Créé par un scientifique, M. Maurice Iwu en 1992, le Programme de développement et de conservation des ressources biologiques (BDCP) est une ONG nigériane à but non lucratif. Depuis sa création, le BDCP a collaboré avec des partenaires locaux, nationaux et internationaux afin de mettre en valeur les ressources humaines et biologiques du pays, tout en développant ses ressources traditionnelles – notamment les médecines traditionnelles.
L’ONG a fait œuvre de pionnier dans des politiques générales et des partenariats qui appuient les recherches dans le domaine des médicaments traditionnels, dont le potentiel économique et sanitaire est souvent inexploité. Dans le même temps, le BDCP a soutenu les scientifiques nigérians, tout en faisant mieux connaître les profils socioéconomiques des praticiens nationaux de la médecine traditionnelle.
En outre, le BDCP a créé des coentreprises innovantes entre les praticiens de la médecine traditionnelle et les scientifiques nigérians et des scientifiques internationaux, tels que Lisa Conte – une entrepreneuse qui a fondé Shaman Pharmaceuticals Inc. (Shaman PI), une société de fabrication de médicaments ayant son siège à San Francisco, Californie. Grâce à sa collaboration avec Shaman PI, fondé en 1991, l’ONG a facilité la conclusion d’un accord entre les praticiens de la médecine traditionnelle, les scientifiques nigérians et l’entreprise pharmaceutique.
En partie en raison de ces partenariats, le BDCP a renforcé ses capacités et orienté sûrement l’avenir économique des praticiens traditionnels et des scientifiques nigérians vers le développement. Par ailleurs, l’ONG préserve l’environnement dans le pays au moyen d’un certain nombre de programmes de conservation.
Doté d’une riche palette de ressources humaines et naturelles (le pays comprend plus de 50 groupes culturels et d’immenses zones de forêt tropicale), le Nigéria a une longue histoire dans le domaine de la maîtrise traditionnelle des plantes médicinales. Transmis de génération en génération entre praticiens traditionnels, on estime que ces savoirs ont répondu à 80% des besoins médicaux de la population, soulignant leur rôle important dans l’histoire médicale du pays.
En outre, les praticiens de la médecine traditionnelle (ainsi que leurs savoirs) n’ont pas seulement été déterminants pour les résultats en matière de santé (l’issue d’une maladie chronique ou d’une maladie qui affecte la qualité de la vie) au Nigéria; ils sont également les dépositaires d’une immense somme de savoir-faire médical traditionnel. En effet, l’existence de quelque 4000 médicaments a été découverte au sein de cette communauté. Ces savoirs portent sur des milliers d’espèces végétales, dont les graines de maniguette (Aframomum melegueta; une épice servant traiter les infections microbiennes), Lagenaria breviflora; un fruit utilisé comme analgésique pour les femmes durant l’accouchement) et Garcinia Kola (un arbre fruitier dont on tire des médicaments permettant de traiter les infections de la gorge).
Cependant, pendant des siècles, les guérisseurs traditionnels ont conservé leurs connaissances des plantes médicinales au sein d’une communauté soudée, qui en gardait jalousement le secret. Depuis le début du XXe siècle, les ethnobiologistes – des anthropologues qui étudient les praticiens de la médecine traditionnelle et leurs remèdes à base de plantes – ont montré un intérêt croissant pour la collecte de données (y compris les noms de plantes et les affections qu’elles traitent) de cette communauté fermée.
En outre, depuis le début des années 90, une attention croissante a été portée aux praticiens traditionnels par les prospecteurs biologiques, notamment le BDCP, Shaman PI et d’autres sociétés actives dans la prospection biologique, à savoir la recherche d’échantillons et de composés biologiques chez les espèces végétales afin de commercialiser les remèdes qui en sont tirés.
