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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE L’EXPERT

Société Jahida contre Mohammed Moussaid

Litige No. DFR2011-0015

1. Les parties

Le Requérant est la Société Jahida, Champigny-Sur-Marne, France, représentée par Alain Bensoussan Avocats, France.

Le Défendeur est Mohammed Moussaid, Bretigny sur Orge, France.

2. Nom de domaine et prestataire Internet

Le litige concerne le nom de domaine <jahida.fr> enregistré le 25 janvier 2011.

Le prestataire Internet est la société 1 & 1 Sarl.

3. Rappel de la procédure

Une demande déposée par le Société Jahida auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) a été reçue le 14 avril 2011.

Le 15 avril 2011, le Centre a adressé à l’Association Française pour le Nommage Internet en Coopération (ci-après l’“Afnic”) une demande aux fins de vérification des éléments du litige et de gel des opérations.

Le 15 avril 2011, l’Afnic a levé l’anonymat de l’identité du titulaire du nom de domaine et a confirmé qu’aucune procédure administrative applicable au nom de domaine objet du litige n’est pendante.

Suite à la communication du Centre en date du 21 avril 2011, le Requérant a amendé la demande en date du 28 avril 2011.

Le Centre a vérifié que la demande répondait bien au Règlement sur la procédure alternative de résolution des litiges du “.fr” et du “.re” par décision technique (ci-après le “Règlement”) en vigueur depuis le 22 juillet 2008, et applicable à l’ensemble des noms de domaine du “.fr” et du “.re” conformément à la Charte de nommage de l’Afnic applicable (ci-après la “Charte”).

Conformément à l’article 14(c) du Règlement, une notification de la demande, valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur le 5 mai 2011. Conformément à l’article 15 du Règlement, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 25 mai 2011. Le Défendeur a fait parvenir sa réponse le 24 mai 2011.

Le 26 mai 2011, le Centre nommait Christiane Féral-Schuhl comme Expert dans le présent litige. L’Expert constate qu’il a été nommé conformément au Règlement. L’Expert a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément à l’article 4 du Règlement.

4. Les faits

Le Requérant est une société proposant des services de vente à distance de vêtements, livres, éléments de décoration et produits alimentaires via le site "www.jahida.com" et ce, depuis le 18 novembre 2003.

Le Requérant dont la dénomination sociale est "Jahida" depuis son immatriculation le 13 novembre 2003 est également titulaire d’une marque en France reprenant le terme "Jahida" :

- marque française semi-figurative JAHIDA déposée le 6 octobre 2003 sous le n° 3 250 129 et enregistrée dans les classes 25, 35 et 42.

Le Requérant est également titulaire du nom de domaine <jahida.com> enregistré le 25 avril 2003.

Le 25 janvier 2011 le Défendeur a enregistré le nom de domaine litigieux <jahida.fr>.

Le nom de domaine litigieux donne accès à deux pages dont le contenu met en cause les services proposées par le Requérant. Le site mentionne entre autre : "Ce site est dédié aux personnes flouées par le site JAHIDA.COM et qui n'arrivent pas à se faire rembourser leurs achats non reçus."

C’est dans ce contexte que le Requérant a engagé une procédure alternative de résolution des litiges devant le Centre afin d’obtenir la transmission du nom de domaine litigieux à son profit.

5. Argumentation des parties

A. Requérant

Le Requérant met en avant ses droits sur le terme "Jahida".

Ces droits résultent :

de la dénomination "Jahida" qui constitue la dénomination sociale de la société depuis son immatriculation le 13 novembre 2003.

de l’enregistrement de la marque française semi-figurative JAHIDA n°3 250 129 déposée le 6 octobre 2003 et enregistrée dans les classes 25, 35 et 42.

de l’enregistrement et l’exploitation du nom de domaine <jahida.com> enregistrée le 25 avril 2003.

Le Requérant insiste sur sa présence continue sur le réseau internet notamment au travers de l’exploitation continue de son site "www.jahida.com" par le biais duquel il exerce son activité de vente à distance.

