du 22 décembre 1994
fixant des mesures en vue d'interdire la mise en libre pratique, l'exportation, la
réexportation et le placement sous un régime suspensif des marchandises de
contrefaçon et des marchandises pirates
LE CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE,
vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 113,
vu la proposition de la Commission1,
vu l'avis du Parlement européen2,
vu l'avis du Comité économique et social3,
considérant que, depuis le 1er janvier 1988, est en vigueur le règlement (CEE) n° 3842/86 du Conseil, du 1er décembre 1986, fixant des mesures en vue d'interdire la mise en libre pratique des marchandises de contrefaçon4; qu'il convient de tirer les conclusions de l'expérience des premières années de son application en vue d'améliorer le fonctionnement du système institué par ledit règlement;
considérant que la commercialisation de marchandises de contrefaçon de même que la commercialisation de marchandises pirates porte un préjudice considérable aux fabricants et négociants respectueux des lois ainsi qu'aux titulaires des droits d'auteur et droits voisins et trompe les consommateurs; qu'il convient d'empêcher, dans toute la mesure du possible, la mise sur le marché de telles marchandises et d'adopter à cette fin des mesures permettant de faire face efficacement à cette activité illégale sans pour autant entraver la liberté du commerce légitime; que cet objectif rejoint d'ailleurs les efforts entrepris dans le même sens au plan international;
considérant que, dans la mesure où les marchandises de contrefaçon, les marchandises pirates et les marchandises assimilées sont importées des pays tiers, il importe d'interdire leur mise en libre pratique dans la Communauté ou leur placement sous un régime suspensif et de mettre en place une procédure appropriée permettant l'intervention des autorités douanières afin d'assurer dans les meilleures conditions le respect de cette interdiction;
considérant que l'intervention des autorités douanières en vue d'interdire la mise en libre pratique ou le placement sous un régime suspensif des marchandises de contrefaçon et des marchandises pirates doit s'appliquer également à celles qui sont exportées ou réexportées de la Communauté;
considérant que, pour ce qui concerne les régimes suspensifs et la réexportation moyennant notification, l'intervention des autorités douanières n'a lieu que lorsque des marchandises soupçonnées d'être des marchandises de contrefaçon ou des marchandises pirates sont découvertes à l'occasion d'un contrôle;
considérant que la Communauté prend en considération les termes de l'accord négocié au GATT relatif aux aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, y compris le commerce des marchandises de contrefaçon, notamment les mesures à prendre à la frontière;
considérant qu'il convient de prévoir que les autorités douanières sont compétentes pour recevoir et traiter la demande d'intervention qui leur est adressée;
considérant que l'intervention des autorités douanières doit consister soit à suspendre l'octroi de la mainlevée pour la mise en libre pratique, l'exportation et la réexportation des marchandises soupçonnées d'être des marchandises de contrefaçon ou des marchandises pirates, soit à retenir ces marchandises lorsqu'elles sont placées sous un régime suspensif ou réexportées moyennant notification pendant le temps nécessaire pour permettre de déterminer s'il s'agit effectivement de telles marchandises;
considérant qu'il convient d'autoriser les États membres à retenir, pendant une période déterminée, les marchandises en question avant même qu'une demande du titulaire du droit ait été déposée ou agréée afin de permettre à celui-ci de déposer une demande d'intervention auprès des autorités douanières;
considérant qu'il convient que l'autorité compétente statue sur les cas qui lui sont soumis par référence aux critères qui sont utilisés pour déterminer si des marchandises produites dans l'État membre concerné violent les droits de propriété intellectuelle; que les dispositions des États membres relatives à la compétence des instances et aux procédures judiciaires ne sont pas affectées par le présent règlement;
considérant qu'il convient de définir les mesures auxquelles doivent être soumises les marchandises en question lorsqu'il est établi qu'elles sont des marchandises de contrefaçon ou des marchandises pirates; que ces mesures doivent non seulement priver les responsables du commerce de ces marchandises du profit économique de l'opération et les sanctionner, mais encore décourager efficacement les opérations ultérieures de même nature;
