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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE

Haribo Ricqles Zan contre S.E.

litige N° D2010-2277

1. Les parties

La Requérante est Haribo Ricqles Zan, Marseille, France, représentée par Inlex IP Expertise, France.

Le Défendeur est S.E., Montréal, Canada.

2. Nom de domaine et unité d’enregistrement

Le litige concerne le nom de domaine <dragibus.com>.

L'unité d'enregistrement auprès de laquelle le nom de domaine est enregistré est Namebay.

3. Rappel de la procédure

Une plainte a été déposée par Haribo Ricqles Zan auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le "Centre") le 28 décembre 2010.

Le 29 décembre 2010, le Centre a adressé une requête à l’unité d’enregistrement du nom de domaine litigieux, Namebay, aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par la Requérante. Le 4 janvier 2011, l’unité d’enregistrement a transmis sa vérification au Centre. Confirmant l’ensemble des données du litige, l’unité d’enregistrement précisait que la langue du contrat d’enregistrement était l’anglais. Le 6 janvier 2011, le Centre a attiré l’attention sur le fait que la plainte avait été déposée en français en dépit du fait que la langue du contrat d’enregistrement était l’anglais. Le Centre invitait la Requérante alternativement à déposer sa plainte en anglais, à fournir la preuve d’un accord entre les parties prévoyant que la procédure se déroule en français, ou à solliciter que la procédure se déroule en français, motifs à l’appui. Le 7 janvier 2011, la Requérante a répondu au Centre que le Défendeur étant un canadien domicilié dans la province du Québec, il comprenait parfaitement le français, les échanges précédant le dépôt de la plainte étant du reste intervenus entre les parties en français. Le 12 janvier 2011, le Défendeur a informé le Centre du fait qu’il ne s’opposait pas à ce que la procédure se déroule en français.

Le Centre a vérifié que la plainte répond bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés "Principes directeurs"), aux Règles d’application des Principes directeurs (ci-après dénommées les "Règles d’application"), et aux Règles supplémentaires de l’OMPI (ci-après dénommées les "Règles supplémentaires") pour l’application des Principes directeurs précités.

Conformément aux paragraphes 2(a) et 4(a) des Règles d’application, le 13 janvier 2011, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative a été adressée au Défendeur. Conformément au paragraphe 5(a) des Règles d’application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 2 février 2011. Le Défendeur a fait parvenir sa réponse le 2 février 2011.

En date du 9 février 2011, le Centre nommait dans le présent litige comme expert unique Philippe Gilliéron. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d’application.

Le 21 février 2011, la Commission administrative a rendu une ordonnance de procédure, par laquelle elle invitait la Requérante à produire toute information utile lui permettant d’apprécier ses activités en Amérique du Nord, plus particulièrement au Canada, respectivement par laquelle elle invitait le Défendeur à (i) produire toute information utile concernant les développements et investissements consentis dans le cadre de l’exploitation du site rattaché au nom de domaine litigieux depuis son enregistrement, ainsi que (ii) toute information concernant le développement (business plans, chronologie du développement – documents écrits à l’appui, accords de distribution avec les marques représentées, etc.) et investissements consentis en relation avec le site rattaché au nom de domaine litigieux.

Le délai de réponse à l’ordonnance de procédure, initialement fixé au 28 février 2011, a été prolongé à la requête de la Requérante au 4 mars 2011. Le Défendeur s’est déterminé dans le délai fixé au 4 mars 2011. La Requérante a déposé ses déterminations le 7 mars 2011, suscitant une contre-réponse sur ces déterminations de la part du Défendeur, déposée le 8 mars 2011.

4. Les faits

La Requérante est immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Marseille depuis le 20 avril 1988, sous le numéro RCS Marseille B 572 149 169. Réalisant un chiffre d’affaires estimé entre 1.5 et 2 milliards d’euros par an, elle est le numéro un de la vente de sucreries gélifiées en Europe.

Elle commercialise en particulier sous l’appellation DRAGIBUS des bonbons sans gélatine en forme de petites boules arrondies qui peuvent se présenter en six couleurs : noire, vert, rouge, jaune, orange et rose.

