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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE

Blue Mind contre Adam Grunwerg

Litige No. D2021-0044

1. Les parties

La Requérante est Blue Mind SAS, France, représentée par SELAS Morvilliers Sentenac & Associes, France.

Le Défendeur est Adam Grunwerg, Royaume-Uni.

2. Nom de domaine et unité d’enregistrement

Le nom de domaine litigieux <laveritesurbluemind.net> est enregistré auprès de Slow Putt Domains LLC (ci-après désigné “l’Unité d’enregistrement”).

3. Rappel de la procédure

Une plainte a été déposée en français par la Requérante auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 7 janvier 2021. Le même jour, le Centre a adressé une requête à l’Unité d’enregistrement aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par la Requérante. Le 8 janvier 2021, l’Unité d’enregistrement a transmis sa vérification au Centre révélant l’identité du titulaire du nom de domaine litigieux et ses coordonnées, différentes du nom du Défendeur et des coordonnées désignés dans la plainte. Le 11 janvier 2021, le Centre a envoyé un courrier électronique à la Requérante avec les données relatives au titulaire du nom de domaine litigieux telles que communiquées par l’Unité d’enregistrement et invitant la Requérante à soumettre un amendement à la plainte ou une plainte amendée. Le même jour, le Centre a envoyé une communication par courriel en français et en anglais concernant la langue de la procédure. La Requérante a répondu en demandant que le français soit la langue de la procédure; le Défendeur n’a pas fait de commentaires. La Requérante a déposé un amendement à la plainte le 18 janvier 2021. Le 18 janvier 2021, le Centre a reçu une communication informelle de la part d’une personne qui a une adresse email dont l’adresse du serveur est identique à celle du Défendeur

Le Centre a vérifié que la plainte et l’amendement à la plainte soient conformes aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés “Principes directeurs”), aux Règles d’application des Principes directeurs (ci-après dénommées les “Règles d’application”), et aux Règles supplémentaires de l’OMPI (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”) pour l’application des Principes directeurs précités.

Conformément aux paragraphes 2 et 4 des Règles d’application, le 19 janvier 2021, une notification de la plainte et de l’amendement de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée en anglais et en français au Défendeur. Conformément au paragraphe 5 des Règles d’application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 8 février 2021. Le Défendeur n’a pas soumis de réponse formelle. Toutefois, le 26 janvier 2021 et le 12 février 2021, le Centre a reçu deux communications informelles de la part de la même personne visée au-dessus.

En date du 16 février 2021, le Centre nommait Matthew Kennedy comme expert dans le présent litige. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d’application.

4. Les faits

La Requérante est une société française qui a pour activité l’édition de logiciels et la fourniture de services informatiques dans le secteur du logiciel libre ou Open source. La Requérante est titulaire de plusieurs marques dont la marque internationale verbale BLUE MIND enregistrée le 13 novembre 2013 sous No. 1208921, sous priorité de la marque française No. 4019804 du 15 juillet 2013, pour identifier des produits et services dans les classes 9, 35, 38, 41 et 42. Cet enregistrement est en vigueur. La Requérante a aussi enregistré le nom de domaine <bluemind.net> qu’elle utilise avec un site qui présente sa société et ses services.

Le Défendeur est un individu.

Le nom de domaine litigieux a été enregistré le 13 novembre 2020. Une page Web archivée accessible dans la bibliothèque numérique d’Internet Archive fait état qu’au 1er décembre 2020 le nom de domaine litigieux conduisait à un site en français consacré aux multiples facettes d’un conflit commercial entre concurrents opposant la société Linagora et la Requérante. 1 Les propos cités sur l’onglet d’accueil du site accusaient la Requérante de contrefaçon, entre autres, et proposait des services de logiciels concurrents. A la date de cette Décision, le nom de domaine litigieux conduit à un nouveau blog en anglais intitulé “La Verité sur Blue Mind” qui porterait sur des technologies innovatrices.

