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Bioéthique et droit des brevets : L’homme aux cellules d’or et le peuple Hagahai

Septembre 2006

Cet article est le dernier de la série du Magazine de l’OMPI sur la propriété intellectuelle et la bioéthique. Il examine deux affaires dans lesquelles des brevets issus de recherches sur le matériel génétique humain ont été contestés au motif que le consentement préalable des donneurs ne leur avait pas été demandé.

Consentement éclairé

La doctrine du consentement préalable éclairé relève de l’éthique médicale et concerne le droit du patient d’accepter – ou de refuser – de recevoir certains soins après avoir été informé par le praticien des risques et avantages qui s’y attachent. Elle s’étend graduellement à d’autres domaines, et notamment à l’utilisation de tissus humains dans la recherche médicale. La Déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de l’homme de l’UNESCO, adoptée en 2005, prévoit que la recherche scientifique et les interventions médicales ne doivent être mises en œuvre "qu’avec le consentement préalable, libre et éclairé de la personne concernée". On peut en déduire, a priori, que le consentement exprès du patient est requis pour pouvoir utiliser à des fins de recherche des échantillons prélevés dans le cadre d’une intervention médicale.

Mais cela soulève une autre question. Que se passe-t-il lorsque des recherches effectuées sur du matériel génétique prélevé sur le corps humain mènent à une invention biotechnologique qui est ensuite brevetée? Le consentement à l’utilisation de cellules aux fins de recherche devrait-il valoir autorisation de breveter les résultats de cette dernière? Devrait-on recueillir des consentements distincts?

La rate de John Moore

M. John Moore souffre de leucémie à tricholeucocytes. En 1976, le Dr David Golde, du centre médical de l’Université de Californie, recommande l’ablation de sa rate, dans le but de ralentir la progression de la maladie. M. Moore signe un formulaire de consentement, et la splénectomie est réalisée. Le Dr Golde et ses assistants de recherche prélèvent alors des cellules sur la rate de M. Moore, car ils ont découvert qu’elle présente des propriétés porteuses de grands espoirs pour le traitement du cancer. Ils s’en servent pour établir, au cours des trois années qui suivent, une lignée cellulaire à partir des lymphocytes T ainsi extraits. M. Moore n’est informé ni des travaux de recherche ni du potentiel de la lignée cellulaire en question. En 1984, le Dr Golde obtient le brevet US 4438032 et passe avec deux entreprises de biotechnologie des accords de commercialisation de sa lignée cellulaire qui vont s’avérer particulièrement lucratifs.

John Moore poursuit en justice. Il veut obtenir une part de propriété du brevet et faire condamner le Dr Golde à lui payer des dommages et intérêts pour violation de ses obligations professionnelles. En appel, la Cour suprême de Californie déclare que M. Moore n’a aucun droit à la propriété du brevet parce qu’il n’est pas l’un des inventeurs. Elle considère en outre qu’un patient ne peut prétendre à aucun droit de propriété sur des tissus corporels qui étaient destinés à la destruction. En revanche, elle statuera que le médecin a envers son patient un devoir de loyauté, en vertu duquel il doit informer celui-ci de tout intérêt économique ou personnel qu’il pourrait avoir à utiliser ou à étudier ses tissus, et que le patient peut le poursuivre s’il rompt le lien de confiance. Cet arrêt célèbre a permis d’établir la distinction entre le régime juridique de l’accès au matériel génétique et celui qui s’applique dès lors qu’il est question d’obtenir un brevet sur une invention faite à partir de ce matériel.

Le débat sur les liens de nature juridique et bioéthique entre l’accès aux ressources génétiques et le brevetage des découvertes qui en découlent n’est pas terminé pour autant. Le consentement donné par une personne à des fins de recherche peut-il être interprété comme une autorisation de breveter et de commercialiser les résultats de cette recherche? Le chercheur doit-il se voir imposer l’obligation de fournir à l’avance des informations précises sur ses futures inventions? À toutes ces questions s’ajoute enfin celle de savoir précisément à qui il devrait appartenir de donner ou de refuser le consentement – une question à laquelle il devient encore plus difficile de répondre dès lors qu’une ressource génétique (par exemple une mutation particulière) est partagée par les membres d’une même famille, d’une même communauté ou, à plus forte raison, de deux pays voisins.