Elle est titulaire de nombreuses marques, notamment :

- La marque verbale française DRAGIBUS, enregistrée sous le n° 1717051 en classe 30 pour les produits de confiserie, avec une date de priorité remontant au 23 mars 1982 ;

- La marque combinée française DRAGIBUS, enregistrée sous le n° 99799386 en classes 16, 20 et 30 avec une date de priorité remontant au 24 juin 1999 ;

- La marque internationale verbale DRAGIBUS, enregistrée sous le n° 485285 en classe 30 pour les produits de confiserie, avec une date de priorité remontant au 15 mai 1984, qui désigne l’Autriche, le Benelux, la Suisse, l’Espagne, l’Italie et le Portugal.

La Requérante est en outre titulaire de nombreux noms de domaine comprenant la dénomination DRAGIBUS, à savoir, en particulier : <dragibus.biz>, <dragibus.eu>, <dragibus.tv>, <dragibus.info> et <dragibus.net>.

Une étude d’agrément de marques, menée en mars 2010, relève que 48% des consommateurs français connaissent la marque DRAGIBUS, et que 32% sont à même de l’attribuer à la Requérante. Les confiseries munies de la marque DRAGIBUS ont réalisé en 2010 un chiffre d’affaires de 27 millions d’euros, équivalant au 15% du chiffres d’affaires global de la Requérante.

Le Défendeur est consultant et concepteur web.

Le nom de domaine <dragibus.com> a été enregistré le 28 janvier 2002 par le Défendeur. Le 28 janvier 2010, ce nom de domaine renvoyait vers une page internet indiquant que le site était en construction.

Dans un email du 17 avril 2010, le Défendeur, contacté par la Requérante, l’informait du fait que : "Je suis consultant et concepteur web et j’ai tout une série de noms de domaine en attente pour mes différents projets, dont le nom de domaine Dragibus.com. […]. Je ne vous ferais pas de proposition de vente car elle est destinée à une utilisation commerciale future (mais non programmée à ce jour). Toutefois vous pouvez toujours me faire une proposition d’achat. Si elle est intéressante je pourrais entamer des discussions, sinon je serais au regret de la décliner."

Dans le cadre d’un échange de courriels intervenus entre les parties en été 2010, la Requérante a proposé au Défendeur de lui racheter le nom de domaine pour un montant de 1200 euros. Le Défendeur a rejeté cette offre par un courriel du 10 juillet 2010, considérant en particulier: "il est facile de voir qui est votre client et quel est son besoin vis-à-vis de ce nom de domaine. Surtout ces derniers mois où il a décidé de lancer des campagnes dans le secteur Internet […], ce qui en augmente d’autant la valeur. Au plaisir d’avoir de vos nouvelles pour une nouvelle proposition, qui cette fois-ci correspondra à sa vraie valeur sur le domaine marchand de votre client". La Requérante n’a pas donné suite à ce courriel.

Depuis que les échanges précités sont intervenus entre les parties, le site rattaché au nom de domaine litigieux renvoie à un site sécurisé. Selon le Défendeur, ce site permet d’accéder à un magasin en ligne d’accessoires électroniques sous diverses formes (ordinateurs, téléphones portables, etc.).

5. Argumentation des parties

A. Requérante

La Requérante allègue tout d’abord le fait que le nom de domaine reprend sa marque à l’identique.

Elle fait ensuite valoir le fait qu’étant donné la notoriété de la marque DRAGIBUS, le Défendeur ne pouvait l’ignorer, comme en témoigne son courriel du 10 juillet 2010 précité et sa profession de consultant et concepteur web. Aucun contenu n’ayant jamais été conféré au site depuis sa création en janvier 2002, point confirmé par le Défendeur dans son courriel du 17 avril 2010, la Requérante en déduit que le Défendeur ne dispose d’aucun droit ni intérêt légitime sur ce nom de domaine.

La Requérante souligne enfin que l’enregistrement par le Défendeur du nom de domaine litigieux n’avait d’autre objectif que de bloquer la Requérante afin de lui revendre le nom de domaine en question. En l’espace de huit ans, le Défendeur n’a développé aucun site rattaché à "www.dragibus.com", se contentant ensuite de l’échange de courriels intervenus durant l’été 2010 de sécuriser l’accès au site, ce qui ne fait qu’accentuer sa mauvaise foi. Au vu de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce, la Requérante en conclut que le nom de domaine <dragibus.com> a été enregistré et qu’il est utilisé de mauvaise foi.

