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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE L’EXPERT

Eli Lilly and Company contre Nostradamus

Litige n° DFR2010-0035

1. Les parties

Le Requérant est Eli Lilly and Company, Indianapolis, Indiana, Etats-Unis d’Amérique, représenté par Baker & McKenzie, France.

Le Défendeur est Nostradamus, La Seyne-sur-Mer, France.

2. Nom de domaine et prestataire Internet

Le litige concerne le nom de domaine <cialis.fr> enregistré le 12 février 2003.

Le prestataire Internet est la société Mailclub.

3. Rappel de la procédure

Une demande déposée par la société Eli Lilly and Company auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) a été reçue le 21 octobre 2010.

Le 21 octobre 2010, le Centre a adressé à l’Association Française pour le Nommage Internet en Coopération (ci-après l’“Afnic”) une demande aux fins de vérification des éléments du litige et de gel des opérations.

Le 22 octobre 2010, l’Afnic a confirmé l’ensemble des données du litige, ainsi qu’aucune procédure administrative applicable au nom de domaine objet du litige n’est pendante.

Le Centre a vérifié que la demande répond bien au Règlement sur la procédure alternative de résolution des litiges du “.fr” et du “.re” par décision technique (ci-après le “Règlement”) en vigueur depuis le 22 juillet 2008, et applicable à l’ensemble des noms de domaine du “.fr” et du “.re” conformément à la Charte de nommage de l’Afnic applicable (ci-après la “Charte”).

Conformément à l’article 14(c) du Règlement, une notification de la demande, valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur le 28 octobre 2010. Conformément à l’article 15 du Règlement, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 17 novembre 2010. Le défendeur n’a pas fait parvenir de réponse.

Le 26 novembre 2010, le Centre nommait Marie-Emmanuelle Haas comme Expert dans le présent litige. L’Expert constate qu’il a été nommé conformément au Règlement. L’Expert a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément à l’article 4 du Règlement.

4. Les faits

Selon le Requérant Eli Lilly and Company est une société américaine et plus précisément un groupe pharmaceutique de premier plan, dixième laboratoire pharmaceutique du monde qui compte d’importants centres de recherche et de développement dans 9 pays et qui effectue des études cliniques dans plus de 50 pays. Il emploie plus de 40,000 personnes dans le monde, est implanté dans 80 pays et commercialise ses médicaments dans 143 pays.

Le Requérant est présent en France depuis 1962. Il vend au niveau mondial sous la marque CIALIS un médicament par voie orale délivré uniquement sur ordonnance qui vise à traiter les troubles de l’érection.

Il est titulaire de plus de 150 enregistrements de marques CIALIS dans plus de 100 pays et notamment pour la France d’une marque communautaire CIALIS n° 001223916 déposée le 24 juin 1999 et d’une marque française CIALIS n° 99824332 déposée le 22 novembre 1999, ces marques étant protégées en classe 5. Le Requérant est également titulaire du nom de domaine <cialis.com> créé le 10 août 1999 dont l’usage est allégué à compter de juin 2001.

Le nom de domaine <cialis.fr> a été créé le 12 février 2003 et donne accès à un site en français dont la page d’accueil propose ce nom de domaine à la vente, le site étant sinon consacré au tourisme en Guyane.

C’est dans ces circonstances que le Requérant a saisi le Centre afin d’obtenir le transfert, à son profit, du nom de domaine <cialis.fr>.

5. Argumentation des parties

A. Requérant

L’enregistrement et l’utilisation du nom de domaine <cialis.fr> constituent une atteinte aux droits sur les marques CIALIS protégées notamment en France, ainsi qu’une violation des règles de la concurrence et du comportement loyal en matière commerciale, sur le fondement de l’article 1 du Règlement.

Le nom de domaine <cialis.com> reproduit à l’identique les marques française et communautaire CIALIS qui bénéficient d’une notoriété en France et sur le territoire de l’Union Européenne. La protection est donc revendiquée sur le fondement de l’article L. 713-5 du Code de la Propriété Intellectuelle pour la marque française et au titre de l’article 9 du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil du 26 février 2009 pour la marque communautaire, au titre de la protection élargie de la marque de renommée.

Le Requérant précise que sa décision de commercialiser des médicaments sous la marque CIALIS a été rendue publique en juillet 2001 et qu’en Europe l’autorisation de mise sur le marché a été délivrée le 12 novembre 2002, les médicaments CIALIS étant commercialisés depuis le tout début 2003 au sein de l’Union Européenne, ce lancement ayant été largement relayé par la presse française et internationale, notamment en janvier et février 2003. Or, c’est le 12 février 2003 que le nom de domaine <cialis.fr> a été enregistré. Des investissements importants ont été consacrés pour la commercialisation du produit Cialis dans le monde, produit directement concurrent du Viagra.

