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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE

Carrefour contre Phil Jack

Litige No. D2020-0892

1. Les parties

Le Requérant est Carrefour, France, représenté par IP Twins S.A.S., France.

Le Défendeur est Phil Jack, Côte d'Ivoire.

2. Nom de domaine et unité d’enregistrement

Le nom de domaine litigieux <groupecarrefour.net> est enregistré auprès de Ligne Web Services SARL (ci-après désigné “l’Unité d’enregistrement”).

3. Rappel de la procédure

Une plainte a été déposée par Carrefour auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 10 avril 2020. En date du 14 avril 2020, le Centre a adressé une requête à l’Unité d’enregistrement aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Le 15 avril 2020, l’Unité d’enregistrement a transmis sa vérification au Centre révélant l’identité du titulaire du nom de domaine litigieux et ses coordonnées, différentes du nom du Défendeur et des coordonnées désignés dans la plainte. Le 20 avril 2020, le Centre a envoyé un courrier électronique au Requérant avec les données relatives au titulaire du nom de domaine litigieux telles que communiquées par l’Unité d’enregistrement et invitant le Requérant à soumettre un amendement à la plainte. Le Requérant a déposé une plainte amendée le 24 avril 2020. En date du 8 mai 2020, le Centre a envoyé un courrier électronique au Requérant lui demandant de clarifier les mesures de réparation demandées. Le Requérant a déposé une plainte amendée le 11 mai 2020.

Le Centre a vérifié que la plainte et la plainte amendée répondaient bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés “Principes directeurs”), aux Règles d’application des Principes directeurs (ci-après dénommées les “Règles d’application”), et aux Règles supplémentaires de l’OMPI (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”) pour l’application des Principes directeurs précités.

Conformément aux paragraphes 2 et 4 des Règles d’application, le 12 mai 2020, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur. Conformément au paragraphe 5 des Règles d’application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 1 juin 2020. Le Défendeur n’a fait parvenir aucune réponse. En date du 2 juin 2020, le Centre notifiait le défaut du Défendeur.

En date du 9 juin 2020, le Centre nommait Anne-Virginie La Spada comme expert dans le présent litige. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d’application.

4. Les faits

Le Requérant est une société multinationale française active dans la grande distribution, avec un chiffre d’affaires d’EUR 76 milliards en 2018. Il dispose de 12.000 magasins dans plus de 30 pays. Il est listé à la bourse de Paris.

Le Requérant est titulaire de nombreux droits de marques pour la dénomination “carrefour” dans le monde entier. Le Requérant est notamment titulaire des enregistrements CARREFOUR suivants :

- Marque de l’Union Européenne numéro 005178371 enregistrée le 30 août 2007 et dûment renouvelée en classes 9, 35 et 38;

- Marque de l’Union Européenne numéro 008779498 enregistrée le 13 juillet 2010 en classe 35;

- Marque internationale numéro 353849 enregistrée le 28 février 1969 et dûment renouvelée en classes 35 à 42;

- Marque internationale numéro 351147 enregistrée le 2 octobre 1968 et dûment renouvelée en classes 1 à 34.

Plusieurs décisions rendues dans le cadre de la procédure UDRP ont reconnu le caractère notoire de la marque CARREFOUR.

Le Requérant exploite notamment le nom de domaine <carrefour.com>.

Le Requérant est parfois désigné sous le nom de “groupe Carrefour”.

Le nom de domaine litigieux <groupecarrefour.net> a été enregistré le 9 mars 2020.

Il ne semble pas que le nom de domaine litigieux ait été connecté à un site web actif. Cependant, les informations techniques relatives au nom de domaine litigieux contiennent la désignation d’un serveur de messagerie électronique

5. Argumentation des parties

A. Requérant

Selon le Requérant, le nom de domaine litigieux reproduit à l’identique ses marques antérieures CARREFOUR. Il soutient que l’adjonction du terme “groupe” n’est pas de nature à diminuer le risque de confusion mais au contraire à l’accroître dans la mesure où le Requérant est souvent qualifié de “groupe”. Le Requérant soutient donc que le nom de domaine litigieux est donc semblable au point de créer une confusion à une marque sur laquelle le Requérant a des droits.

