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DECISION DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE

Société Slumberland France c./ Société Dotcomway

Affaire N°D2000-0803

 

1. Les Parties

Le Requérant est la Société Slumberland France, 11, rue du 17 novembre – 68100 Mulhouse, France. Slumberland France est la nouvelle dénomination de la société Holding Epeda Merinos depuis que Slumberland France a fusionné par absorption avec la société des matelas Merinos.

Ce Requérant indique pour être contacté l’adresse suivante : 2 bis, rue Stéphenson, Saint-Quentin en Yvelines; tél. : 01.34.52.34.52 et fax : 01.34.52.36.37. Le mandataire du Requérant est le Cabinet Plasseraud, 84 rue d’Amsterdam 75440 Paris Cedex 09; Tél : +33 (0)1 44.63.41.11; Fax : +33 (0)1.42.80.01.59; E-mail : info@plass.com. Le contact est G.Kiesel Le Cosquer ou B. Dejardins.

Le Défendeur est la Société Dotcomway, 42 Avenue Montaigne , 75008 Paris, France; Tel : +33 6.12.89.46.91; E-mail : dcw@dotcomway.com.

Le mandataire du Défendeur est Maître Grégoire Goussu, 26 Cours Albert 1er , 75008 Paris, France; Tel : +33 (0)1.30.75.60.98; Fax : +33 (0)1.40.75.37.53; E-mail : goussu@gide.fr.

 

2. Le Nom de Domaine et l’Unité d’Enregistrement

Le litige concerne le Nom de Domaine "MERINOS.COM".

L’unité d’enregistrement auprès de laquelle le Nom de Domaine est enregistré est : Network Solutions Inc., 505 Huntmar Park Drive, Herndon, Virginia, 20170 U.S.A

 

3. Procédure

Une plainte a été déposée auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI (le Centre) le 17 juillet 2000 par courrier électronique et reçue sur support papier le 20 juillet 2000. Il a été accusé de réception de la plainte le 19 juillet 2000.

Le 19 juillet 2000, une demande de vérification d’enregistrement a été envoyée et la réponse à cette demande a été reçue de Network Solutions le 21 juillet 2000.

Le 28 juillet 2000 la plainte a été notifiée au défendeur (reçue le 30 juillet 2000) et une procédure administrative a été ouverte. A la même date, le respect des conditions de forme a été vérifié. Le Défendeur devait faire parvenir sa réponse au plus tard le 15 août 2000 et un délai supplémentaire lui a été accordé jusqu’au 15 septembre 2000.

Le 19 septembre 2000, il a été accusé réception de la réponse du Défendeur et le même jour, le Requérant a fait tenir des observations sur la Réponse du Défendeur.

L’Expert unique a accepté sa mission le 21 septembre 2000 et remis une déclaration d’impartialité et d’indépendance.

Le litige entre dans le champ d’application des Principes directeurs régissant le règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine et la Commission administrative est compétente pour arrêter une Décision. L’acte d’enregistrement par lequel le nom de domaine, objet de la plainte, a été enregistré implique l’acceptation des Principes directeurs.

Le nom de domaine a été enregistré le 18 novembre 1998.

Bien que la langue du contrat d’enregistrement soit l’Anglais, les parties sont toutes deux françaises et la plainte et la réponse et documents annexes ont été soumis en Français. Ces circonstances amènent la Commission à décider, par application de l’article 11 des Règles, que la procédure doit être conduite en Français.

La Décision est rendue dans le délai expirant le 5 octobre 2000.

 

4. Les Faits

La société Slumberland France, Requérant, est titulaire de diverses marques :

France :

" MERINOS le site internet des réveils en beauté"

N° 97709231 , déposée le 12/12/1997

"MERINOS le site internet de la literie"

N° 97709230, déposée le 12/12/1997

"PRIMA collection de MERINOS"

N° 96649890, déposée le 08/11/1996

"MERINOS"

N° 1593886, déposée le 09/06/1965

"MERINOS , suspension carénée, le matelas des réveils en beauté"

N° 1576826, déposée le 22/02/1990

International :

"MERINOS suspension carénée, le matelas des réveils en beauté"

N° 730351, déposée le 16/03/2000 ( France, Bénélux, Espagne, Italie, Monaco, Portugal)

"MERINOS"

N° 550892, déposée le 06/03/1990 ( Allemagne, Bénélux, Espagne, Italie, Monaco, Suisse, Portugal)

Marque enregistrée en Corée :

"MERINOS"

N° 253529, déposée le 03/11/1992

Pour désigner divers produits des classes 6, 12 et 20 et notamment "articles de literie (à l’exception du linge de lit) , y compris les sommiers et les matelas"; " matelas, sommiers, lits, dosserets et tous accessoires de literie; carcasses à ressorts pour coussins et matelas, coussins , en particulier coussins d’automobiles, accessoires d’automobiles, articles divers en fil ou tube métallique; articles moulés ou façonnés en matières plastiques non compris dans d’autres classes" (annexe 3 de la Plainte).