Selon les preuves présentées par la Requérante, le nom de domaine et le site qui lui correspondait, ont fait l’objet de procédures judiciaires en France. Par un jugement du 29 janvier 2019, le tribunal correctionnel de Toulouse a déclaré Monsieur Zapolsky coupable de faits de diffamation commis à l’encontre de la Requérante; les faits retenus comprenaient des propos cités sur l’onglet d’accueil d’un site accessible à l’adresse “www.laveritesurbluemind.net”dont M. Zapolsky était directeur de publication, visant la contrefaçon par la Requérante d’un logiciel et d’autres accusations. Par arrêt du 8 janvier 2020, la cour d’appel de Toulouse a confirmé ce jugement. Par un jugement du 21 juillet 2020, le tribunal judiciaire de Bordeaux a dit que la société Linagora, dont M. Zapolsky est le fondateur et le président, et une filiale, se sont rendus coupables de concurrence déloyale par dénigrement et détournement de dénomination sociale à l’encontre de la Requérante, et a ordonné la radiation de plusieurs noms de domaine, dont <laveritesurbluemind.net>.

5. Argumentation des parties

A. Requérante

Le nom de domaine litigieux est semblable aux marques BLUE MIND de la Requérante au point de prêter à confusion pour les personnes se connectant à ce nom de domaine, d’autant que le contenu a été entièrement rédigé par la société Linagora, concurrente de la Requérante qui a déjà été condamnée pour détournement de dénomination sociale. La confusion avec les produits et services est d’autant plus renforcée que le nom de domaine officiel de la Requérante est <bluemind.net>.

Le Défendeur n’a aucun droit sur le nom de domaine litigieux ni aucun intérêt légitime qui s’y attache. D’autant que par un jugement du 21 juillet 2020 du tribunal judiciaire de Bordeaux, le précédent titulaire identifié du même nom de domaine ainsi que des noms de domaine génériques, qui était alors la société Linagora, a été condamné pour détournement de dénomination sociale de la Requérante et a eu l’obligation de radier lesdits noms de domaine. L’enregistrement du nom de domaine litigieux effectué le 13 novembre 2020 intervient donc dans un contexte particulier qui a déjà été sanctionné par une juridiction sur un autre fondement. Seule la Requérante est titulaire des droits sur la dénomination “bluemind”. L’usage qui en est fait n’est couvert par aucun intérêt légitime, le contenu du site disponible sur ce nom de domaine ayant été jugé par ailleurs diffamatoire par un arrêt de la cour d’appel de Toulouse du 8 janvier 2020. La Requérante ignorait l’existence du Défendeur.

Le nom de domaine a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi. Le fait que les coordonnées du titulaire soient rendues anonymes démontre à lui seul la mauvaise foi de ce dernier qui cherche tant bien que mal à échapper à ses responsabilités. Le nom de domaine a été acquis uniquement dans le but de diffuser un contenu, déjà jugé diffamatoire, à l’encontre de la Requérante, et ce uniquement en vue de lui nuire et de perturber ainsi les opérations commerciales de la Requérante. En pointant du doigt son concurrent, Linagora cherche à récupérer les clients de la Requérante en jetant le discrédit sur la Requérante d’autant que le nom de domaine officiel de la Requérante est <bluemind.net>.

B. Défendeur

Le Défendeur n’a pas présenté de réponse formelle. Toutefois, le Centre a reçu trois communications informelles de la part d’une personne qui a une adresse email dont l’adresse du serveur est identique à celle du Défendeur, soutenant que le nom de domaine litigieux semblait déjà avoir été supprimé de leur compte et qu’ils ne possédaient, ni ne contrôlaient, le nom de domaine litigieux.

6. Discussion et conclusions

6.1. A titre préliminaire

A. Identité du Défendeur

Le paragraphe 1 des Règles d’application prévoit que le Défendeur est “le titulaire de l’enregistrement d’un nom de domaine contre lequel une plainte est introduite”. Lorsqu’elle a vérifié les coordonnées du titulaire du nom de domaine, l’Unité d’enregistrement a constaté que le nom de domaine litigieux avait pour titulaire Adam Grunwerg. Par la suite, la Requérante a apporté un amendement à sa plainte pour que ce dernier soit poursuivi dans le cadre de la présente procédure.

M. Grunwerg n’a pas fait de commentaire.

Compte tenu de ces circonstances, selon le paragraphe 1 des Règles d’application, la Commission administrative constate que le Défendeur dans cette procédure est Adam Grunwerg.