Le Requérant allègue que le Défendeur n’est pas communément connu par le nom de domaine litigieux et qu’il ne détient aucun droit de marque sur la dénomination CARREFOUR. Le Requérant n’a aucune relation avec le Défendeur, et ne l’a pas autorisé à enregistrer ou utiliser le nom de domaine litigieux. A ce titre, le Requérant entend démontrer par une action rapide après l’enregistrement du nom de domaine litigieux qu’il ne souhaite pas autoriser l’usage de ses marques par le Défendeur. Enfin, le nom de domaine litigieux est inactif et le Défendeur ne démontre pas d’utilisation ou de préparation en vue d’utiliser le nom de domaine litigieux avec une offre de produit ou de service de bonne foi. Le Requérant en conclut que le Défendeur n’a pas de droits ou d’intérêts légitimes sur le nom de domaine litigieux.

Le Requérant estime que compte tenu de la renommée de sa marque et de l’antériorité de ses enregistrements, le Défendeur en avait connaissance au moment de l’enregistrement du nom de domaine litigieux et qu’il a volontairement fait le choix du nom du nom de domaine litigieux afin que les internautes recherchant des informations sur le Requérant soient dirigés vers le nom de domaine litigieux.

Par ailleurs, le Requérant affirme que le nom de domaine litigieux est utilisé en relation avec un service email, d’après les informations techniques disponibles au sujet du nom de domaine litigieux. Selon lui, l’envoi d’emails depuis une adresse reprenant le nom de domaine litigieux serait de nature à créer la confusion auprès des destinataires et le nom de domaine litigieux pourrait être utilisé pour des opérations d’hameçonnage par exemple.

Enfin d’après le Requérant, le Défendeur a sciemment indiqué de fausses informations dans les données Whois notamment dans la mesure où la rue indiquée n’existe pas dans la ville concernée, et ce dans le but de complexifier son identification par le Requérant.

Selon le Requérant, au vu de l’ensemble des faits, le Défendeur a enregistré et utilise le nom de domaine litigieux de mauvaise foi.

B. Défendeur

Le Défendeur n’a pas répondu aux arguments du Requérant.

6. Discussion et conclusions

Selon le paragraphe 4(a) des Principes directeurs, afin d’obtenir gain de cause dans cette procédure et obtenir le transfert du nom de domaine litigieux, le requérant doit prouver que chacun des trois éléments suivants est satisfait :

(i) le nom de domaine litigieux est identique ou semblable au point de prêter à confusion, à une marque de produits ou de services sur laquelle le requérant a des droits; et

(ii) le défendeur n’a aucun droit sur le nom de domaine litigieux ni aucun intérêt légitime qui s’y attache; et

(iii) le nom de domaine litigieux a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi.

A. Identité ou similitude prêtant à confusion

Le Requérant détient des droits sur la marque verbale CARREFOUR.

Le nom de domaine litigieux reproduit intégralement la marque CARREFOUR, avec l’adjonction du terme “groupe”.

Selon les décisions UDRP de précédentes commissions administratives, l’adjonction d’un terme descriptif à la marque du requérant ne suffit pas à écarter un risque de confusion lorsque la marque est reconnaissable dans le nom de domaine (voir la section 1.8 de la Synthèse des avis des commissions administratives de l’OMPI sur certaines questions relatives aux Principes UDRP, troisième édition (“Synthèse, version 3.0”), voir aussi DPD Dynamic Parcel Distribution GmbH & Co.KG. v. Vinod Vinod, Litige OMPI No. D2014-1808).

En l’espèce, la marque CARREFOUR du Requérant est parfaitement reconnaissable dans le nom de domaine litigieux. L’adjonction du terme “groupe” ne permet pas d’écarter le risque de confusion.

Enfin, l’extension “.net” n’a pas à être prise en considération dans l’examen de la similitude entre la marque et le nom de domaine (voir la section 1.11 de la Synthèse, version 3.0).

Par conséquent, conformément au paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs, la Commission administrative retient que le nom de domaine litigieux est semblable au point de prêter à confusion à la marque du Requérant.

B. Droits ou intérêts légitimes

Le Requérant affirme que le Défendeur n’a aucun droit sur le nom de domaine litigieux, ni d’intérêt légitime s’y rapportant.

