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France

FR309

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Décision du Conseil d'Etat n°347076 du 30 décembre 2013

 Décision du Conseil d'Etat n° 347076 du 30 décembre 2013

Conseil d’État

N° 347076

ECLI:FR:CESSR:2013:347076.20131230

Mentionné dans les tables du recueil Lebon

10ème et 9ème sous-sections réunies

Mme Anne Iljic, rapporteur

M. Edouard Crépey, rapporteur public

SCP PIWNICA, MOLINIE, avocat(s)

lecture du lundi 30 décembre 2013

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 28 février, 21 avril et 30 mai 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la société Apple Inc, dont le siège est 1 Infinite Loop, Ca 95014 Cupertino, Etats-Unis et pour la société Itunes Sarl, dont le siège est 8 rue Heinrich Heine à Luxembourg (L 1720), Grand Duché du Luxembourg ; la société Apple Inc et la société iTunes Sarl demandent au Conseil d’Etat d’annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2010-1366 du 10 novembre 2010 relatif à la labellisation des offres de services de communication au public en ligne et à la régulation des mesures techniques de protection et d’identification des oeuvres et des objets protégés par le droit d’auteur ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, notamment ses articles 34 et 56 ;

Vu la directive n° 91/250/CEE du Conseil du 14 mai 1991 ;

Vu la directive n° 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 juin 1998 ;

Vu la directive n° 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 ;

Vu le code de la propriété intellectuelle, modifié notamment par la loi n° 2009-669 du 12 juin 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Iljic, Auditeur,

- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la Société Apple Inc et de la Société iTunes Sarl ;

1. Considérant qu’aux termes de l’article L. 331-5 du code de la propriété intellectuelle : “ Les mesures techniques efficaces destinées à empêcher ou à limiter les utilisations non autorisées par les titulaires d’un droit d’auteur ou d’un droit voisin du droit d’auteur d’une oeuvre, autre qu’un logiciel, d’une interprétation, d’un phonogramme, d’un vidéogramme ou d’un programme sont protégées dans les conditions prévues au présent titre. On entend par mesure technique au sens du premier alinéa toute technologie, dispositif, composant qui, dans le cadre normal de son fonctionnement, accomplit la fonction prévue par cet alinéa. Ces mesures techniques sont réputées efficaces lorsqu’une utilisation visée au même alinéa est contrôlée par les titulaires de droits grâce à l’application d’un code d’accès, d’un procédé de protection tel que le cryptage, le brouillage ou toute autre transformation de l’objet de la protection ou d’un mécanisme de contrôle de la copie qui atteint cet objectif de protection. Un protocole, un format, une méthode de cryptage, de brouillage ou de transformation ne constitue pas en tant que tel une mesure technique au sens du présent article. Les mesures techniques ne doivent pas avoir pour effet d’empêcher la mise en oeuvre effective de l’interopérabilité, dans le respect du droit d’auteur. Les fournisseurs de mesures techniques donnent l’accès aux informations essentielles à l’interopérabilité dans les conditions définies au 1° de l’article L. 331-31 et à l’article L. 331-32 (...) “ ; qu’aux termes de l’article L. 331-32 du même code : “ Tout éditeur de logiciel, tout fabricant de système technique et tout exploitant de service peut, en cas

de refus d’accès aux informations essentielles à l’interopérabilité, demander à la Haute Autorité de garantir l’interopérabilité des systèmes et des services existants, dans le respect des droits des parties, et d’obtenir du titulaire des droits sur la mesure technique les informations essentielles à cette interopérabilité. (...) On entend par informations essentielles à l’interopérabilité la documentation technique et les interfaces de programmation nécessaires pour permettre à un dispositif technique d’accéder, (...), à une oeuvre ou à un objet protégé par une mesure technique et aux informations sous forme électronique jointes, dans le respect des conditions d’utilisation de l’oeuvre ou de l’objet protégé qui ont été définies à l’origine. “ ;

