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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE

MédiaQMI Inc. contre Janick Murray-Hall

Litige No. D2016-1280

1. Les parties

Le Requérant est MédiaQMI Inc. de Montréal, Québec, Canada, représenté à l’interne.

Le Défendeur est Janick Murray-Hall de Québec, Canada, représenté par Lajoie & Pearson Avocats, Canada.

2. Nom de domaine et unité d’enregistrement

Le nom de domaine litigieux <journaldemourreal.com> est enregistré auprès de Launchpad.com Inc. (ci-après désigné “l’Unité d’enregistrement”).

3. Rappel de la procédure

Une plainte en français a été déposée par MédiaQMI Inc. auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 23 juin 2016. En date du 24 juin 2016, le Centre a adressé une requête à l’Unité d’enregistrement aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Le 29 juin 2016, l’Unité d’enregistrement a transmis sa vérification au Centre confirmant l’ensemble des données du litige, et notant que l’anglais était la langue du contrat d’enregistrement du nom de domaine litigieux. Le 29 juin 2016, le Centre a envoyé un courrier électronique au Requérant, le demandant de fournir soit la preuve suffisante d’un accord, entre le Requérant et le Défendeur, prévoyant que la procédure se déroule en français, soit à déposer une plainte traduite en anglais, soit à déposer une demande afin que le français soit la langue de la procédure. Le Défendeur était également invité à fournir des arguments à cet égard. Le 30 juin 2016, le Requérant a déposé une demande que la procédure se déroule en français. Le 2 juillet 2016, et le 4 juillet 2016, le Centre a reçu des communications du Défendeur en français.

Le Centre a vérifié que la plainte répond bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés “Principes directeurs”), aux Règles d’application des Principes directeurs (ci-après dénommées les “Règles d’application”), et aux Règles supplémentaires de l’OMPI (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”) pour l’application des Principes directeurs précités.

Conformément aux paragraphes 2 et 4 des Règles d’application, le 5 juillet 2016, une notification de la plainte en français valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur. Conformément au paragraphe 5 des Règles d’application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 25 juillet 2016. Le Centre a reçu des communications du Défendeur le 9 juillet 2016, et le 13 juillet 2016. Suite à une demande du Défendeur, conformément au paragraphe 5(b) des Règles d’application, le délai pour le dépôt de la réponse était prolongé jusqu’au 29 juillet 2016. Le Centre a reçu une demande de suspension de la procédure du Défendeur le 25 juillet 2016. Le Défendeur a fait parvenir sa réponse le 29 juillet 2016. Le Requérant a déposé des arguments additionnels non-sollicités le 4 août 2016 (la “Réplique”). Le Centre a reçu une communication additionnelle du Défendeur le même jour.

En date du 8 août 2016, le Centre nommait J. Nelson Landry comme expert-unique dans le présent litige. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d’application.

4. Les faits

Le Requérant est titulaire de la marque de commerce écrite LE JOURNAL DE MONTRÉAL (1), et de deux marques figuratives comprenant LE JOURNAL DE MONTRÉAL:

(2) logo (3) logo

Les deux premières utilisées depuis 1964 et la troisième, depuis 2005 par les prédécesseurs du Requérant et sont toutes trois enregistrées au Canada respectivement depuis le 11 septembre 1987, le 9 janvier 1987, et le 24 mars 2010 pour la dernière (ci-après les “Marques LE JOURNAL DE MONTRÉAL”). Ces Marques sont utilisées par le Requérant en liaison avec la publication d’un journal quotidien dans la province de Québec, au Canada, lequel, selon le Requérant, à la fin de l’année 2015, était lu par plus d’un million de lecteurs en semaine, 1,400,000 le samedi et au moins 1,100,000 le dimanche. Selon un sondage tenu en 2016, la Marque LE JOURNAL DE MONTRÉAL du Requérant était la quatrième marque la plus influente au sein des 100 marques les plus influentes au Québec.

Le Requérant est également titulaire depuis 1997 de neuf noms de domaine enregistrés comprenant la Marque LE JOURNAL DE MONTRÉAL avec ou sans le terme “le”, d’autres avec un trait d’union entre les termes et enfin avec les suffixes “.com” ou “.ca”. Le Requérant affirme que plus de 18 millions d’internautes ont visité son site web, “www.lejournaldemontreal.com”, vers lequel les internautes qui visitent les autres sites web sont redirigés. De plus depuis 2014 la Marque LE JOURNAL DE MONTRÉAL est utilisée pour les tablettes et téléphones intelligents.

