stéphane Lemarchand
Expert Unique
Le 16 décembre 2015