2. Considérant qu’en vertu de l’article L. 331-31 du code de la propriété intellectuelle, la Haute Autorité pour la protection des oeuvres et le diffusion des droits sur internet (Hadopi) “ veille à ce que les mesures techniques (...) n’aient pas pour conséquence, du fait de leur incompatibilité mutuelle ou de leur incapacité d’interopérer, d’entraîner dans l’utilisation d’une oeuvre des limitations supplémentaires et indépendantes de celles expressément décidées par le titulaire d’un droit d’auteur sur une oeuvre autre qu’un logiciel ou par le titulaire d’un droit voisin sur une interprétation, un phonogramme, un vidéogramme ou un programme “ ; que pour garantir l’interopérabilité des systèmes et des services existants, dans le respect des droits des parties, l’article L. 331-32 du code de la propriété intellectuelle confère à cette autorité des pouvoirs de médiation entre d’une part les éditeurs de logiciel, les fabricants de système techniques et les exploitants de service, et d’autre part, les titulaires des droits sur les mesures techniques ; qu’à défaut d’accord entre les parties, la Hadopi peut prononcer, en vertu de ce même article, “ une injonction prescrivant, au besoin sous astreinte, les conditions dans lesquelles le demandeur peut obtenir l’accès aux informations essentielles à l’interopérabilité et les engagements qu’il doit respecter pour garantir l’efficacité et l’intégrité de la mesure technique, ainsi que les conditions d’accès et d’usage du contenu protégé “ ; qu’elle a le pouvoir d’infliger une sanction pécuniaire en cas d’inexécution de ses injonctions ou de non-respect des engagements qu’elle a acceptés ;

3. Considérant que le décret attaqué du 10 novembre 2010 relatif à la labellisation des offres de services de communication au public en ligne et à la régulation des mesures techniques de protection et d’identification des oeuvres et des objets protégés par le droit d’auteur, pris pour l’application des articles L. 331-23 et L. 331-31 à L. 331-37 du code de la propriété intellectuelle, a inséré dans ce code les articles R. 331-32-1, R. 331 32 2, et R. 331-47 à R. 331-84 ;

Sur la légalité externe du décret attaqué :

En ce qui concerne le moyen tiré du défaut de consultation régulière du Conseil d’Etat :

4. Considérant qu’il ressort de la minute de la section de l’intérieur du Conseil d’Etat, telle qu’elle a été produite au dossier par le ministre, que, contrairement à ce qui est soutenu, ce décret ne contient aucune disposition différant à la fois de celles qui figuraient dans le projet soumis par le gouvernement au Conseil d’Etat et de celles qui ont été adoptées par ce dernier ;

En ce qui concerne la méconnaissance de l’obligation de transmission à la Commission européenne prévue par la directive n° 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 juin 1998 :

5. Considérant qu’aux termes du 1 de l’article 8 de cette directive : “ Sous réserve de l’article 10, les États membres communiquent immédiatement à la Commission tout projet de règle technique, sauf s’il s’agit d’une simple transposition intégrale d’une norme internationale ou européenne, auquel cas une simple information quant à la norme concernée suffit (...) “ ; qu’il résulte de la définition qu’en donne l’article 1er de cette directive qu’une “ règle technique “ est une “ spécification technique ou autre exigence, y compris les dispositions administratives qui s’y appliquent, dont l’observation est obligatoire, de jure ou de facto, pour la commercialisation ou l’utilisation dans un Etat membre “, qu’une spécification technique est une “ spécification qui figure dans un document définissant les caractéristiques requises d’un produit “ et que doit être regardé comme un “ projet de règle technique “ “ le texte d’une spécification technique ou d’une autre exigence, y compris les dispositions administratives, qui est, avec l’intention de l’établir ou de la faire finalement établir comme une règle technique et qui se trouve à un stade de préparation où il est encore possible d’y apporter des amendements substantiels “ ;