Le Défendeur a enregistré le nom de domaine litigieux <journaldemourreal.com> le 2 septembre 2013 et exploite un journal sur l’Internet à l’adresse du nom de domaine litigieux et d’un site Facebook. Dans la première page sur le site web, le visiteur retrouve sur la droite l’accès à la page Facebook associée à la partie (Annexe 6 de la Réponse) reportage journalistique et le lecteur ou visiteur voit le titre présenté sous forme de logo (B) qui reprend substantiellement la présentation graphique présentement utilisée par le Requérant depuis au moins 2013 selon l’Annexe P de la Réplique laquelle montre la page complète et non seulement la partie centre gauche (A).

A. logo B. logo

Le journal publié par le Défendeur sur son site web et sa page Facebook ne comporte aucune divulgation ou identification de l’identité du titulaire du nom de domaine litigieux ni de personne contact et l’adresse email contenue dans le WhoIs dudit nom de domaine est celle d’un service d’anonymisation. Le journal du Défendeur ne contient aucun avertissement ou mention qui clarifie ou élimine quelque possibilité de confusion que certains visiteurs pourraient entretenir avec celui du Requérant.

Le 2 février 2016, le Requérant a envoyé une lettre de mise en demeure au Défendeur faisant valoir ses droits enregistrés sur les Marques LE JOURNAL DE MONTRÉAL, son objection à l’emploi du nom de domaine litigieux et a demandé la cessation de l’emploi et le transfert au Requérant. Le 4 février 2016, le Défendeur répond au Requérant et déclare son ouverture au dialogue et à la négociation dans le contexte d’un changement du nom de domaine qui nécessiterait une compensation financière.

5. Argumentation des parties

A. Requérant

Identité ou similitude prêtant à confusion

Le Requérant soumet qu’il est titulaire des Marques LE JOURNAL DE MONTRÉAL tant écrites que figuratives et que celles-ci, du fait de leur emploi et enregistrement, jouissent d’une grande renommée relativement à la publication et très grande lecture de journaux tant format papier que sur son site Internet et que, de ce fait, la Marque LE JOURNAL DE MONTRÉAL est fortement distinctive du Requérant. Cette renommée des Marques LE JOURNAL DE MONTRÉAL résulte également de la présence de la Marque écrite dans ses neuf noms de domaine et leur usage depuis 1997.

Le Requérant soumet de plus que le nom de domaine litigieux contient les principaux éléments “journal” et “mourréal” et ce second terme modifie l’élément distinctif de “Montréal” par le remplacement des lettres “n” et “t” par “u” et “r” et que le nom de domaine litigieux, de par sa ressemblance avec les Marques JOURNAL DE MONTRÉAL, risque de créer de la confusion dans l’esprit du public et invite ce dernier à croire que le nom de domaine litigieux est associé au Requérant, tous deux actifs dans le domaine de la nouvelle imprimée pour le Requérant et sur Internet pour les deux parties. Le Requérant, à l’appui de sa soumission, mentionne des décisions antérieures sous les Principes directeurs démontrant la présence d’une faute d’orthographe pour créer de la confusion lorsque sa marque de commerce ainsi modifiée demeure l’élément dominant du nom de domaine litigieux et ce dernier porte à confusion avec les Marques LE JOURNAL DE MONTRÉAL.

Droits ou intérêts légitimes

Le Requérant représente qu’il n’a jamais octroyé au Défendeur quelque droit ou autorisation d’utilisation de l’expression “le journal de mourréal” pour quel qu’usage que ce soit, y compris l’enregistrement du nom de domaine litigieux. Le Requérant soumet que, selon ses recherches, le Défendeur n’exploite aucune entreprise sous le nom de domaine litigieux et qu’aucune entreprise n’est enregistrée sous ce nom et que de plus le Défendeur était certainement au courant de l’existence de la publication d’un journal quotidien, imprimé ou virtuel, sous la Marque LE JOURNAL DE MONTRÉAL.

Le Requérant affirme que même si le Défendeur réclame la protection du fait que son nom de domaine litigieux est une exception, parodie ou satire, en vertu de la loi sur le droit d’auteur, ceci démontre que ce dernier était conscient de la similitude et confusion entre le nom de domaine litigieux et la Marque LE JOURNAL DE MONTRÉAL. De plus le fait d’utiliser une exception relevant de la critique ne confère aucun intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux d’autant plus que pour ce critère, “il ne peut y avoir d’intérêt commercial dans l’utilisation du nom de domaine”. Selon la preuve présentée par le Requérant, le Défendeur cherche ou accepte de placer de la publicité sur le site associé au nom de domaine litigieux et ainsi s’adonne à cet usage à des fins commerciales (Annexes M et P). Cet usage de publicité a d’ailleurs été clairement reconnu par le Défendeur lors de ses communications avec les procureurs du Requérant et d’une entrevue radio québécoise. De plus, le Défendeur s’est inscrit à des services d’analyse d’audience et de placement publicitaire auprès de la société Comscore.