Le Requérant soutient que l’enregistrement et l’utilisation du nom de domaine litigieux porte atteinte à ses droits.

Le Requérant affirme d’une part que le nom de domaine contesté est identique au sigle sur lequel il a des droits. Le Requérant reproche en effet au nom domaine litigieux la reprise à l’identique de sa dénomination sociale, de son nom de domaine et de l’élément verbal de sa marque française semi-figurative. Le Requérant considère ainsi que l’enregistrement du nom de domaine litigieux, de nature à créer un risque de confusion avec sa marque, est constitutif d’un acte de contrefaçon de marque.

Le Requérant souligne d’autre part que le nom de domaine litigieux est utilisé pour mettre en cause, de manière injustifiée, les services qu’il propose sur son site Web et notamment des retards de livraison dans les commandes. Le Requérant estime, de ce fait, que le site exploité par le Défendeur sous le nom de domaine litigieux porte atteinte à son honneur ou à sa considération, et estime ainsi que le Défendeur se rend coupable d’actes déloyaux dans le commerce.

B. Défendeur

Le Défendeur relève l’absence d’enregistrement pour la marque Jahida d’extension du type ".fr" et estime de ce fait que le nom de domaine <jahida.fr> est distinct de la marque JAHIDA.

Le Défendeur souligne également qu’il n’utilise pas le nom de domaine litigieux pour exercer une activité commerciale similaire ou pouvant être confondue avec celle du Requérant et considère ainsi ne pas commettre d’acte de contrefaçon de la marque JAHIDA.

Le Défendeur estime que le site internet litigieux, ayant un caractère informatif, ne peut être assimilé à de la concurrence déloyale. Le Défendeur soutient également qu’il ne peut lui être reproché d’avoir mis en ligne une information diffamatoire ou injustifiée car selon lui, les faits cités sont prouvés.

Le Défendeur précise enfin, qu’étant d’origine arabe, le terme "Jahida" a une signification pour lui, et réclame ainsi le droit de jouir de l’utilisation de ce terme contenu dans le nom de domaine litigieux.

6. Discussion

L’Expert constate que le Requérant invoque un enregistrement et une utilisation du nom de domaine litigieux par le Défendeur en violation de ses droits et sollicite, en conséquence, le transfert à son profit du nom de domaine litigieux.

L’Expert rappelle que, en application de l’article 20(c) du Règlement, il fait droit à la demande “lorsque l’enregistrement ou l’utilisation du nom de domaine par le Défendeur constitue une atteinte aux droits des tiers ou aux règles de la concurrence telles que définies à l’article 1 du présent Règlement et, si la mesure de réparation demandée est la transmission du nom de domaine, lorsque le requérant a justifié de ses droits sur l’élément objet de ladite atteinte et sous réserve de sa conformité avec la Charte applicable”.

L’Expert souligne qu’en application de l’article 1 du Règlement :

une atteinte aux droits des tiers est constituée “lorsque le nom de domaine est identique ou susceptible d’être confondu avec un nom sur lequel est conféré un droit de propriété intellectuelle français ou communautaire (propriété littéraire et artistique et/ou propriété industrielle), ou est identique au nom patronymique d’une personne, sauf si le Défendeur fait valoir un droit ou un intérêt légitime sur le nom de domaine et agit de bonne foi”;

une atteinte aux règles de la concurrence désigne “une atteinte aux règles de la concurrence et du comportement loyal en matière commerciale en droit français ou communautaire”.

En conséquence, l’Expert s’est attaché à vérifier, au vu des arguments et pièces soumis par les parties, si l’enregistrement ou l’utilisation du nom de domaine litigieux porte atteinte aux droits du Requérant.

(i) Droits du Requérant sur le nom de domaine

Le Requérant apporte la preuve de ses droits sur le terme "Jahida" depuis l’année 2003, soit antérieurement au dépôt du nom de domaine litigieux.