6. Considérant que le décret contesté se borne à mettre en oeuvre les dispositions des articles L. 331-5 et L. 331-32 du code de la propriété intellectuelle dans leur rédaction issue de la loi du 12 juin 2009, au demeurant notifiée à la Commission européenne ; que, dans ce cadre, ce décret a pour objet, d’une part, de préciser les conditions dans lesquelles sont reçues et examinées par la Hadopi les demandes de labellisation garantissant le caractère légal des offres proposées par des personnes dont l’activité est d’offrir un service de communication au public en ligne, d’autre part de définir les règles de procédure et d’examen des dossiers applicables devant cette autorité lorsqu’elle est saisie d’une demande tendant à assurer l’effectivité de l’interopérabilité ; que, par suite, ce décret ne comporte aucune règle technique et ne constitue pas par lui-même un “ projet de règle technique “ au sens de la directive précitée, dont les dispositions du 1 de l’article 8 ne sauraient, dès lors, être utilement invoquées ;

Sur la légalité interne du décret attaqué :

En ce qui concerne le moyen tiré de l’extension des cas dans lesquels la Hadopi peut être saisie :

7. Considérant que si, en vertu du III de l’article R. 331-56 du code de la propriété intellectuelle, pris pour l’application des dispositions de l’article L. 331-32 citées au point 1, le fait de ne pas proposer l’accès aux informations essentielles à l’interopérabilité “ à des conditions et dans un délai raisonnables “ est assimilé à un refus d’accès, le décret attaqué se borne à apporter des précisions relatives à l’une des modalités possibles de refus d’accès à ces informations essentielles, de nature à permettre la saisine de la Hadopi, sans créer ni un nouveau cas de refus, ni une hypothèse de saisine non prévue par la loi ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l’atteinte aux secrets protégés par la loi :

8. Considérant que l’article R. 331-65, issu du décret attaqué, énonce les conditions dans lesquelles la Hadopi procède à l’examen et à l’instruction des demandes visant à garantir l’interopérabilité lorsqu’une partie se prévaut d’un secret protégé par la loi ; qu’à cette fin, il prévoit notamment la possibilité, pour son président, de procéder au classement en annexe confidentielle des informations, documents ou parties de documents pouvant être regardés comme mettant en jeu un secret protégé par la loi, en particulier le secret des affaires ; que, dans cette hypothèse, ces pièces sont retirées du dossier ou certaines de leurs mentions occultées, seule une version non confidentielle des documents, accompagnés de leur résumé, étant versée au dossier ; que, toutefois, si le rapporteur du dossier considère qu’une pièce classée en annexe confidentielle est nécessaire à la procédure, il doit en informer la personne qui en a demandé le classement par lettre recommandée avec accusé de réception ; que si cette personne s’oppose, dans le délai qui lui a été imparti par le rapporteur, à ce que cette pièce soit utilisée dans la procédure, elle saisit le président de la Hadopi ; que, dans l’hypothèse, où ce dernier fait droit à cette demande, la pièce est restituée à la partie qui l’a produite tandis que, dans le cas contraire, il peut autoriser l’utilisation de cette pièce par le rapporteur et sa communication aux parties pour lesquelles la pièce est nécessaire à l’exercice de leurs droits ;

9. Considérant qu’il résulte de la combinaison des dispositions citées aux points 1 et 2 que le législateur a nécessairement entendu confier à la Hadopi les pouvoirs nécessaires à la mise en oeuvre des exigences liées à l’interopérabilité ; que le décret attaqué, qui porte application des dispositions des articles L. 331-32 et suivants du code de la propriété intellectuelle, se borne à fixer les règles de procédure applicables devant cette autorité lorsqu’une information ou un document est susceptible de relever d’un secret protégé par la loi ; que ces règles sont assorties de garanties suffisantes pour assurer la préservation de ces secrets dès lors, en particulier, que le décret attaqué prévoit, au III de l’article R. 331-65 du code de la propriété intellectuelle, que lorsqu’une pièce est susceptible de relever d’un secret protégé par la loi, “ les parties concernées ne peuvent utiliser cette pièce, qui demeure couverte par le secret protégé par la loi, que dans le cadre de la procédure devant la Haute Autorité et des voies de recours éventuelles contre les décisions de celle-ci “ ; que, par suite, les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que le décret attaqué porterait illégalement atteinte aux secrets protégés par la loi ;