considérant que, afin d'éviter de perturber gravement le dédouanement des marchandises contenues dans les bagages personnels des voyageurs, il y a lieu d'exclure du champ d'application du présent règlement les marchandises susceptibles de constituer des marchandises de contrefaçon ou des marchandises pirates qui sont importées de pays tiers dans les limites prévues par la réglementation communautaire pour l'octroi d'une franchise douanière;
considérant qu'il importe de garantir l'application uniforme des règles communes prévues par le présent règlement et de prévoir à cette fin une procédure communautaire permettant d'arrêter les modalités d'application de ces règles dans des délais appropriés et de renforcer l'assistance mutuelle entre les États membres, d'une part, et entre les États membres et la Commission, d'autre part, afin d'en assurer la meilleure efficacité;
considérant qu'il conviendra, à la lumière notamment de l'expérience acquise lors de l'application du présent règlement, d'examiner la possibilité d'élargir la liste des droits de propriété intellectuelle couverts par le présent règlement;
considérant qu'il y a lieu d'abroger le règlement (CEE) n° 3842/86,
A ARRÊTÉ LE PRÉSENT RÈGLEMENT :
- déclarées pour la mise en libre pratique, l'exportation ou la réexportation;
- découvertes, à l'occasion d'un contrôle effectué sur des marchandises placées sous un régime suspensif au sens de l'article 84 paragraphe 1 point a) du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire5 ou réexportées moyennant notification et
- les marchandises, y compris leur conditionnement, sur lesquelles a été apposée sans autorisation une marque de fabrique ou de commerce qui est identique à la marque de fabrique ou de commerce dûment enregistrée pour les mêmes types de marchandises, ou qui ne peut être distinguée dans ses aspects essentiels de cette marque de fabrique ou de commerce et qui de ce fait porte atteinte aux droits du titulaire de la marque en question selon la législation communautaire ou celle de l'État membre où la demande d'intervention des autorités douanières est faite,
- tout signe de marque (logo, étiquette, autocollant, prospectus, notice d'utilisation, document de garantie), même présenté séparément, dans les mêmes conditions que les marchandises visées au premier tiret,
- les emballages revêtus des marques des marchandises de contrefaçon, présentés séparément, dans les mêmes conditions que les marchandises visées au premier tiret;
Il en va de même des marchandises visées au premier alinéa qui ont été fabriquées ou sont revêtues de la marque dans des conditions autres que celles convenues avec les titulaires des droits en question.
- une description des marchandises suffisamment précise pour permettre aux autorités douanières de les reconnaître,
- une justification établissant que le demandeur est titulaire du droit pour les marchandises en question.
En outre, le titulaire du droit doit fournir toutes les autres informations utiles dont il dispose pour permettre au service douanier compétent de décider en toute connaissance de cause, sans toutefois que ces informations constituent une condition à la recevabilité de la demande.
À titre indicatif, en ce qui concerne les marchandises pirates, et dans la mesure du possible, ces informations portent sur :
- l'endroit où les marchandises sont situées ou le lieu de destination prévu,
- l'identification de l'envoi ou des colis,
- la date d'arrivée ou de départ prévue des marchandises,
- le moyen de transport utilisé,
- l'identité de l'importateur, de l'exportateur ou du détenteur.
Lorsqu'il fait droit à la demande, il fixe la période pendant laquelle les autorités douanières interviennent. Cette période peut être prorogée, sur demande du titulaire du droit, par le service qui a pris la décision initiale.
Le refus de faire droit à la demande doit être dûment motivé et peut faire l'objet d'un recours.
- couvrir sa responsabilité éventuelle envers les personnes concernées par une opération visée à l'article 1er paragraphe 1 point a) dans le cas où la procédure ouverte en application de l'article 6 paragraphe 1 ne serait pas poursuivie à cause d'un acte ou d'une omission du titulaire du droit ou dans le cas où il serait établi par la suite que les marchandises en cause ne sont pas des marchandises de contrefaçon ou des marchandises pirates,
- assurer le paiement du montant des frais engagés conformément au présent règlement du fait du maintien des marchandises sous contrôle douanier en application de l'article 6.