Par ailleurs, ces scientifiques se sont assuré le concours des praticiens traditionnels afin de découvrir les ingrédients actifs qui constituent la base des traitements traditionnels. En effet, des centaines de produits pharmaceutiques actuellement utilisés dans le monde sont issus de plantes, dont 75% proviennent des forêts tropicales d’Afrique et d’Amérique du Sud et ont été découvertes par les praticiens de la médecine traditionnelle pour l’élaboration de leurs remèdes.
Dans cette optique, le BDCP a collaboré avec divers partenaires, dont le Gouvernement nigérian et les sociétés pharmaceutiques, afin de mieux faire connaître ces praticiens. L’ONG a en outre créé une base de données de remèdes traditionnels dans le but de fabriquer et de commercialiser d’éventuels nouveaux traitements tout en partageant équitablement les avantages qui en découleraient avec les parties prenantes.
Avant de s’atteler à la tâche ardue de prélever des données sur les savoirs traditionnels médicaux au Nigéria, le BDCP, Shaman PI et divers organes du Gouvernement nigérian (les partenaires) ont établi des protocoles clairs en vue de travailler avec les praticiens traditionnels nationaux.
Étant donné que, historiquement, les guérisseurs traditionnels ont travaillé dans un isolement relatif par rapport aux structures gouvernementales et économiques, les partenaires ont veillé, dès le départ, à ce que la relation avec ces guérisseurs repose sur la transparence afin de gagner leur confiance. Les partenaires se sont également assuré que la capacité d’autosuffisance des praticiens traditionnels soit renforcée et qu’un mécanisme de partage équitable des avantages découlant de la collaboration soit mis en place.
En s’assurant la collaboration des guérisseurs, une des premières démarches consistait à renforcer leur capacité de représenter leurs propres intérêts par la création de coopératives. À cette fin, il a fallu compter sur le soutien inestimable des partenaires et de la branche africaine des International Cooperative Biodiversity Groups (Africa ICBG), une organisation qui promeut la découverte de médicaments, la conservation de la biodiversité et une croissance économique durable.
Grâce à la création de ces coopératives (notamment le syndicat nigérian des phytothérapeutes), les praticiens de la médecine traditionnelle ont pu centraliser la gestion des adhésions, installer des codes et des normes de conduite (qui fixent, par exemple, des qualifications minimales d’admission pour des praticiens) et leur donner une plus grande visibilité professionnelle à leurs membres. De plus, en se constituant en coopératives, les praticiens de la médecine traditionnelle ont pu combiner leurs intérêts et renforcer leur position pour faire pression sur les parties prenantes (y compris le Gouvernement nigérian).
Après avoir posé les jalons des recherches de prospection biologique au Nigéria, les partenaires ont lancé le stade scientifique du processus de recherche-développement (R-D), qui établissait une taxonomie ou une classification des diverses espèces végétales utilisées par les praticiens de la médecine traditionnelle dans le pays. Des chercheurs de Shaman PI et de BDCP ont contribué à une partie de ce processus en réalisant une série d’entrevues avec des praticiens traditionnels, qui ont été priés, par exemple, de classer les plantes utilisées dans leurs remèdes par ordre d’importance ou de valeur.
Bien que cette approche ne soit pas infaillible (parce qu’elle ne permettait pas nécessairement de prévoir une commercialisation potentielle ou des paramètres d’efficacité), elle a permis aux scientifiques de concentrer leur R-D sur les plantes qui démontraient déjà, par le passé, des promesses en matière de qualités thérapeutiques. Ces entrevues ont fourni une rétroaction aux guérisseurs dans leur pratique curative car elles leur ont permis de bénéficier de nouvelles informations sur les plantes sur la base de la littérature scientifique publiée par les partenaires.
