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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE L’EXPERT

April S.A. contre Yann Guyonvarc’h - SC Swisscaution SA

Différend No. DCH2014-0012

1. Les parties

Le Requérant est April S.A. de Lyon, France, représenté par Fidal, France.

La Partie adverse (ou le “Défendeur”) est Yann Guyonvarc’h - SC Swisscaution SA de Bussigny, Suisse, représenté par A.J. Graf, Suisse.

2. Les noms de domaine

Le différend concerne les noms de domaine <aprilcaution.ch>, <april-garantie.ch>, <aprilgarantie.ch>, <aprilgarantiedeloyer.ch>, <april-kaution.ch>, <aprilkaution.ch>, <april-mietkaution.ch>, <aprilmietkaution.ch>, <caution-april.ch>, <cautionapril.ch>, <garantie-april.ch>, <garantieapril.ch>, <garantiedeloyerapril.ch>, <mietkaution-april.ch> et <mietkautionapril.ch>.

3. Rappel de la procédure

Une demande a été déposée par April S.A. auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) par courrier électronique le 29 avril 2014 et sur support papier le 8 mai 2014.

En date du 30 avril 2014, le Centre a adressé une requête au registre SWITCH, le registre du .ch et .li, aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. En date du 2 mai 2014, SWITCH a confirmé que la Partie adverse est bien le titulaire des noms de domaine et que les Dispositions relatives à la procédure de règlement des différends pour les noms de domaine .ch et .li (ci-après les “Dispositions”) adoptées par SWITCH, le 1er mars 2004 sont applicables aux noms de domaine qui font l’objet du différend.

Le Centre a vérifié que la demande répond bien aux exigences des Dispositions.

Conformément au paragraphe 14 des Dispositions, le 13 mai 2014, une transmission de la demande valant ouverture de la présente procédure a été adressée à la Partie adverse. Conformément au paragraphe 15(a) des Dispositions, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 2 juin 2014. La Partie adverse a fait parvenir une réponse par courrier électronique en date du 2 juin 2014 et sur support papier le 3 juin 2014.

Aucune audience de conciliation n’a eu lieu dans le délai spécifié au paragraphe 17(b) des Dispositions.

En date du 20 août 2014, le Centre a nommé Lorenz Ehrler comme expert dans le présent différend. L’expert constate qu’il a été désigné conformément aux Dispositions. L’expert a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 4 des Dispositions.

4. Les faits

Le Requérant est une société d’assurance basée en France. Fondée en 1988, le Requérant a connu une importante expansion internationale et est actif également en Suisse, via sa filiale April Suisse SA.

Le Requérant est titulaire d’une marque internationale combinée APRIL (IR 1065229) qui revendique notamment des services d’assurance en classe 36, et qui désigne notamment la Suisse. Il détient également une marque communautaire verbale APRIL ainsi que divers noms de domaine incorporant l’élément “April”, tels que <april.fr>, <april.ch>, <april.com> etc. Parmi les divers services d’assurance offerts par le Requérant figure la garantie de loyer sans dépôt bancaire, ce qui ressort de la capture d’écran reproduite à la page 10 de la demande.

La marque internationale combinée APRIL (IR 1065229) a été enregistrée le 22 septembre 2010.

Le Défendeur est une société d’assurance avec siège en Suisse. Tout comme le Requérant, il offre des garanties de loyer sans dépôt bancaire. Le 2 décembre 2013 et le 11 janvier 2014, le Défendeur a enregistré les noms de domaine litigieux qui redirigent le visiteur vers la page Internet du prestataire GANDI.

Outre les noms de domaine litigieux, le Défendeur a enregistré 35 noms de domaine dans des extensions génériques et/ou nationales combinant le signe “April” avec des désignations génériques relatives aux assurances. Il a enregistré de nombreux autres noms de domaine selon le même schéma, incorporant des marques d’assurances connues telles qu’ AXA, ALLIANZ, GENERALI, VAUDOISE, etc.