Le Requérant conclut donc que devant la connaissance des Marques LE JOURNAL DE MONTRÉAL, leur modification mineure dans le nom de domaine litigieux et leur usage non autorisé à des fins commerciales, nonobstant l’usage de parodie, démontrent que le Défendeur n’a aucun intérêt légitime dans le nom de domaine litigieux.

Enregistrement et usage de mauvaise foi

Invoquant la large diffusion de ses journaux sous la Marque LE JOURNAL DE MONTRÉAL depuis 1960 et le nom de domaine <lejournaldemontreal.com> depuis 1997, le Requérant soumet que le Défendeur profite ainsi de la renommée associée aux Marques LE JOURNAL DE MONTRÉAL pour attirer des visiteurs sur son site web à l’adresse du nom de domaine litigieux et ainsi générer des revenus tant par le site web que par la page Facebook associée à ce dernier et présente sur la première page du site web sur laquelle le visiteur voit de la publicité commerciale de tierces parties, non mentionnées dans sa Réponse (Annexe P de la Réplique).

Suite à l’envoi de la lettre de mise en demeure du Requérant demandant le transfert du nom de domaine litigieux en offrant de rembourser le paiement de l’enregistrement dudit nom de domaine litigieux, le Défendeur, dans un échange de correspondance a manifesté sa disposition ou intérêt à procéder audit transfert contre le paiement d’une somme d’argent tenant compte des revenus réels et anticipés et était disposé à le vendre pour un prix supérieur au coût d’enregistrement.

Le Requérant représente que le fait d’avoir enregistré le nom de domaine litigieux en utilisant un service d’anonymisation constitue un geste de mauvaise foi lors de l’enregistrement selon des décisions sous les Principes directeurs en sus des activités commerciales.

Arguments en Réplique – Demande introductive d’instance en injonction permanente et reddition de compte

(a) Demande de suspension de la procédure.

Postérieurement à la réception de la Réponse, le Requérant a présenté une Réplique. Dans cette Réplique qui souligne l’envoi par courriel le 2 juillet 2016 d’une Réponse sommaire et non signée du Défendeur, ce dernier demande la suspension de la présente procédure administrative suite à l’institution devant la Cour supérieure de la province de Québec par le Requérant d’une procédure à l’égard de la publication du journal électronique du Défendeur sous le nom de domaine litigieux. Cette demande de suspension a été réitérée le 24 juillet 2016, et le 25 juillet 2016, et finalement le 29 juillet 2016, le Défendeur présente une réponse élaborée selon la procédure applicable dans la présente, ce qui rend caduque la demande de suspension. Le Requérant souligne que la procédure présentée devant la Cour supérieure ne comporte aucune conclusion sur l’enregistrement et le transfert du nom de domaine litigieux tel que demandé dans la présente procédure.

(b) Nouveaux éléments de preuve.

Dans sa Réplique, le Requérant présente des nouvelles preuves en soulignant la possibilité de faire ceci selon le pouvoir discrétionnaire de la Commission administrative.

Le Requérant soumet de nouveaux éléments de preuve relativement à la défense de parodie de la part du Défendeur et souligne que la décision citée par le Défendeur implique deux sociétés américaines et elle est fondée sur les lois et la jurisprudence américaines alors que selon le paragraphe 10 des Règles d’application, une décision dans une procédure administrative telle que la présente, le fait d’importer le droit national est refusé. La défense de parodie est couverte par le paragraphe 4(c)(iii) des Règles d’application et n’est pas une exception comme le Défendeur le soumet en invoquant la décision QWest Communications International Inc. c. DefaultData.com a/k/a Brian Wick, Litige OMPI No. D2003-0002.

Le Défendeur souligne la décision Harry Winston Inc. and Harry Winston S.A. c. Jennifer Katherman, Litige OMPI No. D2008-1267, qui invoque la parodie, cependant il mentionne que ce litige porte sur des produits différents commercialisés par le requérant à savoir bijoux, diamants, d’une part et accessoires de luxe pour animaux domestiques, d’autre part. Le Requérant souligne que dans cette décision, en sus des produits différents, il n’y a pas de considération par le défendeur de possibilité de vente du nom de domaine au requérant. Il mentionne enfin qu’il n’y a pas de concept de droits nationaux dans les procédures sous les Principes directeurs et que le test de parodie est le même en se référant aux décisions A & F Trademark, Inc. and Abercrombie & Fitch Stores, Inc. c. Justin Jorgensen, Litige OMPI No. D2001-0900 et Harry Winston Inc. and Harry Winston S.A. c. Jennifer Katherman, supra. Mentionnant le paragraphe 4(c)(iii) des Règles d’application qu’il est clair qu’on doive considérer un usage non commercial ou sans intention de tirer profit de publicité. Il cite de plus la décision Jennifer Lopez Foundation c. Jeremiah Tieman,Jennifer Lopez Net, Jennifer Lopez, Vaca Systems LLC, Litige OMPI No. D2009-0057, où le défendeur opère un “fan site” sur lequel il y a, selon lui, une publicité et revenus modestes et propose de vendre le site pour USD 80 000. La commission administrative n’a pas été convaincue et a ordonné le transfert.