Après avoir prélevé et sélectionné divers spécimens végétaux et les avoir enregistré dans une vaste base de données ou pharmacopée, le processus est passé du terrain au laboratoire, où les propriétés médicinales apparentes des plantes ont fait l’objet de recherches. Les pistes les plus prometteuses ont ensuite été soumises au fractionnement – un processus qui consiste à séparer, par exemple, un solide en ses composants – au centre de R-D de Shaman PI aux États-Unis d’Amérique. Par la suite, des techniques d’analyse chimique moderne ont permis d’examiner les structures de ces plantes afin de révéler leurs composés actifs – la partie d’un médicament qui cause des effets biologiques chez un sujet.
La collaboration de BDCP avec Shaman PI était une fusion fructueuse d’intérêts et d’objectifs pharmaceutiques internationaux, d’une part, et des aspirations scientifiques locales et du savoir-faire des praticiens de la médecine traditionnelle, d’autre part. En raison de l’approche pionnière et ethnographique de la compagnie pharmaceutique en matière de recherche sur les médicaments – c’est la connaissance des guérisseurs traditionnels qui guide les recherches plutôt que les essais en laboratoire in situ – Shaman PI a pu travailler en étroite collaboration avec les communautés traditionnelles et créer un modèle d’entreprise mutuel avec ses partenaires dans le monde entier, notamment le BDCP.
En plus de ces futures recettes, Shaman PI versait déjà (au début de la recherche) des paiements à court terme ou des “taxes d’accès” aux praticiens traditionnels, aux guides locaux, aux collecteurs d’échantillons végétaux ainsi qu’aux autres auxiliaires. Ces paiements ont été facilités par une organisation indépendante créée par le BDCP et appelée “Fund for Integrated Rural Development and Traditional Medicine” (le Fonds).
Le Fonds, qui a été lancé grâce à un don de 40 000 dollars É.-U. provenant de Healing Forest Conservancy, était géré par un conseil d’administration indépendant constitué de fonctionnaires nationaux, des membres respectés de la communauté et de représentants des coopératives de praticiens de la médecine traditionnelle. En outre, Healing Forest Conservancy a pu prendre part à quatre missions ethnobotaniques sur le terrain avec le BDCP et des praticiens traditionnels. Ces missions n’ont été lancées qu’après que les praticiens ont donné leur consentement préalable en connaissance de cause et que des accords de compensation confidentiels, privés et équitables ont été conclus.
Ces accords reposaient partiellement sur la Convention sur la diversité biologique (CDB), un traité mondial parrainé par les Nations Unies et portant sur des aspects de la biodiversité et le partage équitable des avantages.
Par ailleurs, une partie du budget réservé par Shaman PI à la R-D était consacré à l’amélioration d’installations locales au Nigéria. Entre 1990 et 1996, la compagnie pharmaceutique a donné – via le Fonds – 200 000 dollars É.-U. au BDCP et à ses partenaires, y compris les praticiens de la médecine traditionnelle. Grâce à cet investissement, plusieurs praticiens traditionnels du Nigéria ont pu mettre au point et conditionner leurs propres remèdes, qui ont été vendus localement.
Healing Forest Conservancy a également soutenu les scientifiques nigérians travaillant pour l’ONG en leur accordant des bourses pour leurs recherches botaniques dans plusieurs établissements, notamment Shaman PI et le Smithsonian Institute, un des plus grands musées et instituts de recherche du monde, dont le siège se trouve à Washington DC (États-Unis d’Amérique).
Hormis sa collaboration avec Shaman PI, le BDCP s’est associé avec plusieurs institutions partenaires du monde entier, qui ont aidé l’ONG à évaluer des échantillons biologiques et à effectuer des recherches sur ces derniers. Certains de ces partenaires sont des universités de la République du Cameroun (Cameroun), de la République d’Afrique du Sud, du Royaume-Uni et des États-Unis d’Amérique.
Par ailleurs, l’ONG a mis en place ses propres centres de R-D, qui peuvent mener à bien plusieurs processus scientifiques dont l’analyse chimique et la normalisation de plantes et la certification et l’authentification organique d’espèces végétales cultivées. Grâce au soutien logistique d’Africa ICBG et à l’aide des coopératives de praticiens traditionnels, le BDCP a établi des essais pour cultiver diverses espèces végétales, telles que la fève de Calabar (Physostigma venenosum – une plante potentiellement toxique dont l’activité biologique a été recensée à la suite d’entrevues avec des guérisseurs).
