OMPI

      SCCR/4/4
      ORIGINAL : anglais
      DATE : 6 avril 2000

ORGANISATION MONDIALE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE

GENÈVE

COMITÉ PERMANENT DU DROIT D'AUTEUR
ET DES DROITS CONNEXES

Quatrième session

Genève, 11, 12 et 14 avril 2000

COMMUNICATION DES ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE
SUR LA CESSION DES DROITS

présentée par les États-Unis d'Amérique_

CESSION DES DROITS

1. Le principal obstacle à l'adoption d'un traité de l'OMPI sur les droits des artistes interprètes ou exécutants qui soit universellement accepté semble tenir à la question de savoir quand et comment les droits d'autorisation exclusifs créés par le traité doivent être cédés au producteur par l'artiste interprète ou exécutant. Bien qu'un certain nombre de propositions aient été soumises au Comité permanent, aucune d'elles n'a encore fait l'objet d'un consensus suffisant.

2. Un traité international a pour but, entre autres, de conférer de la certitude quant aux droits auxquels il donne naissance ou qu'il reconnaît. À la différence des oeuvres littéraires ou musicales, les oeuvres audiovisuelles supposent la participation de nombreuses personnes qui peuvent être de nationalités diverses. De plus, la production et le financement des oeuvres audiovisuelles se faisant de plus en plus dans l'ignorance des frontières nationales, il importe au plus haut point de conférer cohérence et précision aux règles relatives à la cession et à la titularité des droits. La distribution de films est, de fait, une activité d'ordre mondial. Avec l'accès croissant à large bande sur l'Internet, la portée et le niveau de la distribution internationale vont se développer.

3. De plus, les droits prévus par ce traité constitueront, dans certaines régions, de nouveaux droits qui n'existent pas actuellement ou qui ne sont pas reconnus en tant que tels. S'agissant de ces droits nouvellement créés, pour l'application desquels aucun système n'a encore été mis en place, il est particulièrement important que le traité qui les crée traite des questions de cession et d'exercice des droits.

4. Le présent document examine les éléments indispensables à toute disposition efficace relative à la cession et analyse les propositions faites à la lumière de ces éléments.

A. ÉLÉMENTS INDISPENSABLES À TOUTE DISPOSITION EFFICACE RELATIVE À LA CESSION

5. Pour créer un environnement qui i) garantisse aux artistes interprètes ou exécutants la possibilité de négocier leurs droits et encourage par là-même l'instauration d'un solide processus de négociation collective, ii) assure aux artistes interprètes ou exécutants une rémunération équitable et suffisante, iii) permette une juste récupération des investissements à forte valeur économique réalisés dans la production cinématographique, et iv) offre des règles précises aux producteurs et aux artistes interprètes ou exécutants, il convient de répondre aux préoccupations qui suivent :

(1) La disposition sur la cession ne devrait pas s'appliquer aux droits à rémunération

6. L'un des principaux buts d'un traité relatif aux droits des artistes interprètes ou exécutants est de veiller à ce que ces artistes interprètes ou exécutants aient la possibilité d'obtenir une rémunération appropriée au titre de leur apport créatif à des films. Dans de nombreux pays, cela se fait par la négociation collective; dans d'autres, par des systèmes législatifs de droits à rémunération. Dans d'autres encore, la combinaison de ces deux systèmes s'est révélée efficace. La disposition sur la cession ne devrait pas compromettre la protection, légale ou autre, dont jouissent les artistes interprètes ou exécutants à l'heure actuelle. Si le droit à rémunération est exclu du champ de la disposition sur la cession, les artistes interprètes ou exécutants dont la protection repose en tout ou partie sur le droit légal à rémunération seront à l'abri

(2) La disposition sur la cession ne devrait pas être applicable au droit moral

7. Le droit moral garantit le droit individuel d'un artiste interprète ou exécutant à l'intégrité de son interprétation ou exécution et le droit d'être mentionné comme étant l'interprète ou l'exécutant de cette prestation. Ce droit n'a aucune importance pour les producteurs en termes de distribution de films, dans la mesure où il n'entrave pas l'exploitation normale d'un film. Au contraire, la capacité des artistes interprètes ou exécutants à exercer directement leurs droits à l'encontre des auteurs d'atteintes au droit moral contribue à l'intégrité du film.

8. À une époque où les interprétations ou exécutions fixées sur support numérique peuvent être utilisées grâce à un matériel grand public accessible à tous, et facilement distribuées sur l'Internet, il est indispensable de réserver le droit moral aux artistes interprètes ou exécutants. La capacité des artistes interprètes ou exécutants à gagner leur vie dépend largement de leur réputation. Sans cette réservation du droit moral, ils seraient incapables de protéger leurs actifs les plus importants que sont leur image et leur réputation.