Relativement à l’absence de mention de publicité dans l’Annexe 5 de la Réponse montrant des extraits du site web associé au nom de domaine litigieux par le Défendeur, le Requérant, sous l’Annexe P de la Réplique, produit de nombreuses pages complètes et exemples du contenu de la première page et autres du site web du Défendeur sur laquelle on retrouve au début la date ainsi que, à droite, plusieurs publicités telles marques de voitures HYUNDAI, produits électroniques SAMSUNG, produits pharmaceutiques PFIZER, meubles WAYFAIR, entre autres, habituellement trois publicités par première page de chacune des huit ou neuf sections dudit site web.

Le Requérant rappelle aussi que l’identité du Défendeur a été cachée auprès de l’Unité d’enregistrement et que ceci constitue un élément supplémentaire de la mauvaise foi du Défendeur.

B. Défendeur

Identité ou similitude prêtant à confusion

Le Défendeur ne conteste pas les droits et l’utilisation des Marques LE JOURNAL DE MONTRÉAL détenues par le Requérant. Il soumet cependant que malgré que le nom de domaine litigieux soit semblable avec les Marques du JOURNAL de MONTRÉAL, le fait de la présence des éléments “journal” et “mourréal” ne prêtent pas à confusion. Il souligne que le terme distinctif “Montréal” réfère au nom très connu de la métropole du Québec dont l’orthographe ne fait aucun doute dans l’esprit du public considérant que la moitié de la population de la province de Québec réside à Montréal.

La déformation du nom “Montréal” en “mourréal” réfère à une manière populaire et humoristique de déformer le nom d’une ville et ne constitue pas une première, ceci ayant déjà été fait dans une publication satirique du magazine Croc et des enregistrements vidéos humoristiques dans lesquelles le groupe Rock et Belles Oreilles parodient le quotidien du Requérant. Le Défendeur soumet donc que “mourréal” a une signification humoristique et parodique et ne peut donc porter confusion avec “Montréal”.

Le Défendeur soumet également que les nombreux articles et publications périodiques suivant la récente procédure judiciaire engagée au Québec par le Requérant contre le Défendeur, le public est désormais fortement informé de la distinction entre les Marques LE JOURNAL DE MONTRÉAL et le nom de domaine litigieux (Annexe 4) et soumet de plus que par cette procédure judiciaire, le Requérant a mis fin à toute confusion possible dans l’esprit du public et conclut donc qu’il n’y a aucun risque de confusion entre le nom de domaine litigieux et les Marques LE JOURNAL DE MONTRÉAL.

Droits et intérêts légitimes

Le Défendeur ne conteste pas la réputation acquise par le Requérant associée à ses Marques LE JOURNAL DE MONTRÉAL et leur utilisation antérieurement à l’enregistrement du nom de domaine litigieux. Le Défendeur allègue qu’il a un droit ou un intérêt légitime dans ce dernier puisqu’il est utilisé à des fins de parodie et se réfère à la décision A & F Trademark, Inc. and Abercrombie & Fitch Stores, Inc. c. Justin Jorgensen, supra. La commission administrative a déterminé que la défense de parodie était un moyen possible de démontrer un droit ou un intérêt légitime malgré l’enregistrement d’une marque de commerce. Le Défendeur souligne que cette défense est reconnue et a déjà donné lieu au rejet d’une plainte. Voir Harry Winston Inc. and Harry Winston S.A. c. Jennifer Katherman, supra.

Le Défendeur soumet que le nom de domaine litigieux satisfait les deux étapes de la décision A & F Trademark, Inc. and Abercrombie & Fitch Stores, Inc. c. Justin Jorgensen, supra en ce que premièrement le nom de domaine litigieux considéré indépendamment du contenu du site Internet transmet de manière simultanée les deux messages contradictoires demandés par une parodie, qu’il est original d’une part, qu’il n’est pas l’original mais plutôt une parodie et que le nom de domaine est conforme à la défense de parodie. Enfin, relativement à l’utilisation ou non à des fins commerciales, ceci n’affecte pas la défense de parodie du défendeur dans laquelle la défenderesse utilisait un nom de domaine jugé parodique à des fins commerciales selon la décision Harry Winston Inc. and Harry Winston S.A. c. Jennifer Katherman, supra.