B. Défendeur

Le Défendeur allègue le fait que ses activités l’obligent à recourir à des serveurs distants chez des fournisseurs d’hébergement afin de réaliser certains sites prototypes et les présenter à ses clients. Le fait que ces serveurs distants soient plus facilement accessibles via des noms de domaine explique que le Défendeur ait procédé à plusieurs enregistrements. Le fait que plusieurs de ses sites apparaissent comme étant en construction s’expliquent en raison du fait qu’il les utilise comme serveurs privés pour faire des développements et diverses démonstrations.

Parmi ces noms de domaine figure <dragibus.com>, que le Défendeur exploitait depuis huit ans pour ses serveurs de développement et de prototypes, avant qu’il n’en fasse une plateforme commerciale à la fin du mois d’août 2010, munie dans un premier temps d’une protection par mot de passe. Si ces développements ne furent pas évoqués dans le cadre des échanges de correspondance avec la Requérante, c’est en raison du fait qu’il est selon le Défendeur " […] naturel de dissimuler à la concurrence la nature des développements, surtout à une compagnie spécialisée dans l’étude de la concurrence".

Le Défendeur allègue le fait que la tentative de la Requérante pour récupérer le nom de domaine ne poursuit d’autre objectif que celui de le faire disparaître de manière à ne pas être gênée dans ses futures activités. Selon le Défendeur, il ne s’est jamais opposé aux discussions avec la Requérante, qu’il n’a en revanche jamais initiées, se contentant de lui dire que des discussions étaient envisageables du moment que le nom de domaine n’était pas encore officiellement en ligne.

Le Défendeur poursuit en considérant qu’il ignorait tout de l’existence de la Requérante, le contenu de son courriel du 10 juillet 2010 ne faisant que supposer qu’il s’agissait de la Requérante, sans certitude aucune, la Requérante n’ayant aucune activité au Canada et n’y étant nullement connu. Le Défendeur ajoute au surplus que la dénomination “dragibus” est désormais générique et que des milliers de sites autres que ceux de la Requérante consacrés à cette dénomination peuvent être trouvés sur Internet. Le Défendeur en conclut que l’utilisation commune du mot "Dragibus" à l’international n’a rien à voir avec les produits de la Requérante.

6. Discussion et conclusions

Conformément au paragraphe 4(a) des Principes directeurs, la Commission administrative doit déterminer si sont réunies les trois conditions posées par celui-ci, à savoir:

i) si le nom de domaine est identique à une marque de produit ou de service appartenant à la Requérante ou suffisamment proche pour engendrer la confusion ; et

ii) si le Défendeur n’a pas un droit ou un intérêt légitime à l’utilisation du nom de domaine; et

iii) si le Défendeur a enregistré et utilise le nom de domaine avec mauvaise foi.

Dans le cas d’espèce, il importe toutefois que la Commission administrative se prononce dans un premier temps sur les questions procédurales soulevées par la présente cause.

A. Soumission des parties

Le délai initialement fixé aux parties au 28 février 2011 pour produire les documents sollicités conformément aux paragraphe 10 et 12 des règles d’application dans l’ordonnance de procédure a été prolongé à la requête de la Requérante au 4 mars 2011.

En dépit de cette prolongation, la Requérante n’a toutefois produit ses déterminations que le 7 mars 2011. En l’absence de toute explication probante venant expliquer ce retard, la Commission administrative ne tiendra pas compte de ces déterminations, déposées hors délai, pas plus qu’il ne sera tenu compte des déterminations du Défendeur déposées spontanément ce même jour sans que la Commission administrative ne les ait requises.

Seules seront dès lors prises en considération dans le cadre de la décision les déterminations déposées dans le délai imparti par le Défendeur, en tant qu’il s’efforce de répondre à la question qui lui est soumise. Il ne sera en revanche pas tenu compte d’un second document produit le 8 mars 2011, dans lequel le Défendeur, sans en avoir été requis par la Commission administrative, donne sa version de l’historique de la Requérante.

B. Identité ou similitude prêtant à confusion

Conformément au paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs, la Requérante doit en premier lieu démontrer la titularité d’une marque puis démontrer que le nom de domaine litigieux est identique ou similaire, de façon à créer un risque de confusion, à ladite marque de la Requérante.