5. Argumentation des parties

A. Requérant

Le Requérant allègue que les noms de domaine litigieux sont similaires à la marque APRIL au point de prêter à confusion et que, dès lors, les droits de marque du Requérant sont violés.

Outre une violation de la Loi fédérale sur la protection des marques (“LPM”), le Requérant allègue également que le comportement du Défendeur constitue de la concurrence déloyale, en particulier parce que le Défendeur n’est pas identifié sous la dénomination “April” et qu’il n’a pas été autorisé par le Requérant à faire usage de ladite dénomination. Il en déduit que le Défendeur ne saurait utiliser en bonne foi ces noms de domaine. Ayant connaissance du Requérant au moment de l’enregistrement des noms de domaine litigieux, cet enregistrement a eu lieu de mauvaise foi et vise à perturber les opérations commerciales du Requérant.

B. Défendeur

Le Défendeur reproche à son tour au Requérant d’agir de manière déloyale en voulant détourner des clients du Défendeur par des agissements parasitaires. Quant à l’enregistrement et à la détention des noms de domaine litigieux, le Défendeur considère qu’il s’agit de mesures de légitime défense, prises dans l’attente d’un jugement d’un tribunal suisse.

6. Discussion et conclusions

A. Généralités

Selon le paragraphe 24(a) des Dispositions, l’expert statue sur la demande en se fondant sur les allégués des deux parties et les documents écrits déposés. Selon le paragraphe 24(c), l’expert fait droit à la demande lorsque l’enregistrement ou l’utilisation du nom de domaine constitue clairement une infraction à un droit attaché à un signe distinctif attribué au requérant selon le droit de la Suisse ou du Liechtenstein. Selon le paragraphe 24(d), on est en présence d’une telle infraction notamment lorsque:

“(i) aussi bien l’existence du droit attaché à un signe distinctif invoqué que son infraction résultent clairement du texte de la loi ou d’une interprétation reconnue de la loi et des faits exposés, et qu’ils ont été prouvés par les moyens de preuve déposés; et que

(ii) la partie adverse n’a pas exposé et prouvé des raisons de défense importantes de manière concluante; et que

(iii) l’infraction, selon la demande en justice formulée, justifie le transfert ou l’extinction du nom de domaine.”

Il en découle notamment, et il convient de souligner à titre préliminaire, que le droit suisse est applicable et que les critères matériels de la procédure UDRP ne sont pas applicables à la présente procédure, raison pour laquelle toutes références des parties à l’UDRP ou à la jurisprudence rendue sous l’UDRP ne sont pas toujours pertinentes (cf. Nicole Beranek Zanon, Streitbeilegungsdienst für «.ch» und «.li» Domain-Namen ab dem 1. März 2004, in : Jusletter 23. Februar 2004, N 13). Toutefois, dans certains cas les experts se sont inspirés de la jurisprudence UDRP pour rendre leur décision (voir notamment, Attilio Meyer AG v. Claro. S.C.R.L., Helen Nana-Bonilla, Litige OMPI No. DCH2008-0030).

B. Le Requérant a-t-il un droit attaché à un signe distinctif selon le droit de la Suisse ou du Liechtenstein?

Le demande du Requérant est basée sur sa marque internationale combinée APRIL (IR 1065229). Cette marque a été enregistrée en septembre 2010 et revendique entre autre des services d’assurance en classe 36. Elle désigne notamment la Suisse. Selon l’article 46 al. 1 de la LPM, l’enregistrement international prévoyant une protection en Suisse déploie les mêmes effets que le dépôt effectué auprès de l’institut et l’inscription au registre suisse. Par conséquent, le Requérant est titulaire d’une marque protégée en Suisse, de sorte que la première condition du paragraphe 24(d) des Dispositions est remplie.

C. L’enregistrement ou l’utilisation du nom de domaine constitue-t-il clairement une infraction à un droit attaché à un signe distinctif attribué au Requérant selon le droit de la Suisse ou du Liechtenstein?