L’affaire des Hagahai ou les gènes d’un peuple autochtone

Les Hagahai sont un peuple autochtone de Papouasie-Nouvelle-Guinée. En 1984, ils sont sortis de l’isolement dans lequel ils avaient vécu jusqu’alors pour demander de l’aide, leur communauté étant frappée par la maladie. Les chercheurs découvrirent chez les membres de la tribu un gène qui, bien que prédisposant l’humain à la leucémie, ne manifestait chez eux aucun symptôme. D’autres analyses leur permirent d’isoler un virus T-lymphotrophique susceptible d’être utilisé pour élaborer un vaccin contre certaines formes de leucémie. En 1991, les National Institutes of Health des États-Unis déposèrent une demande de brevet portant sur une lignée cellulaire dérivée de l’ADN d’un donneur Hagahai infecté par une variante du virus lymphotrope T humain (HTLV) propre à la Papouasie-Nouvelle-Guinée et sur des vaccins contre les infections et les maladies causées chez l’homme par le virus HTLV-1 et les virus apparentés.

Délivré dans un premier temps et ensuite abandonné, le brevet (US 5397696) suscita une vive controverse. Avait-on demandé le consentement du donneur Hagahai préalablement au dépôt de la demande? Les versions diffèrent, mais étant donné que le matériel génétique provenait d’un groupe autochtone, l’affaire revêtait un caractère particulièrement délicat et donna lieu à des accusations de biopiraterie. On ne répondit jamais non plus à la question de savoir si le consentement aurait dû être demandé à l’individu concerné, à la tribu ou à l’État.

Processus internationaux

Les questions de bioéthique et de consentement sont désormais prises en compte dans un certain nombre d’instances et d’instruments juridiques. Qui plus est, elles ne sont plus considérées seulement sous l’angle de l’utilisation de matériel génétique d’origine humaine, mais aussi sous celui des ressources végétales et animales et des ressources biologiques fondées sur les savoirs traditionnels détenus par les communautés. Parmi les instruments internationaux s’inscrivant dans ce cadre, la Convention sur la diversité biologique (CDB) fait du consentement éclairé une condition de l’accès au matériel génétique d’origine végétale ou animale. Un certain nombre de pays ont mis en place à cet égard des mesures juridiques subordonnant expressément le dépôt de brevet à l’obtention d’un consentement préalable donné en connaissance de cause. La Communauté andine a élaboré des règles régionales qui vont dans le même sens, et certains pays ont proposé d’introduire dans l’Accord sur les ADPIC de l’OMC des dispositions liant le consentement au système des brevets. Toutes ces mesures concernent plus les ressources génétiques touchant la biodiversité que le matériel génétique d’origine humaine.

La notion de consentement libre, préalable et éclairé a des incidences très variées. Elle touche des aspects de l’innovation biotechnologique qui s’étendent de la recherche médicale à la bioprospection. Alors que la Déclaration de l’UNESCO la situe dans le contexte de la dignité et de l’autonomie de la personne humaine, la CDB la lie à la souveraineté des nations sur leurs ressources et aux intérêts des communautés autochtones et locales. La manière dont doit s’articuler la relation entre le consentement éclairé et le système des brevets fait l’objet d’un débat intense et de plusieurs processus internationaux.

Comme toutes celles que nous avons examinées dans cette série d’articles, la question du consentement impose aux décideurs une réflexion sur les limites et les liens de la bioéthique et du droit, notamment en ce qui concerne la législation en matière de propriété intellectuelle. Nous espérons avoir su, par ces articles, faire mieux connaître ces questions importantes et controversées ainsi que la diversité des conceptions dont elles font l’objet.

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