En l’espèce, la Requérante a établi être titulaire de plusieurs marques verbales composées du seul élément DRAGIBUS, que ce soit en France ou à l’étranger. Peu importe en revanche que la Requérante ne dispose d’aucune marque dans le pays où le Défendeur est domicilié, ni que les produits ou services proposés sous cette marque diffèrent de ceux proposés par le Défendeur (voir paragraphe 1.1 de la Synthèse des avis des commissions administratives de l’OMPI sur certaines questions relatives aux Principes UDRP).

Le nom de domaine <dragibus.com> reprenant à l’identique la marque de la Requérante, il ne fait aucun doute que la condition posée au paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs est remplie.

C. Droits ou intérêts légitimes

S’agissant de la preuve d’un fait négatif, la Commission administrative estime que lorsqu’un requérant a allégué avec des documents à l’appui le fait que le défendeur n’a aucun droit ou intérêt légitime sur le nom de domaine, il incombe au défendeur d’établir le contraire, puisque lui seul détient les informations nécessaires pour ce faire.

Le défendeur peut dès lors renverser la présomption d’absence d’intérêt légitime en démontrant un usage de bonne foi du nom de domaine litigieux, notamment en relation avec la vente de produits ou services avant le dépôt de la plainte (voir Rapido TV Limited v.Jan Duffy-King, Litige OMPI No. D2000-0449).

En l’espèce, le Défendeur explique se servir en tant que concepteur web de nombreux noms de domaine pour développer et tester certains sites web. Aux termes de ses explications, il semblerait que le Défendeur ait fréquemment recours à différents noms de domaines de manière à développer ses sites à des fins d’essai, sans que ces sites ne soient pour nombre d’entre eux finalement mis en ligne et rendus accessibles au public. Ainsi le Défendeur explique-t-il dans ses déterminations du 4 mars 2011 : "Pour développer ses différents projets et essais, le défendeur a réservé une série de noms de domaine afin d’accéder en ligne à ses différents essais", et que "le nom de domaine dragibus.com a donc contenu le serveur de développement du projet « WebByTech Community Builder » de 2002 à 2004 […]". A partir du moment où il n’est pas contesté que le Défendeur n’a aucun droit à proprement parler sur la dénomination “dragibus”, seule se pose la question de savoir si l’exploitation qui est faite dudit nom de domaine constitue, en soi, un intérêt légitime.

Bien que la Commission administrative reconnaisse le caractère délicat de cette question, elle est d’avis qu’étant donné les nombreuses alternatives existantes à la disposition du Défendeur d’une part, et les nombreux noms de domaine dont il se serait selon ses propres déclarations servis par le passé pour développer ses activités d’autre part, un tel intérêt doit être dénié.

Certes, le Défendeur allègue le fait qu’il serait sur le point de lancer un site d’accessoires en informatique sous le nom de domaine litigieux. Ainsi expose-t-il dans sa Réponse que: "Pendant plusieurs mois, j’ai utilisé le contenu de DRAGIBUS.COM pour chercher des partenaires, des fournisseurs et de nouveaux clients". Pourtant, en dépit de l’occasion qui lui était donnée de communiquer à la Commission administrative son business plan, les contrats de distribution qu’il aurait conclus avec les titulaires de marques figurant sur son site et les investissements consentis pour établir la légitimité et réalité de son activité, le Défendeur n’a fourni aucun document sur quelque point que ce soit, se contentant de simples allégations sans preuve à l’appui. Or, si la Commission administrative est prête à admettre qu’on ne saurait attendre du Défendeur qu’il retrace l’historique des sites rattachés au nom de domaine litigieux et les investissements consentis depuis 2002, on peut s’étonner qu’il ne soit à même d’en produire aucun sur un site de nature commerciale qu’il serait sur le point de lancer, puisqu’il écrit: "Fin août 2010 la page accessible depuis le sous domaine www a été changé pour mettre en ligne mon nouveau projet préparé depuis déjà plusieurs mois mais non accessible depuis le sous domaine www. […] Fait que le requérant a put constater avec l’activation de la protection de l’accès direct au site Internet qui signifie un lancement proche de produit". A supposer que tel soit le cas, il était loisible au Défendeur de produire les documents sollicités par la Commission administrative. Il ne l’a pas fait et doit dès lors en supporter les conséquences.

