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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE L’EXPERT

Guerlain SA contre S L

Litige No. DFR2011-0014

1. Les parties

Le Requérant est Guerlain SA, Paris, France, représenté par Dreyfus & Associés, France.

Le Défendeur est S L, Juvisy sur Orge, France.

2. Nom de domaine et prestataire Internet

Le litige concerne le nom de domaine <affaire-guerlain.fr> enregistré le 23 novembre 2010.

Le prestataire Internet est la société OVH.

3. Rappel de la procédure

Une demande déposée par Guerlain SA auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) a été reçue le 14 avril 2011.

Le 14 avril 2011, le Centre a adressé à l’Association Française pour le Nommage Internet en Coopération (ci-après l’“Afnic”) une demande aux fins de vérification des éléments du litige et de gel des opérations.

Le 15 avril 2011, l’Afnic a levé l’anonymat du titulaire du nom de domaine, et a confirmé qu’aucune procédure administrative applicable au nom de domaine objet du litige n’est pendante.

Le 27 avril 2011, le Centre a invité le Requérant à amender sa demande au vu des informations additionnelles fournies par l’Afnic au plus tard le 1er mai 2011.

Le Centre a vérifié que la demande répond bien au Règlement sur la procédure alternative de résolution des litiges du “.fr” et du “.re” par décision technique (ci-après le “Règlement”) en vigueur depuis le 22 juillet 2008, et applicable à l’ensemble des noms de domaine du “.fr” et du “.re” conformément à la Charte de nommage de l’Afnic applicable (ci-après la “Charte”).

Conformément à l’article 14(c) du Règlement, une notification de la demande, valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur le 4 mai 2011. Conformément à l’article 15 du Règlement, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 24 mai 2011. Le Défendeur a fait parvenir sa réponse le 24 mai 2011.

Le 27 mai 2011, le Centre nommait Christiane Féral-Schuhl comme Expert dans le présent litige. L’Expert constate qu’il a été nommé conformément au Règlement. L’Expert a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément à l’article 4 du Règlement.

4. Les faits

Le Requérant est la société Guerlain SA, parfumeur de luxe depuis 1928 qui compte des centaines de points de vente en France et dans le monde, et dont la dénomination sociale est "Guerlain".

Le Requérant est titulaire de plusieurs marques comportant le terme "guerlain" dont :

Marque française GUERLAIN n°1286665 enregistrée le 2 octobre 1984, dûment renouvelée et désignant des produits en classe 9, 14, 18 et 25 ;

Marque française GUERLAIN n°1314761 enregistrée le 2 juillet 1985, dûment renouvelée et désignant des produits en classe 3, 5, 21 et 24 ;

Marque française LES PARFUMS DE GUERLAIN n°1491970 enregistrée le 4 octobre 1988, dûment renouvelée et désignant des produits en classe 3 ;

Marque française GUERLAIN n°125773 enregistrée le 1er avril 1996, dûment renouvelée et désignant des produits en classe 3.

Le Requérant est également titulaire des noms de domaine <guerlain.com>, <guerlain.tel>, <guerlain.net>, et <guerlain.fr>.

Le Requérant a connu une certaine médiatisation du fait de propos tenus par Monsieur Guerlain lors du journal télévisé d’une chaîne française du 15 octobre 2010.

Le 23 novembre 2010, le Défendeur a enregistré le nom de domaine <affaire-guerlain.fr>.

Le site ne comprend qu’un bandeau au terme duquel :

"Ce site est un espace de communication permettant aux internautes de donner leur avis.

Envoyez-nous votre avis à : avisdesinternautes@live.fr"

C'est dans ce contexte que le Requérant a engagé une procédure alternative de résolution des litiges devant le Centre aux fins d'obtenir la transmission du nom de domaine <affaire-guerlain.fr> à son profit.

5. Argumentation des parties

A. Requérant

Le Requérant fait valoir qu’il détient des droits sur le terme "guerlain" puisqu’il est titulaire de nombreuses marques et noms de domaine comportant le terme "guerlain", que la marque GUERLAIN est une marque notoire et que le terme "guerlain" constitue sa dénomination sociale.

Le Requérant expose que la réservation du nom de domaine litigieux porte atteinte à ses droits de marque et que le Défendeur ne justifie pas d’un droit ou d’un intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux.