La question de savoir si la marque du Requérant est violée dépend de l’existence d’un risque de confusion entre sa marque APRIL et les noms de domaine litigieux (selon l’article 3 al. 1 de la LPM). Il existe un risque de confusion si les signes en question sont identiques ou similaires et sont utilisés pour des produits ou services identiques ou similaires.

La similitude entre la marque APRIL du Requérant et les noms de domaine litigieux <aprilcaution.ch>, <april-garantie.ch>, <aprilgarantie.ch>, <aprilgarantiedeloyer.ch>, <april-kaution.ch>, <aprilkaution.ch>, <april-mietkaution.ch>, <aprilmietkaution.ch>, <caution-april.ch>, <cautionapril.ch>, <garantie-april.ch>, <garantieapril.ch>, <garantiedeloyerapril.ch>, <mietkaution-april.ch> et <mietkautionapril.ch> est évidente pour cet Expert, car ceux-ci comprennent intégralement l’élément verbal de la marque du Requérant APRIL, qui est l’élément distinctif de celle-ci et qui possède au moins une force distinctive moyenne. Les autres éléments des noms de domaine litigieux sont purement descriptifs, à savoir “garantie”, “garantiedeloyer”, “Kaution” et ”Mietkaution”. Et comme le Requérant le relève à juste titre, ces termes sont descriptifs dans le contexte de services d’assurance, plus précisément de services d’assurance en rapport avec des garanties de loyer, que les deux parties proposent au public. L’argument du Défendeur selon lequel l’élément “caution” serait exclusivement lié à Swisscaution SA et à son exploitation tombe à faux. En effet, il s’agit là d’un terme qui tombe dans le domaine public et qui ne saurait, à lui tout seul, être monopolisé par le Défendeur en rapport avec des services d’assurance. Aussi, les éléments génériques ne créent pas une distance suffisante entre les noms de domaine en question et la marque du Requérant.

La condition de la similitude entre les signes est donc remplie.

Contrairement à ce qu’allègue le Requérant, pour qu’il y ait infraction de la LPM, il faut en outre que le signe distinctif du Défendeur soit utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services revendiqués par la marque du Requérant (principe de spécialité). Or, dans cette procédure, le Requérant admet qu’un tel usage n’a pas lieu de la part du Défendeur, car l’Internaute, en tapant n’importe lequel des noms de domaine litigieux dans son browser, est redirigé sur la page Internet du service d’enregistrement de noms de domaine GANDI et pas sur des pages proposant des services d’assurance. En d’autres termes, aucun service d’assurance ou autre service revendiqué par la marque du Requérant n’est offert sous ces noms de domaine. Le seul enregistrement, respectivement la seule titularité d’un nom de domaine inactif, ne constitue pas un usage, et partant une infraction, au sens de la LPM (Joller, in Bettinger, Handbuch des Domainrechts, Köln/München 2008, p. 948, avec références à la jurisprudence). Si l’on considère que des pages parking sont des noms de domaine “inactifs” il y a lieu d’appliquer cette jurisprudence. En d’autres termes, en enregistrant les noms de domaine litigieux sans en faire un usage pour des services identiques ou similaires à ceux revendiqués par la marque du Requérant, le Défendeur ne commet aucune infraction de la LPM selon le droit suisse.

Aucune infraction de la LPM n’étant réalisée, il convient d’examiner si le comportement du Défendeur est constitutif de concurrence déloyale.