En effet comme en atteste les certificats d’enregistrement fournis, le Requérant est titulaire :

de la marque française semi-figurative JAHIDA n° 3 250 129 déposée le 6 octobre 2003 et enregistrée dans les classes 25, 35 et 42.

du nom de domaine <jahida.com> enregistrée le 25 avril 2003.

Par ailleurs, le Requérant a pour dénomination sociale "jahida" depuis son immatriculation le 13 novembre 2003.

Le Requérant prouve de plus sa présence continue sur le réseau internet au travers de son site internet de vente à distance.

En conséquence, l’Expert estime que le Requérant justifie avoir des droits sur la dénomination "jahida", à titre de marque, de dénomination sociale et de nom de domaine, dénomination reproduite à l’identique dans le nom de domaine litigieux <jahida.fr>

(ii) Enregistrement ou utilisation du nom de domaine litigieux en violation des droits des tiers ou des règles de la concurrence

L’Expert s’attache ici à déterminer si l’enregistrement ou l’utilisation du nom de domaine <jahida.fr> a été effectué en violation des droits du Requérant.

L’Expert constate que le nom de domaine litigieux est identique au terme "jahida" sur laquelle le Requérant à des droits. Il est en effet constant que l’extension ".fr" n’a pas d’incidence pour déterminer si le terme protégé par le droit de propriété intellectuelle est susceptible d’être confondu avec un nom de domaine.

Le nom de domaine litigieux est donc identique à la dénomination sociale, à la marque et au nom de domaine du Requérant par le biais duquel il exerce son activité de vente à distance depuis 2003.

En conséquence l’Expert considère qu’il est incontestable que le nom de domaine litigieux est susceptible d’être confondu avec la marque et le nom de domaine du Requérant sur lesquels ce dernier justifie de droits de propriété intellectuelle français.

L’Expert s’est ensuite attaché à vérifier si le Défendeur fait valoir un droit ou un intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux et a agit de bonne foi.

L’Expert relève que le Défendeur a choisi le nom de domaine litigieux en référence à un différend commercial l’opposant au Requérant.

Le contenu du site litigieux met en effet en cause le sérieux du Requérant dans l’exercice de son activité en parlant "d’arnaque" et se définissant comme étant "dédié aux personnes flouées par le site JAHIDA.COM"

Le Défendeur apporte pour se justifier notamment les plaintes d’utilisateurs de Jahida postées sur un site de consommateurs.

L’Expert rappelle tout d’abord qu’il ne lui appartient pas de juger de la légitimité des critiques portées contre le Requérant concernant l’exercice de son activité commerciale. Ainsi les clients insatisfaits des achats effectués sur le site "www.jahida.com" sont libres de saisir les autorités compétentes pour faire droit à leurs demandes.

L’Expert souligne ensuite que si le Défendeur dispose d’une liberté d’expression sur internet et donc d’un droit de critique d’une marque, cette liberté ne lui donne pas le droit d’enregistrer et d’utiliser à l’identique la marque d’un tiers dans un nom de domaine (voir par exemple The Royal Bank of Scotland Group plc, National Westminster Bank olc A/K/A NatWest Bank v ; Personal and Pedro Lopez, Litige OMPI No. D2003-0166).

Ainsi, en l’espèce le caractère critique du site du Défendeur n’apparaît pas dans le nom de domaine litigieux de sorte qu’en reprenant uniquement la marque du Requérant en tant que nom de domaine, le Défendeur détourne une partie des internautes désirant se rendre sur le site du Requérant (voir par exemple Kirkland & Ellis LLP v. DefaultData.com, American Distribution Systems, Inc., Litige OMPI No. D2004-0136). Ces derniers peuvent en effet légitimement croire que le nom de domaine litigieux renvoie au site internet du Requérant.

Par conséquent, l’Expert considère que l’enregistrement du nom de domaine litigieux par le Défendeur constitue une atteinte aux droits du Requérant.

7. Décision

Conformément aux articles 20(b) et (c) du Règlement, l’Expert ordonne la transmission au profit du Requérant du nom de domaine <jahida.fr>.

Christiane Feral-Schuhl
Expert
Le 9 juin 2011