Le nom de domaine <cialis.fr> donne accès à un site web dont la première page indique que le nom de domaine <cialis.fr> est “à vendre”, tandis que les autres pages concernent des informations touristiques sur les hôtels et restaurants de Guyane, sans rapport avec la marque CIALIS.

En procédant ainsi, le Défendeur tente manifestement de tirer un profit indu des marques CIALIS alors qu’il ne bénéficie d’aucun droit ou intérêt légitime sur ce nom.

Il tente également de profiter de la réputation des marques CIALIS pour diriger les internautes vers son propre site Internet, sans rapport avec les produits de la marque CIALIS, ce qui caractérise un comportement parasitaire.

Cette situation et cet enregistrement injustifié privent le Requérant de la possibilité de disposer de ce nom de domaine, alors que la France constitue un marché important.

Sur la question de la violation des règles de la concurrence et du comportement loyal en matière commerciale, le Requérant relève que le nom de domaine a été enregistré dès l’annonce publique de la commercialisation mondiale du nouveau médicament Cialis et que la mise en vente de ce nom de domaine atteste de la volonté de son titulaire de spéculer sur cet enregistrement, alors qu’il ne dispose d’aucun droit ou intérêt légitime sur la dénomination Cialis, ce qui démontre son absence de toute bonne foi. Le choix pour l’enregistrement du nom de domaine <cialis.fr> ne peut être le fait du hasard, d’autant plus que les marques CIALIS sont parfaitement distinctives (affaire Lilly ICOS v. Jay Kim, Litige OMPI No. D2004-0891).

Lors de la création du nom de domaine <cialis.fr>, le Requérant avait déjà enregistré et exploitait depuis plusieurs années le nom de domaine <cialis.com>, ce que le Défendeur ne pouvait bien entendu pas ignorer.

B. Défendeur

Le Défendeur n’a pas répondu à la demande déposée par la société Eli Lilly and Company.

6. Discussion

L’Expert fait droit à la demande “lorsque l’enregistrement ou l’utilisation du nom de domaine par le défendeur constitue une atteinte aux droits des tiers ou aux règles de la concurrence telles que définies à l’article 1 du présent règlement et, si la mesure de réparation demandée est la transmission du nom de domaine, lorsque le requérant a justifié de ses droits sur l’élément objet de ladite atteinte et sous réserve de sa conformité avec la Charte applicable” (Règlement, article 20 c).

Conformément à l’article 1 du Règlement, on entend par :

- atteinte aux droits des tiers “une atteinte aux droits des tiers, en particulier, lorsque le nom de domaine est identique ou susceptible d’être confondu avec un nom sur lequel est conféré un droit de propriété intellectuelle français ou communautaire (propriété littéraire et artistique et/ou propriété industrielle), ou est identique au nom patronymique d’une personne, sauf si le Défendeur fait valoir un droit ou un intérêt légitime sur le nom de domaine et agit de bonne foi”.

- atteinte aux règles de la concurrence, “une atteinte aux règles de la concurrence et du comportement loyal en matière commerciale en droit français ou communautaire”.

(i) Atteinte aux droits de propriété intellectuelle du Requérant

Il appartient à l’Expert d’identifier si l’enregistrement ou l’utilisation du nom de domaine par le Défendeur portent atteinte aux droits de propriété intellectuelle du Requérant au sens de l’article 1 du Règlement, c’est-à-dire s’il existe un risque de confusion entre le nom de domaine <cialis.fr> et les marques CIALIS.

Le Requérant, la société américaine Eli Lilly and Company, détient divers droits de marque sur le terme CIALIS, dont certains en vigueur en France, au titre de la marque française CIALIS No. 99 824 332 et de la marque communautaire No. 00 123 916, enregistrées pour des produits de la classe 5.

Le nom de domaine <cialis.fr> est identique au nom sur lequel le Requérant a de droits de propriété intellectuelle, à savoir des droits de marque.

La marque CIALIS du Requérant est reproduite dans son intégralité dans le nom de domaine litigieux.

Le nom de domaine en cause ne paraît pas avoir été ou être l’objet d’une exploitation par le Défendeur pour promouvoir des produits identiques ou similaires à ceux du Requérant.

Le Requérant se réfère aux articles L.713-5 du Code de la Propriété Intellectuelle et 9 du Règlement CE n° 207/2009, arguant de la renommée de sa marque française et communautaire CIALIS pour élargir la protection revendiquée aux produits et services distincts de ceux visés par ses marques.