(3) Toute présomption de cession de droits doit pouvoir être écartée par une convention écrite

9. Une présomption réfragable offre la possibilité de réserver les droits à l'artiste interprète ou exécutant et de procéder à des négociations contractuelles. La possibilité de négocier des conditions spécifiques qui tiennent compte des circonstances particulières de la production est nécessaire pour que les droits d'un artiste interprète ou exécutant aient un véritable contenu.

(4) La disposition sur la cession devrait être applicable à une production audiovisuelle particulière

10. Lorsqu'un artiste interprète ou exécutant donne son accord à la fixation de sa prestation, il le fait pour une production audiovisuelle particulière. Il est rémunéré au titre de la fixation de son interprétation ou exécution en vue de son exploitation dans cette production et au titre du droit de distribution de cette production, une autre rémunération au titre de la distribution de cette production étant prévue par un contrat, une convention collective, la législation ou une combinaison de ces éléments. Toute disposition sur la cession doit fournir au producteur et au distributeur d'un film des règles précises sur les droits d'autorisation. Cependant, il n'est ni souhaitable ni nécessaire d'étendre le champ de cette disposition aux interprétations ou exécutions incluses dans de nouvelles productions audiovisuelles. Les artistes interprètes ou exécutants doivent avoir le droit de négocier l'introduction de leurs interprétations ou exécutions fixées dans de nouvelles oeuvres.

(5) La disposition sur la cession ne devrait pas exiger des pays qu'ils modifient leurs systèmes relatifs à la cession des droits des artistes interprètes ou exécutants aux producteurs

11. Certains pays ont des dispositions légales conférant des droits aux producteurs, d'autres n'en ont pas. Certains pays ont des conventions collectives bien établies entre les producteurs et les artistes interprètes ou exécutants, d'autres non. La disposition sur la cession ne devrait ni l'emporter sur les systèmes juridiques existants et entraîner des changements dans la loi nationale, ni annuler les conventions collectives entre les artistes interprètes ou exécutants et les producteurs.

(6) La disposition sur la cession devrait être simple et directe

12. La disposition sur la cession devrait être simple et directe. Elle ne devrait pas favoriser l'incertitude et présenter notamment des lacunes qui devraient être résolues devant un tribunal, ni être susceptible d'utilisation abusive.

(7) La disposition relative à la cession devra tenir compte de la complexité croissante du monde de la production (coproductions, accords de cofinancement, distributions internationales, lieux de tournage situés dans différents pays, etc.)

13. Comme cela a déjà été dit, pour qu'un traité international soit efficace, il doit rendre les choses claires; si la question essentielle de la cession des droits qui sont créés est laissée entièrement aux législations nationales, il en résultera une confusion encore plus grande. Cela vaut en particulier en ce qui concerne le nombre croissant d'oeuvres audiovisuelles qui ne sont pas le produit d'un seul pays mais auxquelles participent au contraire des producteurs, des financiers et des artistes de différentes nationalités. Il faudrait également garder à l'esprit le fait que l'importance de la titularité des droits sur les oeuvres cinématographiques a été reconnue par l'article 14bis de la Convention de Berne.

14. Par ailleurs, ainsi que cela a été relevé dans l'introduction, les droits créés par ce traité seront, dans certains pays, des droits nouveaux, qui soit n'existent pas actuellement, soit ne sont pas reconnus actuellement en tant que droits distincts. S'agissant de ces droits nouveaux, et lorsqu'il n'existe aucun système les régissant, il est particulièrement important que le traité qui leur donne naissance porte sur la cession et l'exercice de ces droits.

(8) La disposition relative à la cession doit être une source de sécurité juridique pour la distribution des oeuvres audiovisuelles dans le monde

15. Les producteurs et les distributeurs d'oeuvres audiovisuelles doivent être en mesure de déterminer qui est le titulaire des droits des artistes interprètes ou exécutants et qui les exerce effectivement pour l'oeuvre considérée, d'après les dispositions du traité et des contrats écrits. Il ne faudrait pas que le traité laisse aux producteurs la tâche, extrêmement complexe, d'essayer de déterminer le droit national applicable lorsque l'oeuvre est distribuée dans le monde entier. En l'absence de sécurité juridique en la matière, il deviendra beaucoup plus difficile pour les producteurs d'assurer un financement pour les productions internationales, ce qui, par voie de conséquence, réduira les possibilités d'emploi pour les artistes interprètes ou exécutants.

B. DIFFÉRENTS POINTS DE VUE SUR LA CESSION

16. Aucune des propositions actuelles sur la cession ne satisfaisant à l'ensemble des critères définis plus haut, il n'a pas été possible d'aboutir à un consensus sur ce point.

CONCLUSION

17. Nous estimons que les consultations en cours sont capitales pour que des progrès soient enregistrés sur cette question importante. Il est indispensable d'arriver à une décision sur la question de la cession si l'on veut que le nouvel instrument bénéficie d'une large adhésion. Compte tenu de ce qui précède, les États sont instamment invités à s'associer aux débats et aux propositions susceptibles de conduire à un consensus en la matière.

[Fin du document]