En ce qui concerne la méconnaissance des principes généraux du droit et des principes de valeur constitutionnelle :

10. Considérant que le IV du même article R. 331-65 dispose que “ Les décisions prises par le président de la Haute Autorité en application des dispositions du présent article ne peuvent être contestées qu’à l’occasion du recours dirigé contre les décisions de la Haute Autorité rendues en application des articles R. 331-68 à R. 331-70. “ ; qu’en ne permettant ainsi de contester la légalité des décisions prises par le président sur le fondement de l’article R. 331-65 qu’à l’occasion d’un recours contre la décision définitive adoptée par la Hadopi, ces dispositions font obstacle, le cas échéant, à l’exercice d’un recours ou d’une

action en référé contre ces décisions devant le juge compétent ; que, eu égard à l’ampleur et au caractère potentiellement irréversible des effets des décisions que le président de la Hadopi peut prendre en vertu de l’article R. 331-65, les dispositions du IV de cet article méconnaissent le principe général du droit au recours et les exigences liées au respect des droits de la défense ;

11. Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu, les informations dont le président de la Hadopi peut demander la communication en application de ce même article ne sont pas, à ce stade de l’examen des demandes, celles qui sont propres à assurer l’accès du demandeur aux informations essentielles à l’interopérabilité et auxquelles l’accès peut être prescrit par la décision définitive prise par la Hadopi en application de l’article R. 331-68 du code de la propriété intellectuelle, mais uniquement celles pour lesquelles une demande de classement en annexe confidentielle a été, le cas échéant, formulée par l’une des parties ; que, par suite, ces informations ne constituent pas l’objet même du litige ; qu’ainsi, le moyen tiré de ce que la procédure instituée par l’article R. 331-65 du code de la propriété intellectuelle aurait pour effet de vider le litige de son objet et méconnaîtrait le principe du contradictoire ne peut qu’être écarté ;

En ce qui concerne les moyens tirés de la violation du droit de l’Union européenne :

Quant à la méconnaissance des articles 5 et 6 de la directive n° 2001/29/CE du 22 mai 2001 relative à l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et droits voisins dans la société de l’information :

12. Considérant, en premier lieu, qu’il résulte des dispositions du 1 de l’article 6 de la directive du 22 mai 2001 que les Etats membres doivent prévoir une “ protection juridique appropriée contre le contournement des mesures techniques efficaces “, aux fins d’empêcher les formes illégales de mise en circulation des oeuvres culturelles protégées par ces mesures techniques ; que si le 4 du même article, qui énonce les hypothèses dans lesquelles ils peuvent apporter des exceptions et des limitations à cette objectif de protection, ne mentionne pas expressément l’exigence d’interopérabilité, le cinquante-quatrième considérant de cette directive prévoit que : “ (...) La compatibilité et l’interopérabilité des différents systèmes doivent être encouragées. “ ; qu’il résulte donc de ces dispositions de la directive, éclairée par ses motifs, que les Etats membres peuvent apporter à l’exercice des droits sur les mesures techniques, dans le respect du principe de proportionnalité, des restrictions permettant qu’un produit ou un système dont les interfaces sont connues puisse fonctionner avec d’autres produits ou systèmes existants ou futurs, sans restrictions excessive d’accès ou de mise en oeuvre au regard de l’objectif de protection juridique des oeuvres fixé par l’article 6 de la directive ;

13. Considérant que si les dispositions des articles L. 331-32 et R. 331-68 du code de la propriété intellectuelle permettent au président de la Hadopi, à défaut d’accord entre les parties, d’enjoindre au titulaire des droits sur une mesure technique de donner accès à certaines informations sur cette mesure, cette injonction, qui est assortie d’engagements que le demandeur de ces informations doit respecter pour garantir l’efficacité et l’intégrité de la mesure technique, ne porte que sur les seules informations essentielles nécessaires à l’interopérabilité ; qu’en outre l’article L. 331-5 de ce même code prévoit que

l’interopérabilité s’exerce dans le respect des droits d’auteur ;