Le Requérant dispose du nom de domaine : "merinos.tm.fr" ( Pièce 6 de la Réponse).

La société Dotcomway, Défendeur, a enregistré à son nom auprès de NETWORK SOLUTIONS, Inc. le nom de domaine "merinos.com" le 18 novembre 1998.

 

5. Prétentions des parties

(a) Requérant

La société Slumberland France , Requérant, demande à la Commission administrative de rendre une décision ordonnant que le nom de domaine "merinos.com" lui soit transféré (paragraphe 3, b), x), des Règles).

Au soutien de sa plainte sur le fondement du paragraphe 4 (a) (b) (c), des Principes directeurs et paragraphe 3 des Règles, elle avance les arguments suivants.

- Le nom de domaine "merinos.com" est identique dans sa partie caractéristique aux marques n° 1593686 et 550892 du Requérant , engendrant donc un risque de confusion avec celles-ci, risque existant également avec les autres marques complexes du Requérant, comportant le mot "mérinos", détachable, distinctif et essentiel.

- Le Défendeur ne détient pas de droit ou d’intérêt légitime qui pourrait justifier le dépôt à son nom du nom de domaine en question car le Défendeur n’a sur ce signe aucun droit de marque, et qu’il n’est ni la dénomination sociale, le nom commercial ou l’enseigne de ce dernier. En outre, Requérant et Défendeur n’ont aucun lien et le Requérant n’a pas donné d’autorisation au Défendeur d’enregistrer ledit nom de domaine.

- L’enregistrement du nom de domaine en cause a été fait de mauvaise foi en ce que le Défendeur, domicilié en France, ne pouvait ignorer l’existence de la marque très connue "mérinos" pour désigner des articles de literie et a donc enregistré le nom de domaine en cause dans une volonté déterminée de profiter de cette notoriété en empêchant le Requérant de poursuivre ses efforts publicitaires en créant son propre site "merinos.com". De plus, le défendeur est coutumier de telles pratiques puisque l’accès au site dont le Défendeur est titulaire : "dotcomway.com" permet de constater que l’activité principale du Défendeur est l’achat et la vente de noms de domaine. Le Requérant prétend donc qu’il "est très probable que le Défendeur a procédé à l’enregistrement du nom de domaine litigieux (…) dans l’unique but de vendre ce signe".

(b) Défendeur

- Le Défendeur soutient que le terme "mérinos" a un sens en soi pour désigner une race de mouton et, par extension, la laine et que ce mot, pour désigner des articles de literie, est de validité discutable. Il ajoute que le principe de spécialité gouvernant le droit des marques implique que la propriété du terme "mérinos", pour désigner les produits précités, ne peut permettre au titulaire de la marque d’empêcher les tiers d’user du même terme pour des produits ou services ni identiques ni similaires. Il prétend, en outre, qu’il n’est pas démontré par le Requérant que la marque "mérinos" serait notoire et que, quand bien même elle le serait, l’utilisation par les tiers du signe en cause pour des produits que ce mot désigne dans le langage courant ou dont il décrit une des qualités essentielles, ne crée aucun risque de confusion et ne porte pas atteinte à la marque.

- Le Défendeur avance, en second lieu, que son activité est de créer, exploiter et développer des sites internet et qu’en 1998 il a souhaité créer un "portail" consacré à la laine et aux articles en laine et a enregistré à cet effet les noms de domaine "lambswool.com", "cachemires.com" et "merinos.com". Il indique que, dans un premier temps, il a créé des pages de liens " sur des grands intervenants du secteur" et a ensuite supprimé ces liens lorsque la construction du site a été achevée, site en ligne depuis septembre 2000. Ce site est exclusivement consacré à des vêtements en laine de mérinos, cachemire et lambswool qui n’ont rien de commun avec les produits du Requérant.