Le Requérant prétend ainsi qu’il existe un risque de confusion entre le nom de domaine litigieux et la marque notoire GUERLAIN et que ce risque n’est ni écarté par l’association avec le terme "affaire" ni par l’insertion d’un tiret entre ces deux termes.

Le Requérant ajoute que la marque GUERLAIN était enregistrée avant le nom de domaine litigieux et que le Défendeur ne pouvait méconnaître la marque vu sa notoriété. Le Requérant souligne encore que la réservation du nom de domaine litigieux fait suite aux propos tenus par Monsieur Guerlain lors du journal télévisé d’une chaîne française du 15 octobre 2010 qui ont suscité de nombreuses réactions et que le Défendeur a ainsi profité de la médiatisation de l’affaire.

Le Requérant soutient également que l’enregistrement du nom de domaine litigieux affaiblit le pouvoir distinctif et attractif de la marque et entraîne sa vulgarisation.

Le Requérant considère enfin que le Défendeur a usurpé la dénomination sociale du Requérant.

Le Requérant demande en conséquence la transmission du nom de domaine litigieux à son profit.

B. Défendeur

Le Défendeur se borne à indiquer que suite à l’affaire concernant les propos tenus par Monsieur Guerlain lors du journal télévisé d’une chaîne française du 15 octobre 2010 qui a fait la une des journaux français, il a décidé de créer un site Internet dédié à cette affaire et permettant aux internautes de donner leur avis.

Si le Défendeur cite la décision n°2010-45 QPC du 6 octobre 2010 du Conseil Constitutionnel qui a considéré l’article L.45 du code des postes et des communications électroniques, relatif à l’attribution des noms de domaine, contraire à la Constitution, ainsi que la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, le Défendeur n’en tire aucune conséquence ni conclusion.

6. Discussion

A titre préliminaire, l’Expert précise que dans la mesure où la jurisprudence et les articles évoqués par le Défendeur sont dépourvus de conclusion ou d’argumentation, l’Expert n’est pas en mesure de statuer sur ces éléments.

L’Expert constate que le Requérant invoque un enregistrement et une utilisation des noms de domaine litigieux par le Défendeur en violation de ses droits et sollicite, en conséquence, le transfert à son profit du nom de domaine litigieux.

L’Expert rappelle que, en application de l’article 20(c) du Règlement, il fait droit à la demande “lorsque l’enregistrement ou l’utilisation du nom de domaine par le défendeur constitue une atteinte aux droits des tiers ou aux règles de la concurrence telles que définies à l’article 1 du présent Règlement et, si la mesure de réparation demandée est la transmission du nom de domaine, lorsque le requérant a justifié de ses droits sur l’élément objet de ladite atteinte et sous réserve de sa conformité avec la Charte applicable”.

L’Expert souligne qu’en application de l’article 1 du Règlement :

- une atteinte aux droits des tiers est constituée “lorsque le nom de domaine est identique ou susceptible d’être confondu avec un nom sur lequel est conféré un droit de propriété intellectuelle français ou communautaire (propriété littéraire et artistique et/ou propriété industrielle), ou est identique au nom patronymique d’une personne, sauf si le défendeur fait valoir un droit ou un intérêt légitime sur le nom de domaine et agit de bonne foi”;

- une atteinte aux règles de la concurrence désigne “une atteinte aux règles de la concurrence et du comportement loyal en matière commerciale en droit français ou communautaire”.

En conséquence, l’Expert s’est attaché à vérifier, au vu des arguments et pièces soumis par les parties, si l’enregistrement ou l’utilisation du nom de domaine litigieux porte atteinte aux droits du Requérant.

(i) Droits du requérant sur le nom de domaine

Le Requérant apporte la preuve de ses droits sur le terme "guerlain".

En effet, comme en attestent les certificats d’enregistrement fournis et les fiches WhoIs, le Requérant est titulaire de marques et de noms de domaine comportant le terme "guerlain".

Par ailleurs, le Requérant a pour dénomination sociale "Guerlain".

L’Expert considère donc que le Requérant démontre être titulaire de droits sur la marque GUERLAIN qui constitue l’élément essentiel du nom de domaine litigieux.