B. Langue de la procédure

Le paragraphe 11(a) des Règles d’application prévoit que, sauf convention contraire entre les parties, la langue de la procédure est la langue du contrat d’enregistrement. Toutefois, la Commission administrative peut décider qu’il en sera autrement, compte tenu des circonstances de la procédure administrative. En l’espèce, l’Unité d’enregistrement a informé le Centre que la langue du contrat d’enregistrement était l’anglais.

La Requérante demande que la procédure se déroule dans la langue française. A l’appui de sa demande, la Requérante soutient que (i) la Requérante est une société française domiciliée en France; (ii) le Défendeur est un prête-nom pour une société française domiciliée en France; (iii) le nom de domaine litigieux est accessible sur le territoire français; (iv) le contenu du site disponible sur le nom de domaine litigieux est rédigé entièrement en français; (v) le contenu du site a été jugé précédemment diffamatoire par une juridiction française; et (vi) le précédent titulaire du site était une société française qui a été condamnée par une juridiction française à supprimer le nom de domaine litigieux.

Les paragraphes 10(b) et (c) des Règles d’application disposent que la Commission administrative doit veiller à ce que les parties soient traitées de façon égale, à ce que chacune ait une possibilité équitable de faire valoir ses arguments, et à ce que la procédure soit conduite avec célérité. Selon une jurisprudence constante UDRP, le choix de la langue de la procédure ne doit pas créer une charge excessive pour les parties. Voir, par exemple, Solvay S.A. c. Hyun-Jun Shin, Litige OMPI No. D2006-0593; Whirlpool Corporation, Whirlpool Properties, Inc. c. Hui’erpu (HK) electrical appliance co. ltd., Litige OMPI No. D2008-0293.

La Commission administrative remarque que la plainte et l’amendement à la plainte ont été déposés en français. Le nom de domaine litigieux a conduit à un site rédigé en français, ce qui laisse supposer que le Défendeur comprend cette langue. Le Défendeur n’a manifesté aucun souhait à apporter des commentaires sur la langue de la procédure ni à répondre aux arguments de la Requérante, à part des communications informelles en anglais envoyées de la part d’un responsable de sa société niant que le nom de domaine litigieux leur appartienne. Dans ces circonstances, la Commission administrative estime qu’exiger la traduction de la plainte et l’amendement de la plainte créerait une charge excessive pour la Requérante et un délai injustifié dans la procédure.

Compte tenu de ces circonstances, selon le paragraphe 11(a) des Règles d’application la Commission administrative décide que la langue de cette procédure est le français. Toutefois, la Commission administrative acceptera toutes les communications présentées par les Parties dans leur version originale sans traduction.

C. Incidence de procédures judiciaires

Le paragraphe 18 des Règles d’application vise les procédures judiciaires engagées avant ou pendant la procédure administrative concernant le litige sur le nom de domaine qui fait l’objet de la plainte. Sur les procédures judiciaires en France concernant l’usage d’un nom de domaine <laveritesurbluemind.net>, la Commission administrative renvoie aux développements des Sections 4 et 5 de la présente Décision.

La Commission administrative constate que l’objet des procédures judiciaires était le nom de domaine litigieux mais le titulaire du nom de domaine était auparavant la société Linagora et dont le tribunal judiciaire de Bordeaux a ordonné la radiation le 21 juillet 2020. De ces observations, et du nouvel enregistrement du nom de domaine le 13 novembre 2020, il ressort que le paragraphe 18 des Règles d’application permet à la Commission administrative de rendre une décision en vertu des Principes directeurs. Cette décision UDRP ne lie pas les juridictions françaises. Toutefois, les faits retenus dans ces jugements peuvent être pertinents aux déterminations de la Commission administrative qui dans tous les cas devra fonder sa décision sur les Principes UDRP et non sur les jugements nationaux.

6.2. Sur le fond

Conformément au paragraphe 4(a) des Principes directeurs, la Commission administrative doit déterminer si sont réunies les trois conditions posées par celui-ci, à savoir:

i) si le nom de domaine est identique ou semblable au point de prêter à confusion, à une marque de produits ou de services sur laquelle la Requérante a des droits; et

ii) si le Défendeur n’a pas un droit ou un intérêt légitime à l’utilisation du nom de domaine; et

iii) si le Défendeur a enregistré et utilise le nom de domaine de mauvaise foi.

En outre, il revient à la Requérante d’apporter la preuve que les trois conditions précédemment énoncées sont cumulativement réunies.