- Le Défendeur prétend, en troisième lieu, n’avoir pas agi de mauvaise foi en ce qu’il conteste que la marque "mérinos" jouirait d’une grande notoriété en France et redit que quand bien même la marque serait notoire, le but du Défendeur – ouvrir un site consacré à la commercialisation d’articles en laine- sous pareil nom de domaine , descriptif à cet égard, est exclusif de mauvaise foi. Il ajoute que, dans ces conditions, il n’a pas, comme le prétend le Requérant "sciemment tenté d’ attirer à des fins lucratives les utilisateurs de l’internet sur un site web en créant une probabilité de confusion avec la marque notoire du Requérant". Il précise que son nom de domaine "merinos.com" n’empêche pas le Requérant d’avoir une activité sur Internet puisque le Requérant est titulaire du nom de domaine "merinos.tm.fr", ce qui est adapté en ce que l’éventuelle notoriété de la marque ne dépasserait pas le territoire français. Le Défendeur indique, encore, que s’il y a eu un temps un lien informatique entre lui (Dotcomway) et d’autres sites, n’appartenant pas au Défendeur, et offrant des services plus larges que l’achat et la vente de noms de domaine, ces liens ont été interrompus et que de toutes manières lorsque le Défendeur a été contacté par le Requérant fin 1999, le Défendeur n’a à aucun moment proposé au Requérant de lui céder le nom "mérinos.com". Le Défendeur relève, également, que la Pièce 12 du Requérant laisse croire à tort que les termes "merinos.com" auraient été mis en vente par le Défendeur sur une page du site "hitdomains.com" alors que c’est le Requérant lui-même qui, en remplissant un formulaire pour faire une offre d’achat, a introduit ce nom dans cette page.

- Le Défendeur termine sa Réponse en soulignant que lorsque le Requérant conclut son argumentation en indiquant : "il est donc probable que le Défendeur a procédé à l’enregistrement du nom de domaine : "merinos.com" en sachant que ce signe est très connu pour désigner des articles de literie et dans l’unique but de vendre ce signe", ceci révèle que le Requérant reconnaît ne pas avoir apporté la preuve de la mauvaise foi du Défendeur et que ses affirmations sont purement spéculatives.

c) Réplique du Requérant

En réplique à la Réponse du Défendeur, le Requérant a fait état des arguments suivants.

A supposer que la marque "mérinos" ait eu une faible distinctivité, au jour du dépôt, cette distinctivité s’est renforcée par l’usage constant en sorte que la marque doit être reconnue valable.

La marque "mérinos" est notoire et les marques notoires disposent d’une protection étendue.

Le Défendeur n’utilise pas le mot "mérinos" dans son sens descriptif car le site "merinos.com" traite aussi de laine cachemire et lambswool : seule la dénomination "laine.com" aurait une réelle valeur descriptive.

Le Requérant "est en droit de se demander pourquoi" le Défendeur utilise "mérinos.com" pour son site qui ne traite pas que de laine mérinos, "sinon pour profiter indûment de la notoriété de la marque et capter de nombreux utilisateurs attirés par une marque connue". Ce qui est corroboré par le fait que le Défendeur a choisi "mérinos", désignation en français du mouton de cette race, alors que ce mouton est appelé "merino" en anglais, espagnol, italien et allemand.

Plus spécialement sur la mauvaise foi, le Requérant relève une contradiction entre la reconnaissance par le Défendeur, dans sa Réponse, de l’existence d’un lien avec des sites de ventes aux enchères de nom de domaine pendant un temps et un courrier du Défendeur indiquant n’être affilié en aucune façon aux sites "hitdomains.com" et "greatdomains.com".

Le Requérant fait état d’échange de correspondances entre les Conseils des parties.

Le Requérant indique encore : "Compte tenu du fait que l’apparition du contenu du site "merinos.com" sert de base essentielle pour fonder l’argumentation du défendeur, nous ne pouvons croire que la date de cette création soit le fruit d’un pur hasard et que la demande de report de date pour répondre à la plainte soit uniquement due à la période estivale. De même, la suppression du lien qui existait au moment du dépôt de la plainte avec les sites de vente aux enchères de noms de domaine (…) apparaît très inopiné et ce, d’autant plus que, contrairement à ce que soutient le Défendeur, ces liens n’étaient en aucun cas nécessités par la mise en place du portail "merinos.com" puisque ces liens existaient non pas par une connexion à "merinos.com", mais à "dotcomway.com" (…) "En effet, il peut être difficilement soutenu qu’un lien avec un site spécialisé dans la vente de noms de domaine, qui plus est, présentant tous la caractéristique d’être des noms de domaine descriptifs, comme Cachemire, Lambswool ou comme le soutient le Défendeur (et qui est contesté par le Requérant) Mérinos, soit le fruit d’un pur hasard".