Sur la base de la taxonomie obtenue, des pépinières, des jardins ainsi qu’un herbier de référence (une collection d’espèces végétales protégées) ont été mis en place au Nigéria sous la direction du BDCP.
Finalement, l’ONG a renforcé sa capacité d’accomplir un certain nombre de fonctions de R-D, dont la collecte de plantes; le fractionnement; l’étude ethnobiologique et l’évaluation de la valeur économique; la préservation de l’environnement; la formation ethnobotanique à l’intention des scientifiques; et le renforcement des capacités locales des praticiens de la médecine traditionnelle par la mise à disposition de fonds et d’équipement agricole.
Depuis le début, le BDCP et Shaman PI connaissaient parfaitement l’importance du système de la propriété intellectuelle en tant que moyen de protéger leurs actifs de propriété intellectuelle, lesquels peuvent être mis à profit pour attirer les investisseurs et ouvrir de nouvelles possibilités de développement. À cette fin, en 1989, M. Iwu et Shaman PI ont déposé une demande de brevet pour la dioscoretine et son utilisation en tant qu’agent hypoglycémique (pour le traitement du diabète) auprès de l’Office des brevets et des marques des États-Unis d’Amérique (USPTO). Un an après, ils ont demandé la protection internationale en déposant une demande internationale de brevet en vertu du système du Traité de coopération en matière de brevets (PCT) administré par l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI).
De plus, M. Iwu et d’autres partenaires ont déposé des demandes de brevets notamment pour des composés antifongiques et antiparasitaires (1999) et des alcaloïdes de picralima nitida pour les maladies dues à des protozoaires (1991) auprès de l’USPTO et en utilisant le système du PCT.
Malgré ses actifs de propriété intellectuelle attrayants, Shaman PI a mis fin à sa collaboration avec le BDCP et a été obligé de mettre la clé sous la porte en raison, partiellement, d’un climat économique mondial défavorable à la fin des années 2000. De plus, (en 2011) la compagnie pharmaceutique n’est pas parvenue à mettre au point ses médicaments les plus prometteurs car elle n’a pas pu franchir le dernier obstacle (les essais en phase III) imposé aux fabricants de médicaments par la Food and Drug Administration (FDA), un organisme du Gouvernement américain chargé des règlements et des normes en matière de santé publique.
La fondatrice de Shaman PI, Mme Conte, a toutefois réussi à collecter 650 000 dollars É.-U. qu’elle a utilisés pour acheter les actifs de propriété intellectuelle de la compagnie – notamment ceux qui étaient codétenus avec le BDCP. Avec ces actifs, la scientifique entrepreneur a pu conclure de nouveaux accords de licence avec d’autres entreprises, trouver de nouveaux investisseurs et collecter ainsi 85 millions de dollars É.-U. qu’elle a investis pour fonder Napo Parmaceuticals Inc. (Napo), un fabricant de médicaments dont le siège se trouve à San Francisco, Californie (États-Unis d’Amérique).
En 2012, Mme Conte détenait 6% de Napo, une société qui a conclu des accords de distribution et de licence avec Direct Relief International (une ONG médicale ayant son siège en Californie) et Glenmark Pharmaceuticals (qui ont distribué le médicament de Napo Crofelemer en Inde).
La compagnie a également passé des accords de licence avec Global, LL (une société d’investissement californienne intéressée à la distribution du Crofelemer sur les marchés américain, japonais et de l’Union européenne – sous réserve de l’approbation de la FDA) et AsiaPharm Group Ltd, en République populaire de Chine. À compter de 2012, le Crofelemer (destiné au traitement de la diarrhée chronique chez les patients atteints du VIH/SIDA) devait disposer d’un marché mondial de plus de 300 millions de dollars É.-U.