Enregistrement et usage de bonne foi

Relativement aux critères d’enregistrement et d’usage de bonne foi du nom de domaine litigieux, le Défendeur avait bel et bien conscience de l’existence des Marques du Requérant considérant ses motivations de parodie dans l’utilisation du nom de domaine contesté mais cependant, il conteste les allégations de mauvaise foi du Requérant à son égard.

Le Défendeur représente que ses revenus ne sont pas le fait d’une confusion du nom de domaine litigieux et les Marques du Requérant mais plutôt le fruit d’un achalandage provenant des 120,000 abonnés et plus à sa page Facebook sur lequel il publie ses articles périodiques. Cet achalandage provient de l’appréciation de l’humour des articles parodiques par ses abonnés plutôt que la confusion des lecteurs du journal du Requérant. Le Défendeur soumet que le fait de masquer son identité auprès de l’Unité d’enregistrement à lui seul ne saurait démontrer sa mauvaise foi. Enfin, il mentionne que le Requérant et le Défendeur ne sont pas concurrents car le journal du Requérant publie des nouvelles en tout genre pour informer le public alors que le Défendeur par son site Internet hébergé au nom de domaine litigieux offre gratuitement des fausses nouvelles avec un but uniquement humoristique et parodique.

6. Discussion et conclusions

6.1. Langue de la procédure

Suite à une communication du Centre soulignant que le contrat d’enregistrement du nom de domaine litigieux était en langue anglaise, le Requérant a acquiescé à la demande de ce dernier et a soumis une Demande afin que le français soit la langue de la procédure et celle-ci fut communiquée au Défendeur qui ne formulât aucune objection.

Le Requérant et le Défendeur sont deux personnes, l’une corporative, l’autre individuelle, résidant au Canada, dans la province de Québec où le français est une des langues officielles et la Commission administrative note que ces derniers ont déjà échangé en langue française lors de conversations téléphoniques et par des courriels ainsi qu’avec le Centre au moyen de courriels en langue française, témoignant ainsi de leur familiarité avec le français.

La Commission administrative reconnait que l’adoption du français comme langue de la procédure est justifiée conformément au paragraphe 11(a) des Règles d’application.

6.2. Demande de suspension de la procédure

Le 2 juillet 2016, le Défendeur a soumis une première Réponse courte et non signée à la Plainte du Requérant. Subséquemment, le 9 juillet 2016, par un courriel, le Défendeur informe la Commission administrative du dépôt le 7 juillet 2016 d’une procédure judiciaire par le Requérant devant la Cour supérieure du Québec invoquant sa Marque écrite LE JOURNAL DE MONTRÉAL à l’égard de la publication du Journal de Mourréal sur le site web du Défendeur et d’une page Facebook ou sont publiées des nouvelles prétendument humoristiques et demandant une injonction permanente et reddition de comptes (Annexe 7 de la plainte). Les conclusions et remèdes recherchés par le Requérant comprennent seulement un recours à l’égard de Facebook sans aucun recours spécifiquement à l’égard du transfert du nom de domaine litigieux. Le Défendeur présente une demande de suspension de la présente procédure administrative préférant attendre la décision de la Cour supérieure du Québec à la lumière de la Charte canadienne des droits et libertés.

Subséquemment, le Défendeur, ayant décidé de procéder avec l’audition de la présente procédure administrative, formule une demande d’un délai additionnel pour produire une Réponse complète et détaillée, demande qui lui est accordée par le Centre fixant le délai au 29 juillet 2016, date à laquelle le Défendeur produit une Réponse détaillée et signée de ses procureurs.

Subséquemment à ces communications et demandes, le Requérant produit au Centre, le 4 août 2016, un document intitulé “Réplique” en vertu des paragraphes 10(a),(b) et (c) des Règles d’application demandant l’autorisation à la Commission administrative de déposer la preuve et l’argumentation supplémentaires énoncées dans ladite Réplique. Le Défendeur, par courriel, le 4 août 2016, s’est simplement opposé à la demande d’autorisation soumise par le Requérant.

La Commission administrative considérant que le Défendeur a présenté sa Réponse détaillée et signée le 29 juillet 2016 et n’a pas réitéré la demande de suspension d’une part et que la procédure devant la Cour supérieure de la province de Québec ne comporte pas de recherche ni de conclusion sur la présente procédure administrative d’autre part, détermine que la présente procédure administrative ne sera pas suspendue en conformité avec le paragraphe 18(a) des Règles d’application.

6.3. Admissibilité des arguments additionnels

Le Requérant invoque le large pouvoir discrétionnaire dont dispose la Commission administrative pour permettre le dépôt de preuve supplémentaire et complémentaire à la Plainte initiale en invoquant des décisions antérieures de commissions administratives sous les Principes directeurs déjà autorisées afin de permettre de repousser des arguments qui ne pouvaient être anticipées et invoque d’autres décisions de commissions administratives.