 

6. Discussion

Le paragraphe 15 (a) des Règles prévoit que "La commission statue sur la plainte au vu des écritures et des pièces qui lui ont été soumises et conformément aux Principes directeurs, aux présentes Règles et à tout principe ou règle de droit qu’elle juge applicable".

La Commission fera, ci-après, référence à certaines dispositions du droit français, les parties étant toutes deux de nationalité française.

Le paragraphe 4 (a) des Principes directeurs impose au Requérant de prouver contre le Défendeur cumulativement que :

(a) Son nom de domaine est identique ou semblable au point de prêter à confusion, à une marque de produits ou de services sur laquelle le Requérant a des droits.

(b) Il n’a aucun droit sur le nom de domaine ni aucun intérêt légitime qui s’y attache.

(c) Son nom de domaine a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi.

1. Identité ou similarité

Le Requérant dispose depuis longtemps à titre de marque, notamment française, du signe "MERINOS", seul ou suivi de formules nominales essentiellement descriptives, pour désigner des articles de literie et divers produits des classes 6, 12 et 20.

Le défendeur a enregistré le nom de domaine "merinos.com" et a ouvert un site internet – activité de communication –, de commercialisation de vêtements et accessoires en laine (les produits promus étant affectés de marques différentes).

Au regard des signes eux-mêmes : "MERINOS", il convient de constater leur identité, du moins en écriture majuscule, également utilisée par les deux parties.

En revanche, pour ce qui est des produits ou services désignés par les marques en cause du Requérant sur lesquelles le Requérant a des droits, il y a lieu de considérer qu’il ne s’agit que des produits : articles de literie (matelas, sommiers, lits et accessoires) et que lesdites marques n’ont pas désigné les services de communication de la classe 38 auxquels la notion de nom de domaine renvoie nécessairement, sinon exclusivement (rappr. TGI Paris, 3ème ch., 24 mars 2000, Pagotto c/ Gallopin, : Revue Communication, Commerce électronique, juin 2000, p. 20 s., obs.C.Caron).

A cet égard et en raison du principe de spécialité des marques, la preuve de la situation visée au paragraphe 4 (a) des Principes directeurs n’est pas rapportée.

Il n’en serait autrement que dans le cas où le Requérant établirait que ses droits de marques sont méconnus par l’enregistrement du nom de domaine en cause en raison de la notoriété des marques et ce par application des articles 16. 2 et 3 de l’Accord sur les ADPIC ou, pour ce qui est du droit interne français, de l’article L.713-5 du Code de la propriété intellectuelle.

La Commission relève, en premier lieu, que si les pièces annexées (5 à 11) à la Plainte font état d’investissements publicitaires importants, ces dernières années, de "Mérinos" dans le domaine de la literie, il demeure que la marque "Mérinos" n’atteint pas la notoriété d’une autre marque du Requérant, la marque "Epeda" et que "Mérinos" est moins connue , selon les années et/ou les techniques de sondage, que "Epeda", Dunlopillo", "Simmons",ou "Treca".

La Commission relève, en second lieu, que le mot "Mérinos" n’est pas un terme de fantaisie sans signification particulière, mais la désignation attestée par les dictionnaires d’une race de mouton et, par extension, de sa laine, ce qui aurait justifié, aux dires du Défendeur, le choix de ce nom pour un domaine – site internet consacré à la commercialisation de vêtements en laine (Rappr. Décision OMPI n° D2000-0752).

La Commission conclut que la notoriété moyenne des marques "Mérinos" du Requérant, alliée au caractère partiellement descriptif du mot "Mérinos" pour des vêtements en laine commercialisés par l’accès au nom de domaine "merinos.com", aujourd’hui site actif du Défendeur, font qu’il n’est pas établi que l’usage du terme "merinos" comme nom de domaine et comme nom de domaine de promotion de vêtements en laine "indique un lien entre ces produits ou services et le titulaire de la marque enregistrée, ni que cet usage risque de nuire aux intérêts du titulaire de la marque enregistrée" (Accord ADPIC, art. 16. 3). Pareillement, la Commission estime qu’il n’est pas démontré que les actes accomplis par le Défendeur soient "de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou (que cet emploi de la marque) constitue une exploitation injustifiée de cette dernière" (art. L.713-5 du CPI).

La Commission ajoute à cet égard que le Requérant ne fournit que des justifications de publicité essentiellement en France et qu’il n’est pas contesté que ce Requérant dispose du nom de domaine "merinos.tm.fr".

