WIPO

Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

 

DÉCISION DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE

NOVAPRESS contre Monsieur Jean Real

Litige n° D2008-0650

 

1. Les parties

Le requérant est NOVAPRESS, Paris, France, représenté par le cabinet NeoLex, France.

Le défendeur est Monsieur Jean Real, Wasquehal-Lille, France, et Esposende, Portugal.

 

2. Noms de domaine et unité d’enregistrement

Le litige concerne les noms de domaine <nova7.net> et <radio-nova7.com>.

<nova7.net > a été enregistré le 25 octobre 2005.

<radio-nova7.com> a été enregistré le 18 octobre 2006.

L’unité d’enregistrement auprès de laquelle les noms de domaine sont enregistrés est Schlund + Partner

 

3. Rappel de la procédure

Une plainte a été déposée par NOVAPRESS auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 25 avril 2008. La plainte a été reçue au Centre sur support papier le 30 avril 2008.

En date du 29 avril 2008, le Centre a adressé une requête à l’unité d’enregistrement des noms de domaine litigieux, Schlund + Partner aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. L’unité d’enregistrement a confirmé l’ensemble des données du litige en date du 29 avril 2008.

Le 7 mai 2008 le requérant a adressé au Centre un amendement à la plainte portant uniquement sur la mesure de réparation. Le Centre en a accusé réception le 8 mai 2008. L’exemplaire sur support papier est parvenu au Centre le 9 mai 2008.

Le Centre a vérifié que la plainte répond bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés “Principes directeurs”), aux Règles d’application des Principes directeurs (ci-après dénommées les “Règles d’application”), et aux Règles supplémentaires de l’OMPI (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”) pour l’application des Principes directeurs précités.

Conformément aux paragraphes 2(a) et 4(a) des Règles d’application, le 13 mai 2008, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au défendeur. Conformément au paragraphe 5(a) des Règles d’application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 2 juin 2008. Le défendeur n’a fait parvenir aucune réponse. En date du 3 juin 2008, le Centre notifiait le défaut du défendeur.

En date du 13 juin 2008, le Centre nommait dans le présent litige comme expert unique Jean-Claude Combaldieu. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d’application.

 

4. Les faits

Le Requérant, la société Novapress, exploite par l’intermédiaire de sa filiale, la société Radio Nova, une radio appelée “Radio Nova”, parfois communément désignée par le terme “Nova”.

Novapress est titulaire des marques suivantes :

Marque verbale française NOVA n° 00 3 029 684 déposée le 23 mai 2000 en classes 9, 16, 35, 38, 41 et 42.

Marque française semi figurative RADIO NOVA n° 00 3 029 691 déposée le 23 mai 2000 en classes 9, 38 et 41.

Marque internationale semi figurative NOVA n°756 022 déposée le 5 février 2001 en classes 9, 16, 35, 38, 41 et 42.

“Radio Nova” constitue en outre la dénomination sociale de la société “Radio Nova”, également filiale du groupe NOVA, créée en 1988.

 

5. Argumentation des parties

A. Requérant

Le requérant, “Novapress S. A.”, expose qu’il exploite par l’intermédiaire de sa filiale “Radio Nova” une radio musicale FM communément désignée sous le nom de “Nova”. Il ajoute que “Radio Nova”, qui existe depuis 1981, fait partie des radios musicales les plus renommées grâce à la personnalité de son fondateur Jean-François Bizot, grâce à la renommée de ses présentateurs et aussi grâce à son action de précurseur dans l’émergence de nouveaux mouvements musicaux.

Le nombre de pages consacrées à “Radio Nova” sur le site de recherche Google atteste de cette notoriété.

Cette notoriété s’étendrait au-delà de la radio, en effet il existe aussi un site “www.novaplanet.com” qui traite de l’actualité musicale et culturelle ainsi qu’un mensuel de presse Nova Magazine.

Après cette présentation générale, le requérant expose qu’il est titulaire de marques NOVA et RADIO NOVA antérieures à l’enregistrement des deux noms de domaine litigieux. Ces marques sont visées ci-dessus au point 4 sous le titre “Les faits”.

Le requérant ajoute qu’il détient en outre une marque française NOVA 101.5 C’EST NOUVEAU, C’EST NOVA n°1414 209 déposée le 16 novembre 1994 en classes 9,16, 35, 38, 41, renouvelée en 2004.

Enfin il rappelle que “Radio Nova” est la dénomination sociale de sa filiale “Radio Nova” depuis 1988 et que la société “Novanet”, filiale de “Novapress”, est titulaire des noms de domaine <novaplanet.fr> et <novaplanet.com>.

Ces préliminaires étant posés, le requérant s’attache à démontrer les trois éléments prévus au paragraphe 4(a) des Principes directeurs :

(a) Sur le premier élément, le requérant soutient que les deux noms de domaine <radio-nova7.com> et <nova7.net> sont similaires au point de prêter à confusion avec ses marques RADIO NOVAet NOVA.

Le requérant allègue que les marques NOVA et RADIO NOVA sont intégralement reproduites dans les deux noms de domaine litigieux. De plus, après avoir rappelé qu’il n’y a pas lieu de retenir les extensions “.com” et “.net”, le requérant estime que l’adjonction du chiffre “7” et du tiret constituent des différences insignifiantes et dénuées de tout caractère distinctif qui n’éliminent pas le risque de confusion.

Bien au contraire le chiffre “7” suggèrerait une déclinaison des marques appartenant au requérant.

Il est ajouté que les deux sites litigieux sont utilisés pour des activités identiques ou similaires à celles énumérées dans les dépôts de marques.