Entre-temps, le BDCP a eu recours aux compétences techniques et au capital de connaissances obtenus en partie grâce à sa collaboration avec Shaman PI pour lancer deux nouvelles entreprises dérivées. Axxon Biopharm Inc. (Axxon) est une compagnie pharmaceutique et une filiale du BDCP ayant son siège dans le Maryland (États-Unis d’Amérique). La compagnie fabrique une série de produits pharmaceutiques naturels notamment sous la marque Ethnobotanica.
Une autre filiale du BDCP, Intercedd Health Products (IHP), est une société dont le siège se trouve au Nigéria. Elle produit et commercialise des médicaments mis au point par l’International Center for Ethnomedicine and Drug Development (InterCEDD), un centre de R-D fondé par le BDCP et dont le siège se trouve à Nsukka (Nigéria).
Le BDCP et ses filiales sont conscients de la nécessité d’améliorer la visibilité de leur marque afin d’attirer des investisseurs et des clients et d’obtenir un financement pour leurs projets. Hormis Ethnobotanica, Axxon a produit une gamme attrayante de traitements – sur la base du programme d’élaboration de médicaments de l’ONG – tel que Streptol (un tonique naturel pour le traitement du mal de gorge et les refroidissements), Buchu Blend (qui favorise le maintien en santé du système urinaire) et DM Blend (qui contribue à maintenir un taux de glycémie sain).
Ces médicaments ont été commercialisés au Nigéria par l’intermédiaire de compagnies et de marques pharmaceutiques locales, dont IHP. Avec une solide gamme de produits, notamment Erovit (pour les maladies liées à l’âge), Physogen (pour le traitement du diabète) et Hepavital (pour les affections du foie), IHP commercialise des médicaments produits par InterCEDD.
Afin de promouvoir et de commercialiser ces produits tout en renforçant sa réputation de qualité, le BDCP a fait paraître des publications (notamment des livres et des articles de journaux faisant autorité), organisé et assisté à des conférences et lancé des manifestations et des expositions destinées à renforcer la visibilité des marques. En effet, l’ONG est à l’origine de plusieurs conférences en Afrique qui mettent en valeur les avantages de la médecine traditionnelle et abordent des questions et des thèmes, tels que l’ethnomédecine, la prospection biologique et la conservation de la biodiversité.
Dans le cadre de sa collaboration avec d’autres organisations de prospection biologique en Afrique occidentale, le BDCP a lancé en 2000 une stratégie régionale – intitulée “Promotion du rôle de la médecine traditionnelle dans les systèmes de santé” – afin de mieux faire connaître au public les plantes médicinales et les praticiens de la médecine traditionnelle. L’année suivante, l’organisation figurait au nombre de celles qui avaient fait pression sur les chefs de gouvernement ayant déclaré l’ouverture de la Décennie de la médecine traditionnelle africaine (2001-2010). Un point essentiel du plan d’action adopté dans le cadre de la déclaration portait sur le fait que les États et les organisations membres, – telles que le BDCP, devaient mener des campagnes de sensibilisation et de popularisation des médecines traditionnelles.
Le lancement de la Journée de la médecine traditionnelle africaine (le 31 août) s’inscrivait dans le cadre de cette déclaration. Cette journée a été lancée à l’initiative de parties prenantes africaines afin de promouvoir le rôle de la médecine traditionnelle dans les systèmes de santé et de sensibiliser le public à l’importance de son rôle pour les résultats en matière de santé sur le continent.
Durant la Décennie de la médecine traditionnelle africaine Afrique, 46 pays du continent – en partenariat avec des organisations et des entreprises – ont formulé des politiques et des cadres nationaux en matière de médecine traditionnelle en ce qui concerne l’efficacité, la sécurité et la qualité des médicaments traditionnels et les pratiques des guérisseurs traditionnels. Pour sa part, le BDCP a contribué à la mise en œuvre de la politique nigériane en matière de médecine traditionnelle, un cadre de politique générale du Ministère de la santé.