2. Droit ou intérêt légitime du Défendeur quant au nom de domaine litigieux

Même si le Défendeur n’était pas connu sous le nom de domaine considéré, la Commission estime que le Requérant n’a pas démontré que le Défendeur ait fait un usage déloyal du nom de domaine avec l’intention de détourner à des fins lucratives les consommateurs en créant une confusion ou de ternir les marques en cause et qu’inversement, le Défendeur a établi, dans le contexte des observations ci-dessus, qu’il pouvait légitimement enregistrer à titre de nom de domaine le terme "Mérinos", passablement descriptif pour des articles vestimentaires en laine, dont il assure effectivement la promotion sur son portail. La Commission ajoute qu’est inopérante la considération de ce que le "mérinos" se dise "merino" dans d’autres langues et qu’il ne peut être sérieusement reproché au Défendeur d’avoir, pour l’activité projetée, plutôt choisi "merinos.com", la plus connue des espèces ovines, pour la qualité de sa laine, que le banal "laine.com".

3. Enregistrement et utilisation de mauvaise foi

La Commission estime, encore, que les exigences de l’article 4 c) des Principes directeurs ne sont pas satisfaites en l’espèce.

En premier lieu, la Commission ne constate pas , en raison des éléments relevés ci-dessus, que le Requérant ait établi que le Défendeur ait procédé à un enregistrement et un usage du nom de domaine en cause de mauvaise foi, par exemple au regard des faits décrits de manière illustrative à l’article 4, b), ii), iii), iv), des Principes directeurs.

Le Requérant, dans sa plainte, fait néanmoins état de ce que le Défendeur aurait créé un lien avec des sites de vente aux enchères de noms de domaine, mais il est constant que ce lien a cessé lors de la mise en service du site du Défendeur : "merinos.com".

La Commission constate, en premier lieu, que ces sites ne comportaient que des offres de noms descriptifs au nombre desquels ne figurait pas, d’ailleurs, le nom "merinos.com".

La Commission relève, en outre, que rien dans les documents annexés à la Plainte n’établit que le Défendeur ait proposé ou accepté de monnayer auprès du Requérant ou d’un tiers le nom "merinos.com" et que, dès lors, il n’est pas démontré que le Défendeur ait "enregistré ou acquis le nom de domaine essentiellement aux fins de vendre, de louer ou de céder d’une autre manière l’enregistrement de ce nom de domaine au Requérant qui est propriétaire de la marque ou à un concurrent de celui-ci, à titre onéreux ou pour un prix excédant le montant des frais déboursés en rapport direct avec ce nom de domaine" (Paragraphe 4, b), i), des Principes directeurs; rappr. Décision OMPI n° D2000-0596, point 6-11).

La Commission souligne, encore, qu’à supposer qu’il puisse y avoir cependant un doute sur la bonne foi du Défendeur lors de l’enregistrement, le Paragraphe 4 a) iii), des Principes directeurs impose la démonstration cumulative de ce que le nom de domaine litigieux "a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi". L’ouverture du site consacré aux vêtements en laine par le Défendeur, sans relation avec les articles de literie, empêche clairement en l’espèce , selon la Commission, le Requérant d’effectuer la démonstration qui lui incombe aux termes du Paragraphe 4 a) précité.

La Commission ajoute, enfin, qu’elle pense que le Requérant était quelque peu conscient de son insuffisance probatoire tenant les affirmations fortement spéculatives (il est probable…; il semble…) des conclusions de sa Plainte (rappr. Décision OMPI n° D2000-0426, point 6, b) , même si la plupart des Décisions rendues dans le cadre de cette Procédure administrative ne peuvent être fondées que sur un ensemble d’indices et de présomptions.

 

7. Décision

Pour les raisons ci-dessus, la Commission administrative décide que le Requérant n’apporte pas la claire démonstration que le nom de domaine "mérinos.com" est identique ou semblable au point de prêter à confusion, aux marques sur lesquelles le Requérant a des droits; que le Défendeur n’a aucun droit sur le nom de domaine en cause ni aucun intérêt légitime qui s’y attache, ni qu’il a été enregistré et utilisé de mauvaise foi.

En conséquence, conformément au paragraphe 4 i), des Principes directeurs et 15 des Règles, la Commission n’ordonne pas que l’enregistrement du nom de domaine "merinos.com" soit transféré au Requérant.

 

 


 

 

Professeur Christian Le Stanc
Expert unique

Date : 5 octobre 2000