Selon la jurisprudence développée par les instances communautaires et françaises, une marque de renommée est une marque connue d’une partie significative du public concerné par les produits et services qu’elle désigne.

Selon les critères dégagés par les juridictions françaises, “pour l’appréciation de la renommée, (…) doivent être prises en compte notamment la part de marché occupée par la marque, l’intensité de son exploitation, son étendue géographique, la durée de son usage, l’importance des investissements auxquels elle donne lieu” (Cour d’appel de Paris, 18 mai 2001, PIBD 2001, III, p.576).

Les pièces communiquées par le Requérant pour attester de la renommée revendiquée sont des articles de la presse anglaise de 2001 qui concernent la phase de pré-commercialisation du médicament CIALIS par le Requérant en Europe, à savoir notamment les phases d’obtention d’AMM et de promotion de l’introduction sur le marché de ce médicament. L’article du 27 mars 2003 a été publié dans la presse américaine et annonce la concurrence sur le marché en Europe et notamment en France entre les produits Cialis et Viagra. Les informations financières communiquées sont exprimées en dollars et visent soit une exploitation mondiale du médicament Cialis, sans une exploitation en dehors des Etats-Unis, ces éléments n’étant pas suffisamment précis pour évaluer l’importance de l’exploitation de la marque sur le territoire concerné, ni de surcroît d’évaluer la part de marché que représente la vente du médicament Cialis sur ce territoire.

Sur la seule base des éléments transmis par le Requérant l’Expert ne peut donc valablement affirmer que la marque CIALIS jouit d’une renommée en France ou dans l’Union Européenne.

De plus, dans l’hypothèse où cette renommée venait à être établie, il semble qu’elle serait alors acquise postérieurement à la date de réservation du nom de domaine litigieux, suite à la mise sur le marché du produit de marque CIALIS, sauf à apporter d’autres moyens de preuve.

La reprise à l’identique de la marque dans le nom de domaine est incontestable. En l’absence de réponse, le Défendeur n’a apporté aucun élément de nature à justifier d’un quelconque droit ou intérêt légitime et de sa bonne foi, comme le Règlement le lui permet.

En tout état de cause, la concomitance entre l’annonce de la mise sur le marché du produit de marque CIALIS concurrent du Viagra et l’enregistrement du nom de domaine <cialis.fr>, le caractère arbitraire du terme "cialis" et la mise en vente de ce nom de domaine sur le site, outre l’absence de réponse à la demande de transfert excluent selon l’Expert, la prise en compte d’un quelconque indice de bonne foi du Défendeur.

Dans la mesure où la preuve de la renommée de la marque française ou de la marque communautaire n’a pas été apportée et où l’Expert doit statuer sur l’atteinte aux marques, au sens de l’existence d’un risque de confusion, il ne peut considérer que le seul enregistrement, puis l’usage du nom de domaine <cialis.fr> sans référence à la santé, aux médicaments ou au Requérant génère un risque de confusion avec les marques du Requérant.

(ii) Atteinte aux règles de la concurrence

Le nom de domaine <cialis.fr> porte-t-il atteinte aux règles de la concurrence au sens de l’article 1 du Règlement?

Compte tenu de la campagne médiatique qui a été mise en place par le Requérant au niveau européen pour le lancement de son médicament Cialis antérieurement à la réservation du nom de domaine litigieux, à la concomitance des dates et au caractère arbitraire du terme "cialis", le Défendeur a, selon toute vraisemblance, agi et enregistré le nom de domaine <cialis.fr> en connaissance de ce lancement.

Le Défendeur a ensuite choisi d’exploiter le nom de domaine pour une activité liée au tourisme en Guyane, mais en annonçant dès la page d’accueil que le nom de domaine <cialis.fr> est à vendre, les coordonnées de la personne à contacter étant également mentionnées sur cette page d’accueil.

La mise en vente du nom de domaine dès la page d’accueil du site démontre selon l’Expert l’objectif poursuivi en enregistrant ce nom de domaine, à savoir la revente du nom de domaine.

Rien n’explique le choix par le Défendeur du terme de fantaisie “cialis” composant le nom de domaine <cialis.fr>, alors même que celui-ci n’a aucune signification ni en français ni en anglais, hormis son caractère spéculatif.

Le Règlement dispose que “L’expert mène la procédure alternative de résolution de litiges de la manière qu’il estime appropriée dans le respect du présent règlement” (article 17 du Règlement), ce qui autorise notamment l’Expert à vérifier certains éléments sur l’Internet.