Par ailleurs, en collaboration avec de nombreuses organisations, l’Agence nigériane de développement de la médecine naturelle, une entité paraétatique chargée d’élaborer des politiques relatives aux médicaments naturels, l’ONG a organisé une exposition annuelle de deux jours intitulée “HerbFest”, destinée à promouvoir les entreprises biotechnologiques et des possibilités d’investissement au moyen de séminaires et d’expositions de produits dérivés des plantes médicinales et d’autres types de plantes.
Le BDCP a fait appel à plusieurs organismes publics et privés pour financer ses recherches. L’organisation a bénéficié de fonds fournis par l’intermédiaire d’Africa ICBG, qui provenaient de la United States Agency for International Development. Le BDCP compte d’autres partenaires, tels que la National Science Foundation, l’United States Department of Agriculture et le Walter Reed Army Institute of Research (WRAIR).
L’Afrique centrale et occidentale, et notamment le Nigéria, possède une des plus vastes forêts équatoriales du continent. Comptant de nombreuses espèces animales et végétales, ces forêts ont été une source constante d’alimentation et d’inspiration pour les habitants de la région en ce qui concerne les savoirs traditionnels. Toutefois, depuis 1850, les estimations ont montré que la surface des forêts tropicales d’Afrique avait diminué d’au moins 20%. Alors que le taux de déclin des forêts à l’échelle mondiale est d’environ 0,6%, au Nigéria, il atteignait 5%.
Si l’on ajoute des taux de pauvreté relativement élevés (un PIB de 2300 dollars É.-U. par habitant) dans un pays où 75% de la population habite dans des zones rurales et dépend fortement des produits forestiers (chiffres du Département d’État américain pour 2009), les motifs d’intervention au Nigéria sont devenus évidents.
Pour protéger l’environnement à l’échelle nationale, le programme pour la conservation de la biodiversité du BDCP (le programme B&C) a élaboré des mécanismes afin de recueillir et de publier des données sur des espèces végétales nationales en vue d’éclairer et d’influencer les décisions stratégiques. Ces données ont permis de prendre des décisions (au niveau des gouvernements locaux et centraux) sur les espèces qu’il fallait cultiver ou protéger et d’élaborer des stratégies de réglementation qui protègent l’environnement et contribuent au développement économique local.
Le programme B&C a collaboré avec le Centre d’étude de la forêt tropicale du Smithsonian Institute et lancé des projets de conservation à long terme, tels que des projets communautaires de plantations d’arbres, des parcelles de contrôle de la biodiversité et la création de zones tampons et de réserves d’extraction. De plus, l’initiative a formé des experts en taxonomie et des défenseurs de l’environnement au Nigéria.
Le BDCP a collaboré avec les habitants du village d’Umukabia (dont certains ont été engagés par la suite), dans l’État d’Imo, afin de les aider à transformer la forêt de teck locale une zone abritant des espèces multiples (avec 41 différentes espèces végétales) et contenant des parcelles de contrôle et de parcelles de préservation. D’autres parcelles ont été créées, notamment, au Nigéria, celles de la Akampa Deep Forest Farm et de la forêt d’Oban-Boshi-Okwangwo ainsi que, au Cameroun, dans le Korup National Park et le Pygeum Project (où est cultivée la plante médicinale en voie de disparition prunus africana, un arbre à feuillage persistant).
L’organisation a aidé les communautés rurales à cultiver durablement des arbres afin de se procurer de la nourriture, du combustible, du bois et de s’en servir comme barrières contre l’érosion et la dégradation du sol, comme, par exemple, un projet de restauration (en 2011) pour les mangroves indigènes et les palmiers Nyapa dans l’estuaire de la rivière Cross. Selon M. Iwu, ce projet de restauration représentait la première restauration complète [au Nigéria] d’une forêt dégradée au moyen de méthodes écologiques modernes et scientifiques”.