14. Considérant qu’il résulte de qui précède que le moyen tiré de ce que les dispositions des articles L. 331-32 et R. 331-68 du code de la propriété intellectuelle méconnaîtraient les articles 5 et 6 de la directive du 22 mai 2001 en portant atteinte aux droits des auteurs des oeuvres protégées par des mesures techniques doit être écarté ;

15. Considérant, en deuxième lieu, que si les dispositions de l’article 5 de la directive du 22 mai 2011 permettent de déroger aux mesures de protection des droits d’exploitation dans des hypothèses limitativement définies, les dispositions des articles L. 331-32 et R. 331-68 du code de la propriété intellectuelle, qui visent seulement à garantir l’interopérabilité pour permettre l’accès, sous certaines conditions, aux oeuvres protégées par des mesures techniques ne portent pas, par elles-mêmes, atteinte aux droits d’exploitation détenus par les auteurs de ces mesures ; que, par suite, les sociétés requérantes ne peuvent utilement soutenir que les dispositions qu’elles attaquent méconnaîtraient les dispositions de l’article 5 de la directive du 22 mai 2001 ;

En ce qui concerne la méconnaissance de la directive n° 91-250/CEE du Conseil du 14 mai 1991 concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur :

16. Considérant que la directive du 14 mai 1991 prescrit aux Etats-membres d’accorder la protection du droit d’auteur aux programmes d’ordinateur en tant qu’oeuvres littéraires, de déterminer les bénéficiaires et l’objet de cette protection ainsi que les droits exclusifs de ces bénéficiaires pour autoriser ou interdire certains actes et la durée de cette protection ; que les mesures de régulation techniques reposent sur des programmes d’ordinateur au sens de cette directive ; que le 1 de l’article 6 de cette même directive apporte à cette protection une limitation tenant à l’obligation de “ décompilation “, en vertu de laquelle : “ L’autorisation du titulaire des droits n’est pas requise lorsque la reproduction du code ou la traduction de la forme de ce code au sens de l’article 4 points a) et b) est indispensable pour obtenir les informations nécessaires à l’interopérabilité d’un programme d’ordinateur créé de façon indépendante avec d’autres programmes et sous réserve que les conditions suivantes soient réunies : / a) ces actes sont accomplis par le licencié ou par une autre personne jouissant du droit d’utiliser une copie d’un programme ou pour leur compte par une personne habilitée à cette fin; / b) les informations nécessaires à l’interopérabilité n’ont pas déjà été facilement et rapidement accessibles aux personnes visées au point a) et c) ces actes sont limités aux parties du programme d’origine nécessaires à cette interopérabilité (...) “ ;

17. Considérant qu’aux termes de l’article L. 122-6-1 du code la propriété intellectuelle la “ décompilation “ permet à une personne ayant le droit d’utiliser le logiciel et, sans l’autorisation de l’auteur , d’” observer, étudier ou tester le fonctionnement de ce logiciel afin de déterminer les idées et principes qui sont à la base de n’importe quel élément du logiciel lorsqu’elle effectue toute opération de chargement, d’affichage, d’exécution, de transmission ou de stockage du logiciel qu’elle est en droit d’effectuer “ ; que l’interopérabilité au sens des articles L. 331-5 et L. 331-32 du code de la propriété intellectuelle ne s’exerce de manière contraignante que sur injonction de la Hadopi, à défaut d’accord entre les parties et après que celles-ci ont été mises à même de présenter

leurs observations ; qu’elle vise notamment à empêcher les abus de position dominante liés à l’impossibilité dans laquelle se trouveraient de nouveaux opérateurs de distribuer leurs propres services du fait de mesures techniques auxquelles ils ne peuvent accéder ; qu’enfin les dispositions de l’article L. 331-5 “ s’appliquent sans préjudice des dispositions de l’article L. 122-6-1 du présent code “ ; qu’il résulte de ce qui précède que la “ décompilation “, d’une part, et l’interopérabilité, d’autre part, constituent des exigences complémentaires mais distinctes, qui relèvent, en raison de leurs finalités propres, de procédures de mise en oeuvre et de garanties spécifiques ; que le décret attaqué comporte des garanties suffisantes pour assurer la protection des droits d’auteur en matière d’interopérabilité dans des conditions aussi protectrices qu’en matière de “ décompilation “ ; qu’ainsi il ne méconnaît pas les objectifs de la directive du 14 mai 1991 ;