(b) Concernant le deuxième élément, le requérant allègue qu’il n’existe aucune relation de quelque ordre que ce soit entre “Novapress” et le défendeur. En particulier le défendeur, Monsieur Jean Real, n’a reçu aucune autorisation pour déposer ou utiliser des noms de domaine identiques ou similaires aux marques du requérant.

L’intention du défendeur serait bel et bien de détourner à des fins lucratives les clients de “Novapress” en créant une confusion auprès des consommateurs.

(c) Quant au troisième élément, le requérant souhaite que la volonté du défendeur de créer une confusion avec les marques et les activités de “Novapress” est patente :

RADIO NOVA et NOVA seraient extrêmement connues dans le domaine de la radio musicale, la production musicale et audiovisuelle. Le défendeur, qui a mené ses propres activités dans le même domaine ne pouvait ignorer raisonnablement l’existence de RADIO NOVA de sorte qu’il a enregistré et utilisé les deux noms de domaine de parfaite mauvaise foi.

De plus, le défendeur aurait ignoré les mises en demeure qui lui ont été adressées par courriel en juin 2007 par Monsieur Bruno Delport, directeur général de “Novapress”, puis par lettre recommandée avec avis de réception en date du 10 juillet 2007 par le Cabinet NeoLex, conseil du requérant.

Le requérant soutient qu’il en résulte que le défendeur a bien enregistré et utilisé les sites litigieux de mauvaise foi.

En conclusion générale le requérant demande, dans son amendement à la plainte, que les deux sites litigieux lui soient transférés.

B. Défendeur

Le défendeur est défaillant et n’a donc présenté aucun argument en réponse.

 

6. Discussion et conclusions

Le paragraphe 15(a) de Règles indique à la Commission administrative les principes de base à utiliser pour se déterminer à l’occasion d’une plainte : la Commission doit décider sur la base des exposés et documents soumis selon les Principes directeurs et Règles d’application ainsi que toutes les règles ou principes légaux qui lui semblent applicables.

Appliqué à ce cas, le paragraphe 4(a) des Principes directeurs indique que le requérant doit prouver chacun des points suivants :

(i) Le nom de domaine enregistré par le défendeur est identique ou semblable au point de prêter à confusion à la marque invoquée par le requérant; et

(ii) Le défendeur n’a aucun droit sur le nom de domaine enregistré ni aucun intérêt légitime qui s’y attache; et

(iii) Le nom de domaine a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi.

A. Identité ou similitude prêtant à confusion

Les marques du requérant, la société “Novapress”, sont les trois marques citées ci-dessus au point 4, à savoir les deux marques françaises NOVA et RADIO NOVA ainsi que la marque internationale NOVA.

Nous observons que ces trois marques sont déposées dans des classes de produits et services qui concernent, pour résumer l’essentiel, la radio, la musique, l’audiovisuel et la culture.

Il n’est pas contestable que “Radio Nova” et “Nova” sont des termes bien connus des consommateurs qui écoutent la radio FM.

Les deux sites litigieux, à savoir “www.radio-nova7.com” et “www.nova7.net” reproduisent sans ambiguïté les termes “Nova” et “Radio Nova” qui sont les éléments distinctifs des marques appartenant au requérant.

Par ailleurs le chiffre “7” et le tiret ajouté entre RADIO et NOVA ne nous paraissent pas de nature à faire échapper à la confusion tant visuellement que phonétiquement. Nous sommes d’avis, comme le requérant, que l’adjonction du chiffre “7” fait penser à une déclinaison des marques appartenant au requérant.

Nous rappelons qu’il est de jurisprudence constante qu’il ne doit pas être tenu compte des extensions “.net” et “.com” pour apprécier la similarité.

Dans ces conditions nous estimons que les deux noms de domaine litigieux sont similaires au point de prêter à confusion avec les marques du requérant.

B. Droits ou légitimes intérêts

Le requérant a établi que le défendeur n’avait aucun droit ni intérêt légitime sur les deux noms de domaine litigieux. En effet, ce dernier n’a reçu aucune autorisation d’utiliser les marques de NOVAPRESS.

Etant défaillant dans la présente procédure le défendeur n’apporte aucune preuve contraire.

En conséquence il est établi que le défendeur n’a aucun droit ou intérêt légitime sur les noms de domaine litigieux.

C. Enregistrement et usage de mauvaise foi

Il nous parait impensable que le choix des termes “Nova” et “Radio Nova” par le défendeur dans les noms de domaine qu’il a enregistrés soit le fruit du hasard.

Les marques du requérant étant bien connues chez les auditeurs de la radio, la commission considère qu’il est évident qu’au moment de l’enregistrement, le défendeur a choisi ces termes afin de créer une confusion avec les marques du requérant et de détourner la clientèle à des fins lucratives. L’adjonction du chiffre “7” et du tiret, accentue au contraire le but de confusion recherché. C’est le premier élément de mauvaise foi.

La commission estime que le requérant a prouvé que l’usage qui est fait de ces noms de domaine est sensiblement le même que l’usage qu’il fait de ses marques. Le requérant a versé au dossier un constat d’huissier du 27 juillet 2007 qui atteste de l’activité du défendeur.

L’usage des deux noms de domaine litigieux par le défendeur est donc tout autant de mauvaise foi.

Il en est d’autant plus ainsi que le défendeur a refusé de répondre positivement aux mises en demeure qui lui ont été faites par le directeur général de “Novapress” puis par le conseil de cette dernière société.

 

7. Décision

Vu les paragraphes 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d’application, la Commission administrative ordonne que les noms de domaine <nova7.net> et <radio-nova7.com> enregistrés par Monsieur Jean Real soient transférés au requérant la société “Novapress”.


Jean-Claude Combaldieu
Expert Unique

Le 27 juin 2008