A. Identité ou similitude prêtant à confusion

Au vu des éléments de preuve présentés, il est établi que la Requérante est titulaire de la marque verbale BLUE MIND.

Le nom de domaine litigieux reproduit intégralement la marque de la Requérante, avec l’adjonction des termes “la vérité sur” (sans espaces entre les mots pour des raisons techniques). Des décisions de précédentes commissions administratives ont déjà et à plusieurs reprises pu retenir que l’adjonction d’autres termes à la marque d’un requérant ne suffit pas à écarter un risque de confusion lorsque la marque est reconnaissable dans le nom de domaine. Voir la Synthèse de l’OMPI, version 3.0, section 1.8. En l’espèce, la marque BLUE MIND est parfaitement reconnaissable dans le nom de domaine litigieux.

La Commission administrative estime que l’ajout de l’extension générique de premier niveau “.net” au nom de domaine litigieux ne constitue pas un élément de nature à éviter une similitude pouvant prêter à confusion aux fins des Principes directeurs. Voir la Synthèse de l’OMPI, version 3.0, section 1.11.

Pour ces raisons, la Commission administrative retient que le nom de domaine litigieux est semblable, au point de prêter à confusion, à la marque BLUE MIND de la Requérante. Par conséquent, la Commission administrative considère que la première condition posée par le paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs est remplie.

B. Droits ou intérêts légitimes

Le paragraphe 4(c) des Principes directeurs dispose que la preuve des droits du défendeur sur le nom de domaine litigieux ou de son intérêt légitime qui s’y attache aux fins du paragraphe 4(a)(ii) peut être constituée, en particulier, par l’une des circonstances ci-après:

“i) avant d’avoir eu connaissance du litige, [le défendeur a] utilisé le nom de domaine ou un nom correspondant au nom de domaine en relation avec une offre de bonne foi de produits ou de services, ou fait des préparatifs sérieux à cet effet;

ii) [le défendeur est] connu sous le nom de domaine considéré, même sans avoir acquis de droits sur une marque de produits ou de services; ou

iii) [le défendeur fait] un usage non commercial légitime ou un usage loyal du nom de domaine sans intention de détourner à des fins lucratives les consommateurs en créant une confusion ni de ternir la marque de produits ou de services en cause.”

En ce qui concerne la première et troisième circonstances énoncées ci-dessus, d’après les recherches effectuées par la Commission administrative le nom de domaine litigieux enregistré le 13 novembre 2020 conduisait le 1er décembre 2020 à un site où la société Linagora publiait des propos à l’encontre de la Requérante. Ce contenu, similaire au contenu qui avait fait l’objet d’une procédure judicaire en France avait été jugé diffamatoire par les juridictions françaises.

Au regard des principes UDRP, et notamment du paragraphe 4(c (iii), le Défendeur peut avoir un intérêt légitime à utiliser un nom de domaine à des fins de liberté d’expression et de critiquer les services du Requérant à condition que cette critique soit authentique et dépourvue d’intérêts commerciales. Or il est établi que le Requérant et la société Linagora sont concurrentes.

De plus, le nom de domaine litigieux reproduit intégralement la marque de la Requérante, qui déclare qu’elle ignorait l’existence du Défendeur, ce qui indique que le Défendeur ne dispose d’aucune autorisation ou licence de la Requérante d’utiliser sa marque.

En ce qui concerne la deuxième circonstance énoncée ci-dessus, le nom du Défendeur est Adam Grunwerg. Rien dans le dossier indique que le Défendeur soit connu sous le nom de domaine litigieux.

La Commission note qu’à la date de cette Décision, le nom de domaine litigieux conduit à un nouveau site en anglais intitulé “La verite sur Blue Mind” qui porterait sur des technologies innovatrices. Toutefois ce nouveau contenu en anglais n’explique pas en quoi le Défendeur a besoin d’utiliser l’expression « La verite sur Blue Mind » pour offrir ses services. Le site propose en anglais « 5 Fastest Growing Technologies in the World ». Ces éléments ne permettent pas de constituer un intérêt légitime sur le nom de domaine pour le Défendeur.

En résumé, la Commission administrative considère que la Requérante a établi une preuve prima facie que le Défendeur n’a pas un droit ou un intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux. Le Défendeur n’a pas réfuté cette preuve prima facie parce qu’il n’a pas allégué un tel droit ou un tel intérêt légitime.