Le Requérant a produit un listing de Domaintools démontrant qu’outre les noms de domaine litigieux, le Défendeur avait enregistré 32 noms de domaine dans les extensions génériques “.com” et “.net” combinant la marque APRIL avec un élément générique. Ces noms de domaine ont été transféré au Requérant récemment, suite à la décision rendue sous l’UDRP (voir April S.A contre Yann Guyonvarc’h, SC Swisscaution S.A., Litige OMPI No. D2014-0685). Il ressort également du listing susmentionné que le Requérant n’est pas seul concerné par ce comportement, mais que le Défendeur a enregistré de nombreux noms de domaine suivant le schéma “marque d’une société d’assurance tierce” + “élément générique”. En outre, le Requérant a produit un jugement du Tribunal administratif fédéral (“TAF”) du 22 juillet 2014, selon lequel il existe un risque de confusion entre la marque prioritaire APRIL du Requérant et la marque APIL – Assurance Pour Impayés de Loyer du Défendeur. En conséquence, le TAF a chargé l’IPI de radier la marque susmentionnée du Défendeur.

Le Requérant allègue en substance que le comportement du Défendeur (i) poursuit l’objectif de le priver d’actifs numériques qui pourraient contribuer à lui permettre de développer ses activités sur le territoire suisse et de perturber ainsi ses opérations commerciales, (ii) induit les Internautes trouvant les noms de domaine litigieux inactifs à penser que le Requérant n’exploite plus ses portails Internet ou que ses sites Internet rencontrent des problèmes, par example qu’ils sont piratés ou présentent des virus.

Selon l’article 2 de la Loi Fédérale contre la concurrence déloyale (“LCD”), est déloyal et illicite tout comportement ou pratique commercial qui est trompeur ou qui contrevient de toute autre manière aux règles de la bonne foi et qui influe sur les rapports entre concurrents ou entre fournisseurs et clients.

Selon la doctrine suisse, l’enregistrement de noms de domaine incorporant la marque d’un tiers peut constituer une entrave déloyale, la décision pouvant être basée sur des éléments objectifs et/ou subjectifs. Le Requérant possède le nom de domaine <april.ch> et n’est donc pas empêchée de déployer ses activités sur le marché suisse en utilisant un nom de domaine sous l’extension générique “.ch”. Cela étant, il serait parfaitement légitime que le Requérant souhaite exploiter d’autres noms de domaine, par exemple les noms de domaine litigieux, notamment pour augmenter sa visibilité sur Internet. De plus, le fait de l’enregistrement inactif des noms de domaine litigieux pourrait envoyer un signal erroné et indésirable aux Internautes et constitue pour le moins une gêne. Objectivement, selon l’expert, il existe donc une entrave à la concurrence, même si elle ne saurait être qualifiée de grave. Cela étant, l’importance de l’entrave objective est moindre lorsque l’intention (subjective) d’entraver le titulaire de la marque dans ses activités commerciales est manifeste, ce qui est notamment le cas lorsque l’enregistrement des noms de domaine a lieu sans motif digne de protection et visiblement au détriment d’un tiers (Tribunal du commerce de Zurich eu 18 décembre 2001, “volvo-ankauf.ch”, ZR 101 (2002), 51). L’enregistrement d’une multitude de noms de domaine incorporant la marque d’un tiers est un indice clair pour cet expert de l’intention d’entraver son concurrent (Joller, op. cit., p. 944; Buri, Die Verwechselbarkeit von Internet Domain Names, Berne 2000, p. 146).

En l’occurrence, l’inscription de 47 noms de domaine incorporant la marque APRIL par le Défendeur constitue un tel indice pour cet expert. De plus, le Défendeur admet ouvertement dans sa réponse qu’il agit dans un but de nuire, en indiquant qu’il a enregistré les noms de domaine litigieux dans un but défensif, à savoir pour éviter qu’un prétendu plagiat ne soit diffusé, et non pas pour une activité commerciale légitime.

Le comportement du Défendeur est donc constitutif de concurrence déloyale en vertu de l’article 2 de la LCD.

Par conséquent, l’enregistrement des noms de domaine litigieux constitue clairement une infraction à un droit attaché à un signe distinctif attribué au Requérant selon le droit suisse. La condition du paragraphe 24(d)(i) est donc remplie.

D. Arguments de défense du Défendeur

Les grandes lignes des griefs du Défendeur sont décrits dans sa lettre au Requérant daté du 20 février 2014. Il s’agirait selon lui de défense légitime contre des actes déloyaux du Requérant, en attendant qu’un tribunal suisse prononce des mesures à l’encontre du Requérant.