En ce qui concerne la méconnaissance des stipulations des articles 56 et 34 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne :

18. Considérant, en premier lieu, qu’il résulte de l’article 56 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne que “ les restrictions à la libre prestation des services à l’intérieur de l’Union sont interdites à l’égard des ressortissants des États membres établis dans un État membre autre que celui du destinataire de la prestation “ ; que si les articles L. 331-5 et L. 331-31 et suivants du code de la propriétés intellectuelle définissent les conditions dans lesquelles est garantie l’interopérabilité et notamment dans lesquelles sont communiquées les interfaces de programmation nécessaires pour permettre à un dispositif technique d’accéder à une oeuvre, ces dispositions, pour l’application desquelles le décret attaqué a été pris, d’une part, s’appliquent de manière indifférenciée et sans discrimination à l’ensemble des entreprises concernées et, d’autre part, n’ont ni pour objet ni pour effet de priver les entreprises situées sur le territoire de l’Union et proposant des services en ligne dont les contenus sont protégés par des mesures techniques d’offrir ces mêmes services sur le territoire national ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait pris en application de dispositions législatives contraires au principe de libre prestation de services garanti par l’article 56 relatif du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne doit être écarté ;

19. Considérant, en second lieu, que selon l’article 34 du même traité : “ Les restrictions quantitatives à l’importation ainsi que toutes mesures d’effet équivalent, sont interdites entre les États membres “ ; qu’il résulte de ces dispositions que, si un Etat ne peut entraver l’importation sur son territoire de mesures techniques ou d’appareils et de services dont l’usage est assorti de telles mesures, les dispositions des articles L. 331-5 et L. 331-31 et suivants du code de propriété intellectuelles visant à permettre l’interopérabilité, qui s’appliquent de manière indistincte à l’ensemble des importateurs de mesures techniques comme aux entreprises proposant des marchandises ou des services en ligne dont les contenus sont protégés par des mesures techniques, n’ont ni pour objet ni pour effet d’instituer des entraves destinées à restreindre la libre circulation des mesures techniques ou celle des appareils ayant recours à ces procédés ; qu’en particulier, elles ne font pas obstacle à ce qu’une entreprise implantée en France puisse importer sans restriction ces mesures et appareils ; que, par suite, les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que le décret attaqué aurait été pris pour l’application de dispositions législatives contraires au principe de libre circulation des marchandises ;

20. Considérant qu’il résulte tout de ce qui précède que, sans qu’il soit besoin de saisir la Cour de justice de l’Union européenne d’une question préjudicielle, les sociétés requérantes sont seulement fondées à demander l’annulation de l’article 2 du décret qu’elles attaquent en tant qu’il introduit dans le code de la propriété intellectuelle le IV de l’article R. 331-65 ;

D E C I D E :

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Article 1er : L’article 2 du décret du 10 novembre 2010 est annulé en tant qu’il introduit dans le code de la propriété intellectuelle le IV de l’article R. 331-65.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Apple Inc, à la société iTunes Sarl, au Premier ministre et à la ministre de la culture et de la communication.

Abstrats : 01-04-03-06-01 ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS. VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA RÈGLE DE DROIT. PRINCIPES GÉNÉRAUX DU DROIT. PRINCIPES RÉGISSANT L’ORGANISATION ET LE FONCTIONNEMENT DES JURIDICTIONS. EXISTENCE DE VOIES DE RECOURS. - DISPOSITIONS DU CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE NE PERMETTANT DE CONTESTER LES DÉCISIONS DU PRÉSIDENT DE LA HADOPI SUR LE CLASSEMENT DE DOCUMENTS EN ANNEXE CONFIDENTIELLE QU’À L’OCCASION DU RECOURS CONTRE LA DÉCISION DÉFINITIVE.