En conséquence, l’Expert considère que le Requérant bénéficie de droits sur les termes composant le nom de domaine litigieux.

(ii) Enregistrement ou utilisation du nom de domaine litigieux en violation des droits des tiers ou des règles de la concurrence

L’Expert constate que le nom de domaine litigieux a été enregistré par le Défendeur postérieurement aux dépôts des marques du Requérant.

L’Expert constate également que le nom de domaine litigieux constitue la reproduction de la marque du Requérant auquel est simplement ajouté le terme générique "affaire" et l’insertion d’un tiret entre les deux termes ainsi que l’extension " .fr".

L’Expert considère que cet ajout ne dissipe pas la similarité entre le nom de domaine litigieux et les marques du Requérant, l’élément essentiel du nom de domaine litigieux étant constitué par le terme “guerlain”.

A cet égard, l’Expert considère que la décision Les Laboratoires Servier, Biofarma, et Monsieur Jacques Servier contre Samir Laroussi Robio, Litige OMPI No. DFR2011-0004 invoquée par le Requérant est pertinente et démontre que la question s’est déjà posée dans des termes identiques sur le nom de domaine <affaire-servier.fr>. Dans la décision précitée, l’expert avait relevé le risque de confusion entre le nom de domaine litigieux et les droits dont disposent le Requérant.

En conséquence, l’Expert considère que le nom de domaine litigieux est susceptible d’être confondu avec la marque GUERLAIN sur lequel le Requérant justifie être titulaire de droits de propriété intellectuelle français, sans que l’ajout du terme générique "affaire" n’amoindrisse ce risque de confusion.

L’Expert s’est ensuite attaché à vérifier si le Défendeur fait valoir un droit ou un intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux et s’il a agit de bonne foi.

L’Expert relève tout d’abord que le Défendeur a choisi le nom de domaine litigieux en référence à l’actualité et afin de permettre aux internautes de donner leur avis sur une affaire d’actualité.

Toutefois, la poursuite d’un objectif d’information au public ne peut rendre légitime l’utilisation d’un nom de domaine comportant à l’identique la marque d’un tiers. En effet, l’usage de la marque du Requérant dépasse la simple citation de la marque comme celle qui pourrait être faite dans le corps d’une page Internet.

De plus, l’Expert estime que même si la liberté d’expression permet de citer des marques aux fins d’expression d’opinions ou de critiques, elle ne donne pas le droit de reprendre à l’identique la marque d’un tiers dans un nom de domaine (voir par exemple The Royal Bank of Scotland Group plc, National Westminster Bank plc A/K/A NatWest Bank v. Personal and Pedro Lopez, Litige OMPI No. D2003-0166).

En outre, l’Expert ne constate pas un usage par le Défendeur de sa liberté d’expression sur son site Internet puisqu’aucun contenu éditorial n’est développé (voir par exemple Aéroports de Paris contre Frédéric Henriot, Litige OMPI No. D2007-002). En effet, le site Internet du Défendeur ne fait aucune référence aux propos tenus par Monsieur Guerlain lors du journal télévisé d’une chaîne française du 15 octobre 2010, ne donne aucun détail ou information sur l’affaire et ne reproduit pas plus les prétendus avis des internautes sur l’affaire. Ainsi le site ne comporte aucun contenu si ce n’est la phrase suivante : "Ce site est un espace de communication permettant aux internautes de donner leur avis. Envoyez-nous votre avis à : avisdesinternautes@live.fr".

L’Expert constate donc que le site litigieux n’héberge aucun contenu à valeur informative alors même que plusieurs mois se sont écoulés depuis l’affaire à laquelle le nom de domaine se réfère.

Par conséquent, l’Expert considère qu’en l’espèce, le Défendeur ne justifie pas d’un droit ou d’un intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux et ne peut prétendre agir de bonne foi.

L’enregistrement et l’utilisation du nom de domaine litigieux par le Défendeur constitue donc une atteinte aux droits du Requérant.

7. Décision

Conformément aux articles 20(b) et (c) du Règlement, l’Expert ordonne la transmission au profit du Requérant du nom de domaine <affaire-guerlain.fr>.

Christiane Féral-Schuhl
Expert
Le 9 juin 2011