Les noms de domaine litigieux ont été enregistrés par le Défendeur entre décembre 2013 et janvier 2014. Partant, si le Défendeur était victime de comportements déloyaux de la part du Requérant, comme il le prétend, il aurait normalement pu et dû obtenir dans l’intervalle des mesures provisionnelles contre le Requérant, remplaçant ainsi les mesures de légitime défense. N’ayant manifestement introduit aucune procédure de mesures provisionnelles, le Défendeur ne peut (plus) invoquer la légitime défense.

De toute manière, l’argument de la légitime défense n’est pas justifié, car il ne couvre que des actes qui sont nécessaires pour repousser une agression (BSK- Heierli/Schnyder, 5ème éd., Bâle 2011, Art. 52 CO N 1). Or, l’agression décrite par le Défendeur ne saurait être repoussée par l’enregistrement de noms de domaine incorporant la marque du Requérant. Au contraire, s’il y a réellement une agression du Requérant, la réaction du Défendeur n’est pas une défense, mais plutôt une contre-attaque entraînant une escalade du litige.

Quant à la procédure initiée par le Défendeur devant le Tribunal d’arrondissement de Lausanne en juin 2014, la convocation versée au dossier par le Défendeur ne permet pas de deviner l’objet du litige. Le fait qu’il s’agit d’une citation pour une audience de conciliation permet néanmoins de constater qu’il ne s’agit pas d’une procédure de mesures provisionnelles, la procédure de conciliation n’ayant pas lieu en procédure sommaire (article 198 lit. a CPC).

Enfin et surtout, dans la mesure où la défense du Défendeur se résume à l’exception dite “unclean hands”, c’est-à-dire au reproche que le Requérant lui-même agit de manière déloyale, il convient de souligner que cette exception n’est pas admise en droit suisse de la concurrence déloyale (Jung, in Jung/Spitz (éd.), Bundesgesetz gegen den unlauteren Wettbewerb, Bern 2010, Art. 2 N 124).

Les arguments du Défendeur ne sont donc ni justifiés ni concluants au vu du paragraphe 24(d)(ii) des Dispositions.

E. Transfert des noms de domaine

Selon paragraphe 24(d)(iii) des Dispositions, l’infraction doit justifier le transfert ou l’extinction du nom de domaine. Dans une décision du 25 juin 2002 concernant un comportement constitutif de concurrence déloyale en vertu de l’article 2 de la LCD, le Tribunal de commerce de St. Gall a constaté que l’article 9 lit. b de la LCD permet d’ordonner non seulement la radiation du nom de domaine litigieux, mais aussi son transfert (HG St. Gallen vom 25. Juni 2002, „breco.ch”, in sic! 2003, 348 ff.).

L’infraction réalisée selon le droit suisse en l’occurrence justifie en conséquence le transfert des noms de domaine litigieux.

Conformément au paragraphe 10(a) des Dispositions (et en vue du document transmis par le Défendeur le 10 septembre 2014), l’expert souligne que la présente décision n’empêche pas les parties de soumettre le litige à un tribunal compétent pour obtenir une décision indépendante.

7. Décision

Pour les raisons énoncées ci-dessus, et conformément au paragraphe 24 des Dispositions, l’expert ordonne le transfert des noms de domaine <aprilcaution.ch>, <april-garantie.ch>, <aprilgarantie.ch>, <aprilgarantiedeloyer.ch>, <april-kaution.ch>, <aprilkaution.ch>, <april-mietkaution.ch>, <aprilmietkaution.ch>, <caution-april.ch>, <cautionapril.ch>, <garantie-april.ch>, <garantieapril.ch>, <garantiedeloyerapril.ch>, <mietkaution-april.ch> et <mietkautionapril.ch> au profit du Requérant.

Lorenz Ehrler
Expert
Le 3 septembre 2014