Par conséquent, la Commission administrative considère que la deuxième condition posée par le paragraphe 4(a)(ii) des Principes directeurs est remplie.

C. Enregistrement et usage de mauvaise foi

Le paragraphe 4(b) des Principes directeurs dispose que la preuve de ce que le nom de domaine litigieux a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi peut être constituée aux fins du paragraphe 4(a)(iii), en particulier, dans certains cas de figure, dont le troisième est le suivant:

“iii) [le défendeur a] enregistré le nom de domaine essentiellement en vue de perturber les opérations commerciales d’un concurrent; ”

L’Unité d’enregistrement a confirmé que le nom de domaine litigieux a été enregistré en novembre 2020, ce qui est postérieur à l’enregistrement de la marque BLUE MIND de la Requérante. Le nom de domaine litigieux reproduit intégralement la marque BLUE MIND. En décembre 2020, le nom de domaine litigieux a conduit à un site qui publiait des accusations à l’encontre de la Requérante. Le Défendeur ne donne aucune explication de son choix du nom de domaine litigieux. Compte tenu de ces circonstances, la Commission administrative a lieu de constater que le Défendeur avait connaissance de la Requérante et visait la marque de la Requérante au moment d’enregistrer le nom de domaine litigieux.

Le nom de domaine litigieux a conduit à un site où la société Linagora publiait des propos à l’encontre de la Requérante jugés diffamatoires dans une procédure judiciaire en France. Le site était consacré entièrement au différend opposant la Requérante et un concurrent commercial, et “lançait un appel à la mobilisation de tous les acteurs de l’écosystème de logiciel libre pour que les agissements frauduleux [de la Requérante] soient révélés à ses clients mais surtout à la Communauté du logiciel libre”. Au vu de cette circonstance, la Commission administrative considère que le Défendeur a enregistré le nom de domaine litigieux essentiellement en vue de perturber les opérations commerciales de la Requérante. Bien que le Défendeur lui-même ne soit pas un concurrent commercial direct de la Requérante, la publication de ces propos après Novembre 2020 sur un site correspondant au nom de domaine litigieux démontre que le Défendeur agissait en opposition à la Requérante, ce qui constitue un concurrent au sens large de ce terme dans le paragraphe 4(b)(iii) des Principes directeurs. Voir la Synthèse de l’OMPI, version 3.0, section 3.1.3 et, par exemple, The Toronto-Dominion Bank c. Boris Karpachev, Litige OMPI No. D2000-1571.

La Commission administrative observe que l’usage du nom de domaine litigieux a changé pendant cette procédure administrative et qu’il conduit désormais à un nouveau blog en anglais. Bien que le titre de ce nouveau blog reprenne la phrase dans le nom de domaine litigieux, à savoir “La Vérité sur Blue Mind”, son contenu ne correspond pas à ce titre. Rien sur le site n’expliquerait le choix du titre ni, par conséquent, le choix du nom de domaine litigieux. Le nouveau blog semblerait être plutôt une tentative de dissimuler le véritable objectif de son enregistrement. Au vu de ces circonstances, la modification récente dans l’usage du nom de domaine litigieux constitue une preuve de l’utilisation de mauvaise foi.

Au vu de l’ensemble des circonstances, la Commission administrative considère que le Défendeur a enregistré le nom de domaine essentiellement en vue de perturber les opérations commerciales d’un concurrent, conforme au paragraphe 4(b)(iii) des Principes directeurs.

Par conséquent, la Commission administrative considère que la troisième condition posée par le paragraphe 4(a)(iii) des Principes directeurs est remplie.

7. Décision

Pour les raisons exposées ci-dessus, et conformément aux paragraphes 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d’application, la Commission administrative ordonne que le nom de domaine litigieux <laveritesurbluemind.net> soit transféré à la Requérante.

Matthew Kennedy
Expert Unique
Le 23 février 2021


1 La Commission administrative a consulté les sites web d’Internet Archive (www.archive.org) dans l’exercice de sa capacité à réaliser certaines recherches indépendantes et impartiales (voir en ce sens la Synthèse des avis des commissions administratives de l’OMPI sur certaines questions relatives aux Principes directeurs, troisième édition (Synthèse de l’OMPI, version 3.0), section 4.8).