Partant, la Commission administrative considère que l’absence de preuves, qu’il incombait au Défendeur d’apporter, ne permet pas de retenir qu’un véritable business serait sur le point d’être lancé à partir du nom de domaine litigieux. Etant donné les huit années passées, durant lesquelles les sites rattachés au nom de domaine <dragibus.com> n’ont jamais été rendus accessibles au public, rien ne permet de penser qu’il serait sur le point d’en aller différemment sur la base du dossier tel que constitué et en l’absence de documents qu’il aurait été loisible au Défendeur de produire. Or, à partir du moment où le Défendeur peut continuer à déployer ses activités et essais à partir d’un autre nom de domaine, rien ne justifie qu’il se voit conférer un monopole sur une dénomination sur laquelle un tiers détient un droit exclusif. La Commission administrative en déduit qu’il ne détient aucun intérêt légitime à détenir ce nom de domaine plutôt qu’un autre qu’il lui serait loisible de réserver sans violer les droits d’un tiers.

Au vu de ce qui précède, la Commission administrative considère que la condition du paragraphe 4(a)(ii) des Principes Directeurs est remplie.

C. Enregistrement et usage de mauvaise foi

En l’espèce, le Défendeur allègue dans sa réponse n’avoir fait que supposer dans son courriel du 10 juillet 2010 qu’il s’agissait de la Requérante, sans certitude aucune. Faisant valoir qu’il existe de nombreuses tierces entités recourant à la dénomination “dragibus”, il laisse entendre que la Requérante ne serait pas la seule en droit de recourir à cette dénomination. Selon la Commission administrative de tels arguments ne sont pas pertinents, la seule question pertinente consistant à savoir, une fois admis que la Requérante détient une marque, si l’enregistrement et l’utilisation qui en ont été faits au travers du nom de domaine litigieux l’ont été de mauvaise foi.

Bien que la question soit là encore délicate, la Commission administrative y répond par l’affirmative. Certes, on ne saurait exclure le fait qu’en 2002, l’enregistrement ait eu lieu de bonne foi. Toutefois, le Défendeur lui-même reconnaît dans ses déterminations du 4 mars 2011 que : “Pour en revenir au nom de domaine Dragibus.com, en 2004 pendant la dernière tentative pour lancer Dragibus.com pour une solution de portail communautaire, plusieurs professionnels de l’internet m’ont fait la remarque de l’existence de la marque Française détenu par le requérant et qu’elle pouvait être un problème pour mon développement de produit”. A partir de 2004, le Défendeur avait donc vu son attention attirée sur l’existence de la Requérante et de ses droits exclusif sur la dénomination “dragibus”. Le Défendeur connaissait donc la Requérante, à tout le moins à compter de 2004, date à partir de laquelle il ne pouvait continuer à détenir le nom de domaine de bonne foi.

C’est en vain que le Défendeur cherche à se prévaloir d’un prétendu délai de péremption à l’échéance duquel le titulaire de la marque ne pourrait plus faire valoir ses droits. Outre le caractère douteux des arguments sur lesquels la Commission administrative n’a pas à se prononcer dans le cadre de cette procédure, c’est oublier le fait que la présente procédure est soumise à des Principes Directeurs qui divergent de ceux applicables au regard du droit matériel auquel le Défendeur fait allusion.

Le fait que le Défendeur ait pu être mal conseillé ne change rien au fait qu’en continuant à compter de 2004 à exploiter un site à partir d’un nom de domaine sur lequel il savait désormais qu’une tierce entité détenait des droits, le Défendeur le faisait à ses risques et périls, une telle connaissance excluant toute bonne foi de sa part.

Partant, au vu de ce qui précède, il y a lieu d’admettre que la condition du paragraphe 4(a)(iii) des Principes Directeurs est rempli.

7. Décision

Au regard des éléments développés ci-dessus et conformément aux paragraphes 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d’application, la Commission administrative ordonne que le nom de domaine litigieux <dragibus.com> soit transféré à la Requérante.

Philippe Gilliéron
Expert Unique
Le 13 mars 2011