Le Défendeur, qui a fait défaut, ne s’est pas prononcé.

Il n’existe aucune indication au dossier suggérant que le Défendeur aurait des droits ou des intérêts légitimes l’autorisant à utiliser le nom de domaine litigieux, ou qu’il serait connu sous le nom de domaine litigieux.

A teneur du paragraphe 14(b) des Règles d’application, la Commission administrative peut tirer les conséquences qu’elle juge appropriée du défaut du Défendeur. En l’espèce, la Commission administrative estime que le silence du Défendeur corrobore l’affirmation du Requérant selon laquelle le Défendeur n’a pas de droits ou d’intérêts légitimes sur le nom de domaine litigieux.

Par conséquent, la Commission administrative retient que le Requérant a démontré que le Défendeur n’a pas de droits sur le nom de domaine litigieux, ni d’intérêts légitimes s’y rapportant, conformément au paragraphe 4(a)(ii) des Principes directeurs.

C. Enregistrement et usage de mauvaise foi

Compte tenu du caractère notoire de la marque CARREFOUR, la Commission administrative estime hautement probable que le Défendeur avait connaissance de la marque du Requérant au moment où il a enregistré le nom de domaine litigieux. Par conséquent, il se justifie d’admettre que le nom de domaine litigieux a été enregistré de mauvaise foi.

Le Défendeur n’a apparemment pas utilisé le nom de domaine litigieux en connexion avec une page active. La détention passive d’un nom de domaine n’empêche pas la Commission administrative de conclure à une utilisation de mauvaise foi, selon les circonstances du cas particulier.

Les commissions administratives UDRP examinent l’ensemble des circonstances dans chaque cas, mais les facteurs qui ont été considérés comme pertinents dans l’application de la doctrine de la détention passive comprennent (i) le degré de caractère distinctif ou la réputation de la marque du requérant, (ii) l’absence de réponse du défendeur ou de preuve d’un usage réel ou envisagé de bonne foi, (iii) la dissimulation par le défendeur de son identité ou l’utilisation de fausses coordonnées (en violation de son contrat d’enregistrement), et (iv) l’invraisemblance de tout usage de bonne foi auquel le nom de domaine pourrait être soumis (section 3.3. de la Synthèse, version 3.0).

En l’espèce, la marque du Requérant est connue internationalement, et comme mentionné plus haut, la Commission administrative estime invraisemblable que le Défendeur ait choisi le nom de domaine litigieux par hasard. Au contraire, il est probable que le Défendeur entendait délibérément faire référence à la marque du Requérant. Le Défendeur ne semble pas avoir utilisé le nom de domaine litigieux, et il n’a apporté aucune explication quant à l’usage projeté ou aux raisons de l’enregistrement. La Commission administrative estime plausible, dans ces circonstances, que le Défendeur avait l’intention d’utiliser le nom de domaine litigieux d’une manière propre à créer une confusion avec le Requérant et ses activités, par exemple pour une tentative d’hameçonnage. Ceci est d’autant plus probable que les informations techniques relatives au nom de domaine litigieux contiennent la désignation d’un serveur de messagerie électronique.

De plus, l’adjonction du terme “groupe” tend à accroître le risque de confusion dans la mesure où l’expression “groupe Carrefour” est parfois utilisée pour identifier le Requérant.

Enfin les coordonnées communiquées par le Défendeur dans les données Whois ne sont pas exactes et la plainte adressée au Défendeur n'a pas pu lui être remis pour cause de mauvaise adresse, ce qui constitue un indice additionnel de la mauvaise foi du Défendeur.

Selon ce qui précède, la Commission administrative conclut que le nom de domaine litigieux a été enregistré et utilisé de mauvaise foi, et que le Requérant a satisfait à la condition énoncée au paragraphe 4(a)(iii) des Principes directeurs.

7. Décision

Pour les raisons exposées ci-dessus, et conformément aux paragraphes 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d’application, la Commission administrative ordonne que le nom de domaine litigieux <groupecarrefour.net> soit transféré au Requérant.

Anne-Virginie La Spada
Expert Unique
Le 23 juin 2020