Dans sa Réplique le Requérant précise à l’égard de certains points soulevés dans la Réponse du Défendeur que la parodie relève du paragraphe 4(c)(iii) des Principes directeurs et non d’une exception autonome et souligne à cet égard la décision Harry Winston Inc. and Harry Winston S.A. c. Jennifer Katherman, supra et en preuve d’usage commercial apporte des copies de publicité apparente sur le site Internet du Défendeur lesquelles pages ne sont pas complètes dans les documents en haut de la première page du site web fournis en Annexe 5 de la réponse du Défendeur. La Commission administrative observe dans les pages complètes dans l’Annexe P de la Réplique en comparaison avec l’Annexe 5 de la Réponse et également lors de sa visite du site web du Défendeur, que le segment de droite de la première page de la première section et de chacune des nombreuses sections, mentionnées en haut de la première page du site web et de chaque section, le visiteur observe régulièrement deux ou trois publicités diverses, bancaire, automobile, produit pharmaceutique et autres.

De plus relativement aux nouveaux éléments de preuve avec explication par le Requérant, la Commission administrative voit dans ces compléments de preuve, une clarification de preuve et de l’information complémentaire à l’Annexe 5 de la Réponse et ne justifient pas la nécessité ou le temps additionnel de demande de commentaires et observations du Défendeur et prenant en considération son pouvoir large relativement à la preuve, détermine qu’il n’est pas utile ou nécessaire d’obtenir par une Ordonnance de procédure des commentaires et observations au Défendeur, cette preuve additionnelle et plus complète aurait pu être présentée dans la Réponse, vu sa pertinence à tout le moins sur l’aspect présence publicité.

La Commission administrative détermine que ces éléments de preuve additionnels sont pertinents et utiles pour compléter la preuve ayant trait à la présence ou l’emploi de publicité par le Défendeur et en vertu du pouvoir discrétionnaire dont elle dispose accepte le document Réplique du Défendeur et les nouveaux documents produits en Annexe P.

A. Identité ou similitude prêtant à confusion

Le Requérant a clairement établi son titulariat sur les Marques LE JOURNAL DE MONTRÉAL tant écrites que visuelles, ainsi que la très grande renommée qui y est associée, faits que le Défendeur ne conteste pas.

Il est clairement établi dans les décisions antérieures sous les Principes directeurs que lorsque la commission administrative considère et apprécie la première condition à savoir si le nom de domaine litigieux est identique ou porte à confusion avec la ou les marques du requérant, que seul cet aspect doit être pris en considération et analyse, sans prendre en considération le contenu du site web et même la possible présence d’un avertissement sur le site du Défendeur pour éviter l’association ou relation d’affaires entre les deux parties. Cet aspect a été bien analysé et expliqué dans la décision A & F Trademark, Inc. and Abercrombie & Fitch Stores, Inc. c. Justin Jorgensen, supra dans laquelle la marque du requérant et le nom de domaine <abercombrieandfilth.com> diffèrent par le remplacement du sigle “&” par “and” et trois lettres “tch” par “lth” dans le nom de domaine et conclut que non seulement il apparaît semblable à la marque du requérant mais diffère seulement dans le son de la dernière syllabe.

Dans le présent cas, la différence réside dans le remplacement des deux lettres “nt” de Montréal par “ur” dans “mourréal”. La Commission administrative considère que relativement aux deux termes qu’elle considère distinctifs dans la Marque LE JOURNAL DE MONTRÉAL ces modifications sont mineures et n’empêchent pas la relation étroite de sens entre la Marque LE JOURNAL DE MONTRÉAL et le nom de domaine litigieux. L’abolition de l’article “le” dans le nom de domaine litigieux est très mineure entre les deux expressions sous considération. De plus, au plan phonétique la différence entre “mon” Montréal et “mou” dans “mourréal” est mineure et que l’absence du “t” dans le nom de domaine litigieux est immatérielle si on considère que même dans l’écrit, ceci est mineur et silencieux dans la prononciation.

La Commission administrative détermine donc que le nom de domaine litigieux prête à confusion avec la Marque LE JOURNAL DE MONTRÉAL du Requérant.

La Commission administrative retient que le premier critère posé au paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs est rempli.

B. Droits ou intérêts légitimes

Le Requérant s’est déchargé de son fardeau de preuve prima facie en mentionnant l’absence de licence et consentement à l’usage de sa Marque LE JOURNAL DE MONTRÉAL et l’enregistrement du nom de domaine litigieux. Il est clairement établi dans les décisions antérieures sous les Principes directeurs que la défense de parodie est une défense acceptable selon le paragraphe 4(c)(iii) des Principes directeurs qui se lit comme suit: “vous faites un usage non commercial légitime ou un usage loyal du nom de domaine sans intention de détourner à des fins lucratives les consommateurs en créant une confusion ni de ternir la marque de produits ou de services en cause.” Selon la jurisprudence constante UDRP, la parodie peut être une défense acceptée dans certaines circonstances, cet élément de parodie a été tout particulièrement considéré et analysé de façon détaillée dans la décision A & F Trademark, Inc. and Abercrombie & Fitch Stores, Inc. c. Justin Jorgensen, supra, et de plus considéré dans la décision Harry Winston Inc., supra.

Dans la décision A & F Trademark, Inc. and Abercrombie & Fitch Stores, Inc. c. Justin Jorgensen, supra, la commission administrative a noté que le requérant était actif dans la commercialisation de vêtements, colognes et produits accessoires alors que le défendeur était actif dans un site de caractère axé exclusivement sur des activités sexuelles pour adultes, ce que le titulaire voulait signifier par l’emploi du mot “filth” dans “abercrombieandfilth” du nom de domaine et que ceci n’était pas inusité et ne pouvait porter à confusion parce qu’il ne vendait pas de vêtement et que de plus, il y avait un avertissement sur son site web expliquant sa non-association avec le requérant. Cependant, la commission administrative reconnaissant que, la parodie dans certaines circonstances, peut être une défense note que, dans le cas présent, la preuve ne contient aucun élément pour démontrer une présence de parodie quelconque et que le tout était pour un usage commercial de service de pornographie sur son site web et que ceci démontrait un motif purement commercial ainsi que des activités d’enregistrement et usage de mauvaise foi qui ont donc entrainé le transfert du nom de domaine en cause au requérant.

Dans la décision Harry Winston Inc. and Harry Winston S.A. c. Jennifer Katherman, supra, la défenderesse a également fait mention d’un usage de parodie. Cependant, au soutien de son intérêt légitime, elle explique que le choix de son nom de domaine <hairywinston.com> provient du nom de son chien et que les services offerts sur son site web sont ceux d’une boutique de luxe pour accessoires d’animaux de compagnie. Elle souligne avoir d’abord incorporé une compagnie, obtenu les autorisations ou licences requises, demandé l’enregistrement de marque de commerce et ensuite, ouvert sa boutique et débuté l’usage de son nom de domaine et site web associé. Elle ne nie pas la similitude avec la marque de commerce du requérant et qu’il y a parodie fantaisiste (playful). De plus, elle a mis en preuve qu’elle ne cachait pas son identité mais plutôt dévoilée dans le site web et qu’enfin elle n’avait aucune intention de vendre le site web mais plutôt continuer à l’exploiter. Dans sa décision, la commission administrative n’a pas tiré de conclusion sur l’utilisation d’un nom de domaine jugé parodique à des fins commerciales, ni sur l’élément droit et intérêts légitimes, au vu de sa conclusion qu’il n’y avait pas d’enregistrement ou d’usage de mauvaise foi dans l’enregistrement du nom de domaine vu l’absence d’intention de vendre le nom de domaine, clairement identifié son identité et l’opération d’un commerce très différent de celui du requérant. La demande de transfert a été rejetée.

Dans le présent dossier, les éléments de preuve présentés dans la Réplique montrent des pages du site web du Défendeur complètes avec plusieurs éléments de publicité. Dès la première page, au haut de celle-ci, chaque nouvelle édition du Défendeur porte une nouvelle date et, de plus, on retrouve dans la partie droite habituellement trois annonces publicitaires, faits énoncés précédemment et une référence et renvoi à la page Facebook associée au site web du Défendeur. Dans cette section de référence, on retrouve le logo du Journal de Mourréal du Défendeur mis en preuve dans l’Annexe D de la Réplique démontrant de nombreuses pages du site web du Défendeur avec la section des publicités et mention Facebook à droite. Cette preuve montre que ce logo A ci-dessus, différent de ceux enregistrés comme marques de commerce, apparaît pour une première fois le 22 novembre 2013 et apparait encore en 2016.

La Commission administrative reconnait que le nom de domaine litigieux dans son usage supporte un usage du genre “parodie” cependant, selon la preuve introduite en Réplique, cette dernière démontre qu’il y a également un usage commercial régulier et important associé et enfin que le Défendeur, dans ses discussions et négociations du coût de changement de nom de domaine avec le Requérant valorise cet aspect commercial en parlant de sa valeur actuelle et anticipée pour déterminer un prix de vente.

La Commission administrative détermine que l’usage fait par le Défendeur quoique d’un genre de parodie est un usage commercial et qu’elle ne considère pas comme un usage loyal du nom de domaine litigieux au sens du paragraphe 4(c)(iii) des Principes directeurs.

La Commission administrative retient que le deuxième critère posé au paragraphe 4(a)(ii) des Principes directeurs est rempli.

C. Enregistrement et usage de mauvaise foi

Les éléments de preuve disponibles à la Commission administrative dans ce dossier démontrent que le Défendeur connaissait bien la publication quotidienne du Requérant sous la Marque LE JOURNAL DE MONTRÉAL et sa grande renommée dans la région métropolitaine de Montréal et le genre de nouvelles se prêterait à une parodie dans le texte tel que recherché et effectué par le Défendeur dans son journal électronique publié sur son site web à l’adresse du nom de domaine litigieux et également associé à sa page Facebook clairement annoncée et en évidence en première page de chaque nouvelle publication du journal électronique du Défendeur. Malgré un examen détaillé de la preuve, tant au niveau de l’enregistrement du nom de domaine litigieux que la publication du journal électronique et de la page Facebook y associée, le visiteur ou lecteur ne peut d’aucune façon retracer l’identité du Défendeur qui publie ce journal contrairement à la situation dans la décision Harry Winston Inc. and Harry Winston S.A. c. Jennifer Katherman, supra. Bien que l’utilisation d’un service d’anonymat soit légitime, la Commission administrative ne voit pas de justification d’une telle discrétion dans ce dossier.

De plus la Commission administrative note que non seulement le Défendeur incorpore dans le nom de domaine litigieux un titre qui porte à confusion avec la Marque LE JOURNAL DE MONTRÉAL de grande renommée du Requérant, et que ce dernier essaie de tirer avantage de la grande renommée écrite et électronique du Requérant mais recherche ou envoie un message discutable en utilisant un logo comprenant “le Journal de Mourréal” (B ci-dessus) correspondant au logo du Requérant (A ci-dessus) qui est différent des Marques enregistrées mais que le Requérant utilise présentement de façon quotidienne depuis novembre 2013. Pourquoi rechercher cette relation ou ce lien si le Défendeur revendique sa propre notoriété et usage indépendant ou autonome?

La Commission administrative n’a pas cru opportun d’émettre une ordonnance de procédure demandant au Requérant s’il considérait ce nouveau logo avec couleur rouge (A ci-dessus) comme une marque de commerce non enregistrée et depuis quand il l’utilisait régulièrement. Sans avoir à déterminer s’il s’agit d’une marque de commerce, cet élément de similitude actuellement présent, selon la Commission administrative, s’ajoute aux autres éléments ci-dessus mentionnés qui incitent la Commission administrative à voir dans les activités du Défendeur un enregistrement de mauvaise foi du nom de domaine litigieux et également un usage de mauvaise foi au sens du paragraphe 4(a)(iii) des Principes directeurs.

En sus d’une identité habilement camouflée ou anonyme, absence d’avertissement de quelque association avec le Requérant, la Commission administrative se demande pourquoi l’Annexe A-5 de la Réponse ne comprenait pas les éléments de publicité présents dans la première page de son site web associé au nom de domaine litigieux (Annexe P de la Réplique).

Enfin, la Commission administrative note que l’offre de négociation du Défendeur dans sa communication du 4 février 2016 au Requérant relativement à un possible changement de nom de domaine, cette offre n’est pas nécessairement ou clairement une offre de vente du nom de domaine litigieux pour un prix supérieur au coût d‘enregistrement de ce dernier. Est-ce clairement de la part du Défendeur une offre de vente du nom de domaine litigieux au Requérant?

Les Principes directeurs sont destinés à résoudre des litiges flagrants de cybersquatting. Or ce dossier soulève des problématiques plus complexes relevant de l’interprétation de la parodie ou de la satire qui dépassent la simple application du paragraphe 4(a)(iii) des Principes directeurs.

Par conséquent, au vu de la complexité de ce dossier, et de la difficulté de décider si la parodie est présente et notant que la Cour supérieure du Québec a été saisie par le Requérant sur ce point et que les deux parties résident au Québec, la Commission administrative a décidé de ne pas se prononcer sur le paragraphe 4(a)((iii) des Principes directeurs.

Toutefois, la Commission administrative donne la possibilité pour le Requérant de déposer une nouvelle plainte si de nouveaux éléments devaient se présenter suite à cette décision qui permettraient de caractériser clairement la mauvaise foi du Défendeur et que la parodie n’était qu’un prétexte dans ce dossier.

7. Décision

Pour les raisons exposées ci-dessus, conformément aux paragraphes 4(a) des Principes directeurs et 15 des Règles d’application, la Commission administrative rejette la plainte.

J. Nelson Landry
Expert Unique
Le 5 septembre 2016