Une recherche sur le site <Infogreffe.fr> a permis à l’Expert de constater que le contact administratif du nom de domaine <cialis.fr>, a exercé en son nom personnel une activité commerciale sous les noms commerciaux “Broker”, “Cialis”, “Nostradamus” et “Vivango”, au titre d’une immatriculation au registre du commerce et des sociétés de Toulon en date du 2 mars 1990, suivie d’une radiation en date du 26 octobre 2010. Rien ne permet d’affirmer depuis quand cette activité a été exercée sous les noms commerciaux précités et notamment sous le nom commercial Cialis. De surcroît cette activité concernait le commerce de détails sur éventaires et marchés, ce qui diffère de l’exploitation actuellement faite du nom de domaine litigieux, qui renvoie vers un site d’informations sur la Guyane.

Au 12 février 2003, le candidat à l’enregistrement d’un nom de domaine en ".fr" devait justifier d’un “droit au nom”, par exemple en prouvant avoir inscrit à son extrait du registre du commerce la mention du nom commercial correspondant au nom de domaine. Selon toute vraisemblance et en l’absence d’autres éléments de preuve qu’il appartient au Défendeur d’apporter, l’Expert est d’avis que c’est pour satisfaire aux règles de nommage alors en vigueur que le nom commercial Cialis a été inscrit comme nom commercial, ce qui prouve sa détermination à enregistrer le nom de domaine <cialis.fr>.

L’Expert a eu accès à un document mis en ligne sur la page d’accueil du site “www.cialis.fr”, daté du 3 décembre 2004, à en-tête de la République française et du Ministre délégué au tourisme français concernant un site d’information touristique sur la Guyane “www.destination.fr”. Après vérification par l’Expert, il apparaît que les pages accessibles sur le site Internet “cialis.fr” correspondent à celles du site “www.destination.fr”.

L’Expert considère qu’il n’est pas vraisemblable que le Défendeur ait réellement eu pour intention d’exploiter le nom de domaine litigieux pour faire figurer des informations sur la Guyane, mais que cette exploitation est artificielle, l’intention spéculative étant clairement mise en avant.

Il est ainsi fait référence, sur l’une des pages du site “www.cialis.fr”, au pouvoir attractif des noms de domaine et plusieurs noms de domaine sont proposés à la vente, à savoir <nostradamus.fr>, <passion.fr>, <exclusif.fr>, <vosdroits.fr>, <exotique.fr>, <cialis.fr> et <pactole.fr>.

Cette mise en vente argumente clairement selon l’Expert sur le caractère unique de chaque nom de domaine. Elle est annoncée, dans les termes suivants, comme s’inscrivant dans le cadre d’une activité habituelle du Défendeur “[a]ucun tiret, pas le moindre nom à rallonge mais uniquement ceux qui percutent pour une information bine définie. La plupart font l’objet de convoitise! Il nous est impossible d’être sur plusieurs créneaux à la fois, aussi en voilà une partie qui est en vente pour des partenaires sérieux. Pour de plus amples informations n’hésitez pas à nous contacter”. Comme déjà indiqué, le nom de domaine <cialis.fr> est dans la liste des noms de domaine mis en vente.

En enregistrant le nom de domaine <cialis.fr>, le Défendeur a empêché le Requérant d’être présent sur la partie française de l’Internet sous la dénomination qui est sa marque, ce qui constitue un frein au développement de son activité sur le territoire français.

Cette circonstance lui est d’autant plus préjudiciable que le secteur pharmaceutique est un secteur strictement réglementé, notamment en termes de publicité et de communication aux consommateurs sur Internet, obligeant ainsi les entreprises pharmaceutiques à adapter leurs sites Internet aux exigences légales nationales en vigueur (voir notamment la Charte pour la communication sur Internet des entreprises pharmaceutiques mise en place par l’Afssaps – Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé).

L’Expert estime que le Défendeur a enregistré et utilisé le nom de domaine <cialis.fr> en connaissance des droits du Requérant, en vue de la revente, pour priver le titulaire légitime de ce nom de domaine de la possibilité de l’enregistrer et de l’exploiter et pour le contraindre à en négocier le rachat.

L’ensemble de ces faits caractérise une atteinte aux règles de la concurrence et du comportement loyal en matière commerciale en droit français lors de l’enregistrement et de l’usage du nom de domaine <cialis.fr>.

7. Décision

Conformément aux articles 20(b) et (c) du Règlement, l’Expert ordonne la transmission au profit du Requérant du nom de domaine <cialis.fr>.

Marie-Emmanuelle Haas
Expert
Le 10 décembre 2010