Le bureau de douane informe immédiatement le service qui a traité la demande conformément à l'article 3. Ce service ou le bureau de douane informe immédiatement le déclarant et le demandeur de l'intervention. Conformément aux dispositions nationales relatives à la protection des données à caractère personnel, du secret commercial et industriel ainsi que du secret professionnel et administratif, le bureau de douane ou le service qui a traité la demande informe le titulaire du droit, à sa demande, des nom et adresse du déclarant et, s'il est connu, du destinataire afin de lui permettre de saisir les autorités compétentes pour statuer au fond. Le bureau de douane accorde au demandeur et aux personnes concernées par une opération visée à l'article 1er paragraphe 1 point a) la possibilité d'inspecter les marchandises pour lesquelles l'octroi de la mainlevée est suspendue ou qui ont été retenues.
Lors de l'examen des marchandises, le bureau de douane peut procéder à des prélèvements d'échantillons en vue de faciliter la poursuite de la procédure.
Dans des cas appropriés, ce délai peut être prorogé de dix jours ouvrables au maximum.
- le service ou le bureau de douane visé à l'article 6 paragraphe 1 ait été informé, dans le délai visé au paragraphe 1 du présent article, de la saisine de l'autorité compétente pour statuer au fond visée audit paragraphe 1,
- à l'échéance de ce délai, l'autorité habilitée à cet effet n'ait pas accordé de mesures conservatoires,
- toutes les formalités douanières aient été accomplies.
La garantie doit être suffisante pour protéger les intérêts du titulaire du droit. La constitution de cette garantie n'affecte pas les autres possibilités de recours dont dispose le titulaire du droit. Dans le cas où l'autorité compétente pour statuer au fond a été saisie autrement qu'à l'initiative du titulaire du droit relatif aux dessins ou modèles, cette garantie est libérée si celui-ci ne fait pas valoir son droit d'ester en justice dans un délai de vingt jours ouvrables à compter du jour où il a reçu notification de la suspension de la mainlevée ou de la retenue. Dans le cas où il est fait application du paragraphe 1 deuxième alinéa, ce délai peut être porté à trente jours ouvrables au maximum.
Ne sont notamment pas considérés comme ayant un tel effet :
- la réexportation en l'état des marchandises de contrefaçon ou des marchandises pirates,
- sauf cas exceptionnel, la simple élimination des marques dont sont revêtues indûment les marchandises de contrefaçon,
- le placement des marchandises sous un autre régime douanier.
- la Commission diffère l'application des mesures décidées par elle d'un délai de trois mois au plus à compter de la date de la communication,
- le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, peut prendre une décision différente dans le délai prévu au premier tiret.
La Commission communique ces informations aux autres États membres.
Aux fins de l'application du présent règlement, les dispositions du règlement (CEE) n° 1468/81 du Conseil, du 19 mai 1981, relatif à l'assistance mutuelle entre les autorités administratives des États membres et à la collaboration entre celles-ci et la Commission en vue d'assurer la bonne application des réglementations douanière ou agricole6 , sont applicables mutatis mutandis.
Les modalités relatives à la procédure d'échange d'informations sont établies dans le cadre des dispositions d'application conformément à l'article 13 paragraphes 2, 3 et 4.
Il est applicable à partir du 1er juillet 1995.
Le présent règlement est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre.
Fait à Bruxelles, le 22 décembre 1994.
Par le Conseil
Le président
H. SEEHOFER
1 JO n° C 238 du 2. 9. 1993, p. 9.
2 JO n° C 61 du 28. 2. 1994.
3 JO n° C 52 du 19. 2. 1994, p. 37.
4 JO n° L 357 du 18. 12. 1986, p. 1.
5 JO n° L 302 du 19. 10. 1992, p. 1.
6 JO n° L 144 du 2. 6. 1981, p. 1. Règlement modifié en dernier lieu par le règlement (CEE) n° 945/87 (JO n° L 90 du 2. 4. 1987, p. 3).