Alors que la population mondiale avoisinait 7 milliards en 2012, au moins 4 milliards de personnes, selon les estimations, avaient recours aux remèdes médicinaux traditionnels pour répondre à leurs besoins primaires de soins médicaux (selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) – institution spécialisée de l’ONU pour la santé). L’OMS a estimé que plus de 33% des habitants des pays en développement n’avaient pas d’accès régulier aux médicaments de base et, dans les pays les plus pauvres, plus de 50% de la population n’avait pas accès aux principaux prestataires de services de santé (en 2010).
Étant donné que la plupart de ces personnes ne pouvaient pas se permettre des médicaments produits dans les pays développés, en 2000, le Comité régional de l’OMS pour l’Afrique a reconnu le rôle important que les médecines traditionnelles ont joué et pourraient jouer en ce qui concerne les résultats en matière de santé soins de santé primaires dans ces régions. Les membres de ce comité ont vivement recommandé de renforcer les politiques et les stratégies afin de rationaliser la production de médicaments traditionnels dans les pays en développement.
Par leur alliance, le BDCP et Shaman IP se situaient à l’avant-garde des collaborations entre secteur privé, secteur public et ONG en matière de recherche sur les maladies tropicales (notamment la malaria et le virus Ebola) et leurs remèdes. Étant donné que plus de 90% des victimes de la malaria vivent en Afrique subsaharienne, le Global Health Project de l’ONG – géré avec l’aide d’Africa ICBG – a permis d’accorder la priorité à la recherche sur les phytomédicaments (ou médicaments issus de plantes) contre les maladies tropicales. L’ONG était en outre à la pointe de l’élaboration de médicaments traditionnels de premier ordre qui sont produits selon les plus hautes normes en matière d’éthique, d’efficacité et de sécurité.
En collaboration avec le Comité nigérian de la médecine traditionnelle, le BDCP a proposé des stratégies de contrôle et de normalisation destinées aux praticiens de la médecine traditionnelle et à leurs médicaments, et notamment la création d’un code d’éthique à l’intention des praticiens. En vertu de ce code, les praticiens traditionnels seront censés, par exemple, tenir à jour des données sur les traitements qu’ils administrent et suivre des procédures bien établies au même titre que pour la pratique établie dans médecine occidentale ou orthodoxe. À cet effet, l’ONG a aidé à la mise en place au Nigéria d’un projet de pharmacovigilance en matière de plantes médicinales qui permettrait de consigner les effets néfastes des plantes médicinales. Par ce moyen et par d’autres, le BDCP entend garantir aussi bien la compétence des praticiens de la médecine traditionnelle que la sécurité des patients.
À la mesure de ces stratégies de développement, la capacité de partage des avantages de l’organisation et le mécanisme de renforcement des capacités s’est également assuré la participation pleine et active de partenaires locaux fondée sur la transparence, la confiance, la durabilité et le partage équitable du savoir et des avantages. En collaborant avec des associations de villes, des chefs de village et des guildes professionnelles de guérisseurs et de travailleurs, l’ONG et ses partenaires ont pu diffuser les pratiques recommandées et le savoir-faire. Ce processus a encouragé les praticiens de la médecine traditionnelle à recenser leurs contributions au processus de découverte au moyen de l’étiquetage de produits ou d’idées.
Ce faisant, les praticiens traditionnels ont pu tenir à jour leurs données, élaborer leurs propres produits (en les étiquetant et en les attribuant à un guérisseur donné) et renforcer leurs compétences. Le résultat visé était d’améliorer la sécurité et la diversité des produits ainsi que la responsabilité au sein de la communauté des praticiens de la médecine traditionnelle, ce qui présente l’avantage supplémentaire d’accroître les revenus.