26-04-03 DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS. DROIT DE PROPRIÉTÉ. PROPRIÉTÉ LITTÉRAIRE ET ARTISTIQUE. - HADOPI - MISSION DE RÉGULATION ET DE VEILLE DANS LE DOMAINE DES MESURES TECHNIQUES DE PROTECTION ET D’IDENTIFICATION DES ŒUVRES ET DES OBJETS PROTÉGÉS - DÉCISIONS PRISES PAR LE PRÉSIDENT SUR LES DEMANDES DE CLASSEMENT DE DOCUMENTS EN ANNEXE CONFIDENTIELLE - DISPOSITIONS DU CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE NE PERMETTANT DE CONTESTER CES DÉCISIONS QU’À L’OCCASION DU RECOURS CONTRE LA DÉCISION DÉFINITIVE - PRINCIPE GÉNÉRAL DU DROIT AU RECOURS - MÉCONNAISSANCE - EXISTENCE.

52-046 POUVOIRS PUBLICS ET AUTORITÉS INDÉPENDANTES. - HADOPI - MISSION DE RÉGULATION ET DE VEILLE DANS LE DOMAINE DES MESURES TECHNIQUES DE PROTECTION ET D’IDENTIFICATION DES ŒUVRES ET DES OBJETS PROTÉGÉS - DÉCISIONS PRISES PAR LE PRÉSIDENT SUR LES DEMANDES DE CLASSEMENT DE DOCUMENTS EN ANNEXE CONFIDENTIELLE - DISPOSITIONS DU CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE NE PERMETTANT DE CONTESTER CES DÉCISIONS

QU’À L’OCCASION DU RECOURS CONTRE LA DÉCISION DÉFINITIVE - PRINCIPE GÉNÉRAL DU DROIT AU RECOURS - MÉCONNAISSANCE - EXISTENCE.

Résumé : 01-04-03-06-01 En ne permettant de contester la légalité des décisions prises par le président de la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi) sur les demandes de classement d’informations, documents ou parties de documents en annexe confidentielle qu’à l’occasion d’un recours contre la décision définitive adoptée par la Hadopi, les dispositions du IV de l’article R. 331-65 du code de la propriété intellectuelle font obstacle, le cas échéant, à l’exercice d’un recours ou d’une action en référé contre ces décisions devant le juge compétent. Eu égard à l’ampleur et au caractère potentiellement irréversible des effets des décisions que le président de la Hadopi peut prendre en vertu de l’article R. 331-65, les dispositions du IV de cet article méconnaissent le principe général du droit au recours et les exigences liées au respect des droits de la défense.

26-04-03 En ne permettant de contester la légalité des décisions prises par le président de la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi) sur les demandes de classement d’informations, documents ou parties de documents en annexe confidentielle qu’à l’occasion d’un recours contre la décision définitive adoptée par la Hadopi, les dispositions du IV de l’article R. 331-65 du code de la propriété intellectuelle font obstacle, le cas échéant, à l’exercice d’un recours ou d’une action en référé contre ces décisions devant le juge compétent. Eu égard à l’ampleur et au caractère potentiellement irréversible des effets des décisions que le président de la Hadopi peut prendre en vertu de l’article R. 331-65, les dispositions du IV de cet article méconnaissent le principe général du droit au recours et les exigences liées au respect des droits de la défense.

52-046 En ne permettant de contester la légalité des décisions prises par le président de la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi) sur les demandes de classement d’informations, documents ou parties de documents en annexe confidentielle qu’à l’occasion d’un recours contre la décision définitive adoptée par la Hadopi, les dispositions du IV de l’article R. 331-65 du code de la propriété intellectuelle font obstacle, le cas échéant, à l’exercice d’un recours ou d’une action en référé contre ces décisions devant le juge compétent. Eu égard à l’ampleur et au caractère potentiellement irréversible des effets des décisions que le président de la Hadopi peut prendre en vertu de l’article R. 331-65, les dispositions du IV de cet article méconnaissent le principe général du droit au recours et les exigences liées au respect des droits de la défense.