Le BDCP a fait figure de pionnier en matière de recherche ethnobotanique et de recherche relative à la prospection biologique en Afrique. En raison de ses compétences et de son influence croissante dans ce secteur, l’ONG a fourni des services de conseil pour diverses organisations, y compris l’Union africaine, le Ministère de l’environnement et l’Agence nationale chargée de l’administration du contrôle des produits alimentaires et pharmaceutiques au Nigéria.
En effet, le BDCP a été désigné, dans le cadre du Programme des Nations Unies pour le développement, consultant principal au développement du premier plan d’action nigérian pour la biodiversité s’explique en partie par les connaissances en matière de préservation résultant de sa collaboration avec Shaman PI, le Smithsonian Institute et Africa ICBG.
L’organisation a élaboré plusieurs bases de données hors ligne de plantes médicinales africaines et aidé à créer un inventaire numérique équivalent : le système d’information informatisé des plantes médicinales et aromatiques africaines. En travaillant avec InterCEDD, par exemple, le BDCP a pu déterminer l’efficacité contre les maladies tropicales de plus de 500 plantes. En raison du coût élevé de l’élaboration de ces médicaments, à partir de 2012, l’ONG recherchait des partenaires dans l’industrie afin de faire passer aux médicaments les diverses étapes d’élaboration des médicaments fixées par divers organismes de santé dont la FDA aux États-Unis d’Amérique.
Étant donné que le Nigéria est partie à la CDB, les redevances provenant de la commercialisation de ces produits seront partagées équitablement avec les praticiens de la médecine traditionnelle et les communautés locales.
En collaboration avec Africa ICBG, le Smithsonian Institute et le WRAIR, l’ONG a produit plusieurs composés chimiques pouvant traiter les maladies tropicales telles que la malaria, la maladie du sommeil (trypanosomiase) et la leishmaniose (une maladie des organes potentiellement mortelle causée par la piqûre du phlébotome).
Les entreprises dérivées de l’ONG, Axxon et IHP, ainsi que d’autres organisations affiliées (notamment deux instituts de recherche et une société de négociation de produits de base), ont élaboré une gamme attrayante de médicaments organiques issus de produits prélevés dans leur milieu d’origine. Quelques produits ont été commercialisés au niveau local par des entreprises telles que Neimeth Pharmaceutical International Plc., dont le siège se trouve à Lagos (Nigéria).
En 2012, le BDCP a formé plusieurs scientifiques nigérians (dans le domaine de la biodiversité, de la biotechnologie et de l’ethnobiologie), influencé positivement la législation de la propriété intellectuelle en faveur des praticiens de la médecine traditionnelle sur le continent, aidé à créer des cours universitaires de médecine traditionnelle dans la région et s’est développé de manière à inclure plusieurs programmes et offices en Afrique, notamment le Cameroun et les États-Unis d’Amérique.
Les praticiens de la médecine traditionnelle ont été mis sur la voie du développement tandis que les espèces végétales et l’environnement fragiles dont ils dépendent ont été préservés pour les futures générations de guérisseurs et de chercheurs.
Le BDCP a jeté des ponts entre les praticiens de la médecine traditionnelle en Afrique occidentale et les compagnies pharmaceutiques orthodoxes des pays en développement et des pays développés. L’ONG a réussi à améliorer sa visibilité et celle des praticiens traditionnels et des scientifiques nigérians grâce à des partenariats bien planifiés avec l’industrie, le gouvernement et les communautés rurales traditionnelles.
En faisant un usage stratégique de ses actifs de propriété intellectuelle, le BDCP a modernisé ses processus de production tout en préservant les coutumes nigérianes en matière de plantes médicinales ainsi que l’environnement au niveau national. À cette occasion, les compagnies de prospection biologique redécouvrent des sources historiquement cachées concernant de nouveaux médicaments abordables qu’il est nécessaire d’exploiter pour les millions de personnes exposées aux maladies tropicales et autres.
Cette étude de cas se fonde sur des informations provenant de: